Fondée à la fin du 11e siècle à la suite d'une donation des comtes de Narbonne, l'abbaye est placée sous la dépendance de l'abbaye de Grandselve à Toulouse dès 1143 ; elle devient cistercienne en 1146. Dès le 15e siècle, l'abbaye devient une simple commende, puis au 17e siècle elle n'est plus qu'un bénéfice au profit de l'évêque de Perpignan. Vendue comme bien national à la Révolution, cette abbaye, largement reconstruite aux 17e et 18e siècles, subit quelques destructions. A nouveau occupée par des religieux, les bernardins, qui seront expulsés en 1901, elle sera acquise par Gustave Fayet en 1908. Celui-ci s'attache à la remise en valeur de l'abbaye : cloître dès 1908, puis ensemble de l'abbaye dès 1910. L'abbaye présente un plan formé par deux quadrilatères : le premier, d'époque médiévale, comporte l'église, la salle capitulaire, la salle des morts et le cellier ouest (12e siècle) et le cloître (seconde moitié du 13e siècle) ; le second est formé de trois corps de bâtiment du 18e siècle et d'un bâtiment du 12e siècle surélevé au 15e siècle. A l'intérieur de ce dernier, sont situés : le salon vert - caractérisé par ses boiseries du 18e siècle -, l'ancien réfectoire converti en grand salon - toiles peintes par Burgstaal avec des scènes d'inspiration wagnérienne -, le grand salon et la salle à manger décor d'azulejos - et la bibliothèque - décorée par Odilon Redon en 1911.
- recensement du vitrail, corpus vitrearum
- (c) Inventaire général Région Occitanie
Dossier non géolocalisé
-
Aire d'étude et canton
Aude
-
Commune
Narbonne
-
Lieu-dit
Fontfroide
-
Dénominationsabbaye
-
Genrede cisterciens
-
VocablesSainte-Marie
-
Parties constituantes étudiées
Le site, avec sa source éponyme (Fons frigidus), ses massifs de buis et ses cyprès, se prêtait admirablement à l'implantation du premier monastère placé sous la règle de saint Benoît. On situe cette fondation à l'extrême fin du 11e siècle, sur des terres accordées par le vicomte de Narbonne, Aymeric. Le pape Innocent II (1130-1143) confirme les premières donations, qui sont à l'origine des immenses possessions de l'abbaye en pays narbonnais, en Fenouillèdes, en Roussillon et en Catalogne. L'affiliation à Cîteaux intervient vers 1146. En 1151, sur l'intervention de Bérenger IV, comte de Barcelone, Fontfroide fonde en Catalogne le monastère de Poblet. Une deuxième fondation directe, Valbonne, au diocèse d'Elne, intervient en 1242. Au 13e siècle, Fontfroide est l'abbaye mère de cinq monastères d'hommes, auxquels il faut ajouter trois établissements de moniales placés sous la direction de l'abbé de Fontfroide. Au moment de l'hérésie albigeoise, Fontfroide apparaît comme la «citadelle de l'orthodoxie ». L'abbaye compte alors près d'une centaine de moines et 250 à 300 frères convers.
Dans les années 1180-1220, de nombreuses donations sont faites à l'abbaye, autorisant une importante campagne de construction : abbatiale, salle capitulaire, cloître (Galinier, 1975, p. 114). Le cloître sera rebâti dans la seconde moitié du 13e siècle ou au début du 14e (Gardey de Soos, p. 22).
Il subsiste encore de cette époque de nombreux vestiges : A l'ouest, ensevelis dans les terrasses du jardin, des arcs révèlent plusieurs bâtiments aujourd'hui disparus. A proximité, l'aile dite des Convers prolongée par le cellier, bien que remaniés quelques siècles plus tard, conservent des vestiges médiévaux. Les maçonneries prouvent que ces bâtiments ont été construits en plusieurs étapes mais de façon semblable dans le prolongement l’un de l’autre, simplement séparés par la porte dire "romane" qui était l'entrée principale de l'abbaye.
Au sud-est du couvent, sont présents d'autres vestiges médiévaux : les ruines de l'infirmerie dont les salles voûtées d'ogives au rez-de-chaussée seront englobées plus tard dans la reconstruction de l'aile du Prieur. Jean-Louis Rebière (Oculus n° 21, p. 10) restitue assez aisément le bâtiment construit au-dessus du ruisseau qu'il enjambait grâce à une voûte en berceau. Au-dessus, l'infirmerie disposait d'une grande salle rectangulaire longue de 5 travées et couverte d'une charpente qui reposait sur des arcs diaphragmes dont le départ reposait sur des culots moulurés encore en place. C'est ainsi que le dortoir des moines ou des convers étaient couverts au Moyen Age. L'infirmerie voisinait avec un logis médiéval dont il subsiste des vestiges ; une salle voûtée en partie basse dont les nervures sont similaires à celle de l'abbatiale, une fenêtre gothique, une porte en tiers point à l'étage avec une cheminée dont le conduit a été découvert en 2007 lors de travaux de rénovation des toitures (Rebière, Oculus n°21, p. 8).
De la même époque date sans nul doute le moulin situé au nord du site. Les maçonneries en pierre de taille de bel appareil, confirment que sa construction est contemporaine des grands travaux opérés au cours du 13e ou du 14e siècle, ce que confirme une baie chanfreinée . Une baie chanfreinée percée dans le mur nord en amont du moulin. Dans le passage couvert, encore en place au-dessus du ruisseau, plusieurs phases de construction se remarquent sans que l'on puisse actuellement établir une datation précise. Plusieurs campagnes de travaux datables de l'époque médiévale peuvent être observées sur l'élévation nord de l'abbaye, au droit du ruisseau.
__________________________________________________
L'abbaye est mise en commende en 1476. Le premier abbé commendataire est Antoine Pierre de Narbonne, évêque de Vabres, qui respecte les biens de l'abbaye mais ils seront peu à peu dispersés par le cardinal de Ferrare, abbé commendataire en 1548 et par la dynastie des abbés qui le suivent : les Frégose. De 200 moines au 12e siècle, la communauté est réduite à 7 en 1594, ce qui pousse l'abbé Alexandre Frégose à diviser le temporel de l'abbaye en deux menses distinctes, celle de l'abbé et celle du couvent. Il faut toutefois reconnaître que les abbés commendataires, s'ils ont affaibli la discipline et contribué à ruiner l'abbaye, n'en ont pas moins marqué le monastère dans son architecture. On leur doit la surélévation du réfectoire des convers, l'aménagement des jardins, l'ajout d'éléments mobilier et la construction de la cour d'honneur avec le logis abbatial.
La transformation du dortoir des convers en hôtellerie avec le percement des baies à meneaux et traverses est sans nul doute la principale transformation de l'aile ouest du monastère au 17e siècle. C'est à cette époque (Gardey de Soos, op. cit. p. 53) que l'on transforme la porterie médiévale et que l'on construit l'escalier monumental qui mène d'un côté aux chambres de l'hôtellerie et de l'autre au dortoir des convers aménagé au-dessus du cellier. Plusieurs documents conservés aux Archives départementales de l'Aude indiquent des travaux en 1679 : la commande du maître autel au Sieur Casalbon le 11 août 1679 (AD Aude, H 610) ; la réparation des couverts et du dessus du cloître en octobre 1679 par le maître maçon Félix Pradel qui est aussi chargé d'aménager l'alimentation en eau de l'abbaye depuis les deux sources voisines vers les différents points d'eau du monastère (principalement le réfectoire et la cuisine). Un inventaire réalisé le 23 avril 1727, au moment de l'arrivée du nouveau prieur Dom Verdier qui succédait à son prédécesseur décédé (AD Aude, H 610) décrit l'escalier et les chambres des hôtes et même s'il signale que le couvent est pauvre et vétuste, habité de 16 religieux et de 12 domestiques qui se plaignent que l'abbé n'a jamais payé sa charge d'huile d'olive, il fait mention de plusieurs chantiers en cours.
En effet d'importants travaux sont entrepris dans le deuxième quart du 18e siècle. Il est probable qu'Emmanuel-Henri Timoléon de Cossé-Brissac, abbé commendataire de 1717 à 1754 les ait initiés. Ainsi, on entreprend de réparer "toutes les murailles du grand enclos ont besoin d'être réparées" car plusieurs brèches y sont localisées, on commande en 1724 un retable au marbrier de Caunes, Guillaume Gillard. On travaille activement à faire des croisées et sept grandes arcades qui relevaient le corridor de la bibliothèque. On refait aussi "la porte d'entrée de la maison et le reste des bâtiments qui en dépendent". Des réparations sont ensuite entreprises dans le dortoir dont on répare les voûtes "qui sont entrouvertes et baissées en plusieurs endroits". De nouvelles chambres d'infirmerie sont construites puis on répare "toutes les arcades de la fontaine" dont le bassin est refait à neuf. On relève "environ trois cens cinquante toises de canonade" et on s'occupe enfin de la couverture du grand grenier et construit une porterie neuve. Il n'est cependant pas fait mention de la construction du logis abbatial, établi à l'est de la cour d'honneur, ce qui sous entend que cette partie de l'abbaye n'est construite que plus tard. Le nouveau bâtiment qui absorbera à l'ouest les bâtiments de l'ancienne infirmerie, englobera également un logis médiéval à 2 étages avec une vaste salle voutée d'ogives au rez-de-chaussée et une ou plusieurs salles à l'étage.
En 1764, le titre abbatial de Fontfroide est supprimé et les biens du monastère sont réunis au siège épiscopal de Perpignan. Il subsiste alors une petite communauté de 7 moines qui dépense chacun la totalité de ses rentes à mener une vie oisive sans parvenir à améliorer l'état du monastère. Pourtant les registres tenus par le comptable et le dépensier (AD Aude, H 610) mentionnent des travaux dans le dernier quart du siècle : En 1776, les murailles des terrasses sont élevées. La fontaine est entièrement démolie et maître Rocagel fait exécuter le terrassement et la construction de la grande terrasse. Il procède à l'entière construction de l'orangerie et à l'alignement du chemin devant la maison pour la somme de 1000 livres. Des mineurs de Bizanet sont engagés pour enlever des rochers qui encombrent l'orangerie et les moines ont l'obligation de nourrir les ouvriers qui travaillent au chantier de rénovation de l'abbaye.
En 1777, on procède à la construction des murs destinés à diviser les grandes salles. Les travaux sont confiés au maître Figeac et au plâtrier Cristol. Ils procèdent à la réfection des murs et des portes du réfectoire, ailes et appartement neuf dans l'ancienne salle de billard et la chambre du haut. Les deux artisans perçoivent la somme de 400 livres pour la construction des portes et des murs du réfectoire, 350 livres pour les décorations en pâtre et 450 pour les 450 pour les 45 toise de pavement du réfectoire. La construction d'un appartement neuf et d'une salle de billard est aussi signalée dans les extraits de la comptabilité de Fontfroide (AD Aude H 616)
En 1778, Pierre Rocagel perçoit la somme de 850 livres pour la couverture du grand vestibule, du portail et de son arceau. Il touche l'année suivante 2.800 livres pour diverses réparations et la construction de nouveaux aqueducs. En 1782 on procède aux fondations de la nouvelle cuisine, dans le prolongement du réfectoire. c'est encore Rocagel, entrepreneur de bâtiments qui perçoit 1566 livres pour "la construction de l'aile neuve du dortoir" achevée dès l'année suivante (AD Aude H 616). A l'étage, plusieurs salles sont donc construites en retrait par rapport au cloître. Une galerie avec 8 arcades est ainsi aménagée. Murées après 1858 par les moines bernardins de l’Immaculée Conception qui prirent possession de l’abbaye, elles seront réouvertes par Gustave Fayet après 1909.
Ainsi, à la fin du 18e siècle, la richesse et les revenus semblent être de retour à Fontfroide. "La vie y était douce et facile. Les relations mondaines, les plaisirs de la table, les voyages étaient le fond principal. Les religieux vivaient entre eux comme des hommes du meilleur monde, ils étaient servis par de nombreux domestiques (De soos, p. 124). En 1786, un poêle est installé dans la salle à manger des moines. Les murs de clôture de l'abbaye sont réparés l'année suivante ; "le parterre de Monsieur le Sousprieur et le jardin de Monsieur le Sousprieur" sont dessinés en 1789, date à laquelle les registres que le revenu total du monastère, avec ses 7 moines servis par de nombreux domestiques, était de 63.312 livres
Sans qu'on ne puisse dater précisément son édification, le bâtiment situé au nord de la cour Louis XIV est vraisemblablement le dernier construit afin de fermer la cour. Même si ?? de Sooss, (op. cit. p. 75) estime qu'il a été élevé avec les pierres issues des démolitions des bâtiments précédents, l'analyse des maçonneries n'a pas permis de confirmer son hypothèse.
La Révolution qui éclate en 1789 a vidé et confisqué tous les établissements des congrégations religieuses, devenus biens nationaux : le dernier moine ayant quitté en Fontfroide en février 1791, les bâtiments et les terres sont mis en vente à un prix supérieur à celui proposé par les acquéreurs potentiels ; ils sont donc par préemption inclus dans le domaine de l’Etat et affectés, avec leurs maigres revenus, aux hospices de Narbonne qui ne se privèrent pas de vendre ce qui pouvait trouver acquéreur. Une partie du cloître de Fontfroide est cédée en 1828 : 10 colonnettes, 10 chapiteaux et bases, et 4 impostes sont alors vendues au comte de Saint-Priest pour embellir son château près de Lyon, où 4 colonnettes seulement et six chapiteaux seront retrouvés dans les années 1990.
En 1834, Fontfroide est finalement acquise par un particulier. La vente, autorisée par ordonnance royale du 9 août 1833, eut lieu le 3 novembre pour un prix de 151.000 francs, en présence du maire de Narbonne, Monsieur Tallavignes et d'un certain nombre d'autres témoins, chez Favatier, notaire à Narbonne. Un arrêté préfectoral daté du 8 novembre approuva (Faure, 1894) Ca yard, Narbonne) la cession au baron Bourlet de Saint-Aubin, amateur d’art qui entreprend, dès son entrée dans les lieux, les travaux de première urgence tels que réparations des toitures, terrassements, déblaiements nécessités par les dégâts des eaux. Il ne dépense pas moins de 10.000 francs, souhaite "attacher son nom à la conservation des monuments de Fontfroide" et invite Eugène Viollet-le-Duc à venir visiter Fontfroide. Lors de sa visite en 1843, l'architecte constate que 17 colonnettes du cloître, avec leur base et chapiteau, manquent, mais que l’église est dans son ensemble en meilleur état qu’on ne peut l’imaginer. Il propose que le cloître soit classé au titre des Monuments historiques, ce qui sera effectif en 1862.
L’année 1858 marque le retour de Fontfroide à la spiritualité de ses origines, lorsque, envoyés de Sénanque par la congrégation des cisterciens de l’Immaculée Conception, 13 moines s’installent début septembre dans une abbaye telle qu’ils ne pouvaient vivre que dans une stricte austérité, un dénuement même, qui aurait satisfait saint Bernard. L’évêque de Carcassonne ayant consacré l’église 4 jours après leur arrivée, ils observent une règle qui impose travail manuel et prières.
Le nouveau propriétaire procède assez rapidement à l'aménagement des différentes salles de cette partie de l'abbaye. Il fait démolir la cheminée qui chauffait le salon vert ; il met à nu la pierre des murs dans l'ancien réfectoire, ne laissant que les cadres stuqués pour lesquels il commandera de nouveaux tableaux à Richard Burgsthal IM11004199 et mettra en place un ameublement particulier.
A l'étage, Gustave Fayet fait aménager la biblothèque. Il commande la réalisation des voûtes en béton (DSC 313) en remplacement de la charpente et confie la décoration à Odilon Redon: il fait démolir la cheminée qui chauffait le salon vert ;
Un décret du 25 mars 1790 ordonne l'inventaire des biens de l'abbaye. Effectué le 10 avril suivant, il entérine son évacuation par les moines après paiement d'une pension. Il est vendu comme bien national en 1791, cédé un temps aux hospices de Narbonne. En 1799, Jacques Gamelin, professeur à l'Ecole centrale de l'Aude et chargé de l'exécution du muséum départemental attribue à la municipalité de Narbonne certains tableaux provenant de Fontfroide (Gardey de Soos, p. 27) DSCF 251
, l'édifice accueille à nouveau la vie monastique en 1858, avec l'implantation de bernardins d'obédience cistercienne venus de Sénanque, sous l'autorité de dom Léonard, le père Jean, dont le corps repose dans une chapelle élevée au chevet de l'église.
Ordonné prêtre à 24 ans dans le diocèse de Nîmes, Louis Léonard renonce en 1856 au siècle [PL2] pour une vie claustrale dans l’abbaye de Sénanque, et devient le Père Jean-Marie. Deux ans plus tard, alors qu’il est maître des novices, sur le conseil de l’évêque d’Avignon d’ « essaimer », il part pour Fontfroide avec douze frères : il a 43 ans. Cet homme humble mais tenace pour qui «Le découragement est toujours le fruit de la tentation et de l’amour propre » et qui
Divers travaux sont alors réalisés pour remettre l'abbaye en état. On construit de nouveaux bâtiments et on passe le cloître à la chaux. En 1901, expulsée en application de la loi Waldeck-Rousseau sur les congrégations, la communauté se réfugie en Espagne et l'abbaye est rachetée en 1908 par Gustave Fayet et son épouse, Madeleine d'Andoque de Sérièges. Collectionneur et peintre, Gustave Fayet entreprend la restauration des bâtiments. Il fait aussi de Fontfroide un lieu culturel, réunissant écrivains, musiciens et peintres languedociens ou parisiens, comme Déodat de Séverac ou Odilon Redon.
Gustave Fayet fait vider l'ancienne salle des chevalier qui avait été transformée en écurie. Il fait rouvrir les baies et en crée deux autres.
L'architecture de Fontfroide apparaît comme un art de transition entre le roman et le gothique, mêlant la tradition romane méridionale aux nouveautés, en matière de voûtements notamment, introduites par les bâtisseurs cisterciens. Pour la salle capitulaire en particulier, des comparaisons peuvent être établies avec l'Escale-Dieu (Hautes-Pyrénées), Flaran (Gers), et Sylvanès (Aveyron).
Le seul reproche qu’on puisse lui faire est que l’état de délabrement de l’abbaye satisfaisait son « amour de la mortification », comme l’écrit le Père Célestin, qui précise que les quelques travaux entrepris furent décidés par le Père Archange, sous-prieur durant un peu plus d’une année de 1862 à avril 1863 : « secondé par le P. Antoine, toujours le premier au travail, il s’occupa à mettre l’église dans un état plus décent […]. Les petits autels collatéraux furent relevés : un chœur provisoire fut construit où l’on devait chanter les offices, construction grossière en briques, mais qui au moins ressemblait à quelque chose et préservait du froid. La belle église en pierre de taille avait été défigurée par un affreux badigeonnage. C’était un travail aussi long que dangereux pour le faire disparaître. Ce fut l’ouvrage qu’entreprit le P. Antoine. […] Enfin l’ancien réfectoire fut rétabli […] ; et la cuisine avec son énorme cheminée fonctionna de nouveau. » Il précise encore que le Père Antoine prit ensuite l’initiative de, petit à petit, « fermer les ouvertures des fenêtres, ou plutôt y replacer des vitraux. » Enfin, on posa deux cloches, don d’une veuve de Bizanet, Mme Viramont. La clôture de l’église fut rétablie, son libre accès au public interdit, et la fête annuelle du 8 septembre supprimée : comme elle était selon le Père Célestin « sujet de désordres et de scandales », l’abbaye retrouvait donc aussi une certaine dignité. En 1863, année durant laquelle l’importante dette consécutive à l’achat de Fontfroide en 1858 fut levée à l’initiative de Dom Cesari, alors président de l’ordre, le dénuement commença donc à n’être plus extrême.
La notoriété de la communauté et son prieur était telle que la protection de l’épouse du président de la République Jules Grévy lui avait évité l’expulsion, alors que les deux décrets de 1880 avaient provoqué l’éviction de tous les jésuites et la dispersion de 6589 religieux d’autres congrégations. Mais après leur retour progressif favorisé par une politique de détente, couronnée en 1892 par l’encyclique du pape qui avait ajouté ; « aux catholiques français: Acceptez la République. », un regain d’anticléricalisme aboutit à la loi Waldeck-Rousseau de 1901 : toutes les congrégations doivent alors demander une autorisation, ce que la plupart font ; les autres sont dissoutes, et les moines de Fontfroide s’exilent en Espagne après avoir tenté vainement de racheté leur abbaye. [PL1] Ils reviendront d’abord à Saint-Michel de Cuxa (66) en 1919, avant de se joindre aux Cisterciens de Lérins (06), eux-aussi issus de l’abbaye de Sénanque.
Pendant ce temps[PL2] , acquise en indivision par deux propriétaires en désaccord, l’abbaye de Fontfroide reste dans un état d’abandon qui s’aggrave. Pendant un demi-siècle la respectable mais humble communauté n’avait pas eu les moyens de l’entretenir avec tout le soin nécessaire, mais sa vente au début de l’année 1908 à Gustave Fayet et son épouse Madeleine d’Andoque lui offrira, non la résurrection d’un espace monacal, mais une providentielle seconde vie.
[PL1]Phrase trop longue (couper au moins avant « les moines de F. », voire après « autorisation ».)
[PL2]« Après le départ des moines » me semblerait plus clair.
Gustave Fayet se posa la question du classement et de ce que cela impliquait. Dans une lettre du 8 mai 1908, Joseph Philippe Winckler, architecte de Fayet, interroge les Monuments Historiques, sur la marche à suivre pour les restaurations urgentes sur le cloître,
envisagées par le nouveau propriétaire779. Henri Nodet, Architecte des Monuments
Historiques lui explique que pour toute restauration sur un élément classé, il faudra avant tout
aviser l’administration780. Fayet prend note de cela, et suit évidemment les préconisations
faites par l’administration. Mais les rumeurs vont bon train dans la région, en juin, Fayet
reçoit une lettre de la préfecture de l’Aude, on s’inquiète au sujet de Fontfroide, et de ce que
Fayet va y faire, connu comme propriétaire viticole, on a peur qu’il utilise les lieux pour en
faire une distillerie !
« M. le Sous-Secrétaire d’État des Beaux-Arts a été avisé que vous seriez sur le
point de faire exécuter des travaux dans l’ancienne abbaye de Fontfroide dont vous êtes
propriétaire en vue de transformer le monastère en distillerie. M. le Sous-Secrétaire d’État
appelle tout particulièrement mon attention sur cette affaire, et me charge de vous rappeler
que le cloître est classé parmi les monuments historiques et qu’en conséquence cette partie
ne peut ni être détruite, même en partie, ni être l’objet d’un travail de restauration, de
réparation ou de modification quelconque sans l’autorisation préalable du ministre des
beaux-arts et en dehors de la surveillance des Architectes de Monuments historiques »781.
Évidemment Fayet n’avait jamais eu de telles intentions. Dès lors une relation
triangulaire est mise en place pour les travaux, l’architecte de Fayet, Winckler voit avec lui les
restaurations à faire ; ce dernier les soumet à Henri Nodet, architecte des Monuments
Historiques qui doit donner son accord, puis qui supervise le tout ; enfin, c’est l’entrepreneur
Vassal, de Moussan, qui réalise les travaux aidé d’autres artisans : M. Trouilhet, le ferronnier
et M. Molinier le menuisier, tous deux originaires de Béziers. Le premier projet de
restauration concernait le cloître, pour un montant de 15000 francs, Fayet reçoit un avis
favorable. La seule condition posée était que l’architecte de Fayet soit dirigé par celui des
778 Lettre autographe signée de Gustave Fayet à Madeleine Fayet, [Béziers, 2 décembre 1907], Archives privées,
inédite.
779 LENIAUD, Jean-Michel, Droit de cité pour le patrimoine, Québec, Presses de l’université de Québec, 2013.
780 Lettre d’Henri Nodet à Joseph Philippe Winckler, [Paris, 21 mai 1908], Archives de Fontfroide.
781 Lettre autographe signée du Secrétaire Général délégué de la Préfecture de l’Aude à Gustave Fayet,
[Carcassonne le 15 juin 1908], Archives de Fontfroide, inédite.
carnet fayet
7 décembre 1907 : Fontfroide, source, son débit l'été, terres labourables, jardin potager, garrigues, bergeries.
23 janvier 1908, Fontfroide est à nous pour 49925 F
mercredi 5 février 1908 : clés Fontfroide à mettre en ordre + Fontfrroide, partie classique/bulletins, sur Fontfroide
23 février 1908 : Séquestre. Linas. Chèvres. Assurances. Saisie des vins. Préfecture Monuments historiques. Clés à mette en ordre, Bourras et couverture des lieux.
24 février 1908 : archives Fontfroide
27 mars 1908 : réparer bergerie saint benoit, faire logement du berger, boucher la porte sur la ruine, mettre en ordre dans les deux caves, débarasser la cave de la grande salle
3 aout 1908 : Winckler: eau réservoir, captation possible d'avoir des eaux - prix fait / essais de ciments colorés
4 aout winckler prix faits partout
9 aout 1908 devis fenêtre simple, réservoir source, cheminées, murs, essais de ciments colorés, dallage église
10 aout 1908 prévenir le maçon qu'il sera seul la journée pendant les vendanges et à l'avenir
18 aout 1908, achever logement berger Fontfroide. Que maçon commence par hangar fumier
24 aout 1908 Trouilhet lundi à Fontfroide. Placer les portes, oeil de boeur, petites fenêtres bergerie
22 aout 1908 : partie classée : salle capitulaire, replacement colonnes et chapiteaux ouverture des arceaux supérieurs. Dallage. Bancs. Boucher portes dans cloitre, consolider les nervures, vasque et jet d'eau, rejointoyer les pierres
22 septembre Vassal fait le hangar de Fontfroide 450. On a le dessin d'un plan
9 novembre 1908, paiement au forfait de la ruine de la grande salle.
21 janvier 1909, Fayet note dans son carnet qu'il faut des pierres pour le puits, qu'il faut transplanter cakis, s'occuper de la buanderie et d'un banc, corbeille neptune pétunias, niveler la cour d'entrée, sabler le jardin de la grande salle
26 janvier : note dans les carnets achever le nettoyage salle défense, dessus la cave etc, nettoyer les terrasses extérieures, Vassal doit sabler la grande salle. Il propose de payer ce qu'il doit à Vassal et demande la dimension de fenêtres à Gontrand, marquer la grande cour Louis XIV fait faire le devis pour terminer la grande cheminée, le perron de neptune et le réglage des talus de neptune. Il note de faire entretenir les terrasses extérieures.
1er février 1909 : Paye l'adduction d'eau à Fontfroide (Jaume 1800 Winkler 391.95) Paye par chèque Vassal pour la grande salle, le socle de la vasque et des vases de l'entrée, les murs de clôture et le bassin du quadrige, cheminées, deux réservoir, le portail du quadrige (6168) honoraires de Winkler 374,45 + facture de 520 à Molinier
5 juillet 1909, mention d'échafaudages dans la salle rose.
4 octobre 1909, Vassal est payé pour les 3 mois juillet aout speptembre 1600
28 octobre 1909, demande à winkler de commander les vitraux, Payé à Vassal le solde pour la salle à manger, l'office et la cuisine (3400)
1er novembre 1909, mention vitraux winkler
6 novembre 1909, payé vassal 1450
4 décembre payé vassal salle à manger fontfroide 1569
22 décembre honoraire Winkler 68.40
10 janvier 1910 : carnet fayet, écoulement des eaux de pluie dans la grande cour
16 février 1910, on règle à Vasasl 2500 f pour ses travaux à la salle parlante, la pharmacie, et l'infirmerie
21 mars 1910, on règle à Vassal 5900 f
17 juin 1910 Vassal vitrer peindre fenêtres et portes à vitres grande cour, gris un peu jaune, vitraux salle croix de moussan, canalisation cloître
19 juin 1910 honoraires winckler 14.70
29 aout 1910 remis à Vassal 4000 solde des travaux de régie pour Fontfroide jusqu'en septembre.
18 novembre 1910, dessin sur le carnet qui montre l'aménagement de l'escalier dans l'aile des convers.
21 novembre 1910 : arceau Fontfroide
25 décembre 1910 : pavage salle de musique
4 janvier 1911 : 1er accompte pour toiture
15 janvier 1911 : Trouillet, comptes de l'année 1900, Molinier : comptes de l'année 1925
27 février 1911 : Vassal reçoit 5000 f
26 avril 1911 : Vassal système maintient vitraux quand ils sont ouverts, grande fenêtre (...) règlement dès que tout sera terminé
13 mai 1911 : Poirier vitraux Fontfroide, 67 F. Emballer les vitraux 123.50
24 mai 1911 : Trouillet, portes de Fontfroide, aller tout mettre en place, bien patiné bois et fer.
28 aout 1911; solde vassal en juillet 1911 8150
27 septembre 1911 : compte trouillet fontfroide 5000
17 novembre 1911 : Fontfroide truquer Père Jean, faire fosses pleine terre pour lierre et vigne vierge, ébrécher les pierres. Vigne vierge dans les terrasses d'olivier, plantation, arranger lierre cour louis 14. Débarasser les vieux bois
21 janvier 1912 : Maury 11,50. Tamme (?) menuisier Fontfroide 11,50 Bergès restauration divers meubles 1200
12 avril 1912 : payé à Vassal 6300
6 mai 1912 : Trouillet prendre mesure pour les cornières fenêtres double escalier, salle de musique attendre les dessins de Burgsthal. Les autres sont elles parties.
8 juin 1912 : achat de vitraux à tourrel (900)
2 juillet 1912, vu Nodet pour rapport l d'h
5 juillet 1912 laisser à Richard 2 chèques de 3000 f pour Burgsthal
12 aout 1912 Trouillet, plomb pour robinet - porte lanterne
5 septembre 1912 : Trouillet, chaines clocher
6 septembre 1912 : remis à Touire 600 acompte sur travaux faits à Fontfroide
29 septembre 1912 : remis à Vassal 5000
9 octobre 1912 : solde compte trouillet Fontfroide (3000)
7 novembre 1912 : dépenses Fontfroide (91,60)
9 février 1913 : dessin d'une porte à Lérins qui pourrait avoir inspiré Fayet à Fontfroide
14 juin 1913 : mesures père Jean, comptes Vassal, canalisations, encastrer les décorations, source réservoir, trop plein bassins, ferrures roseraie, peaux de renard, choeur mosaïques, plan du Laragnon (?)
15 octobre 1913 : j'ai remis 1000 acompte sur travaux Fontfroide à Trouilhet
8 mars 1914 : vassal source gloriette eau trouble reliquat argent de l'état
11 mars 1914 : champ des soleils achever le mur à la chaux, redresser grillage et lui mettre un rebord.
14 mai 1914 : Rougeton demain Fontfroide/Vassal ouvrir reparer toit
4 février 1915 : versé 400 f à vassal
19 mars 1915 : travaux Fontfroide
20 mars 1915 : solde vassal Fontfroide 893 francs
fin mars 1915 : ferronneries toulouse 1300
16 juillet 1915 : Remis vassal accompte sur travaux Fontfroide 2500 / Cte Maury peintre 390
29 août 1915 : Winckler
23 septembre 1915 : Wincker à voir/huile feu du chenet ?/ Valat pas de paravent
15 décembre 1915 : compte vassal fontfroide 390
13 juillet 1916 : remis à Givaudan ? acompte travaux en cours Fontfroide (500)
10 aout 1916 : compte Givaudan Fontfroide solde 1646
12 septembre 1916 : payé à Winkler 30 F chapelle notre dame
4 décembre 1916 : compte Givaudan 2509.70
4 janvier 1917 : Portail trouilhet
30 septembre 1917 vider à Fontfroide sacs plâtre sur parquet grenier et rendre les sacs
20 juillet 1918 : poutres fontfroide
21 juillet 1918 ; Trouilhet, clocher Fontfroide
4 septembre 1918 : accompte sur les 1000 ?? pour plans fontfroide (les bosquets et la ferme n'étant pas compris)
En 1925, Madeleine Fayet, veuve à 52 ans, continue seule à construire (le rehaussement du moulin entre autres), à aménager les · jardins en terrasses, et termine avec Richard Burgsthal l'aventure des vitraux. Puis c'est la crise de 1930 et la Seconde Guerre mondiale. Plus rien ne se fait jusqu'en 1965, où l'on s'aperçoit que toutes les charpentes de !'Hôtellerie et des bâtiments conventuels sont termitées. Commence avec Henri Bigot leur remplacement par des hourdis d'argiles renforcés d'éléments de béton précontraint, une considérable, longue et coûteuse opération, suivie d'une pause jusqu'à la reprise contestée de la couverture du dortoir des convers en 1982. (Occulus 13 p. 22)
-
Période(s)
- Principale : 2e moitié 12e siècle
- Principale : 1er quart 20e siècle
- Secondaire : 17e siècle
- Secondaire : 18e siècle
L'église
L'église est formée d'une nef à trois vaisseaux, d'un transept et d'un choeur à abside. Deux chapelles à absidiole, séparées du choeur par une petite chapelle carrée, s'ouvrent sur les bras du transept. Les doubleaux du berceau brisé du vaisseau central retombent sur des colonnes engagées portées par des consoles en quart-de-rond. Les bas-côtés sont couverts d'un demi-berceau. Le transept, le choeur et les chapelles sont voûtés d'ogives toriques. La nef a été construite entre 1150 et 1175 ; le transept, le choeur et les chapelles à la fin du siècle. Une chapelle rectangulaire, peut-être la chapelle des abbés, a été accolée au 13e siècle, sans doute à l'imitation de Clairvaux, à l'extrémité droite du transept. Des chapelles latérales ont été ajoutées sur le flanc droit de la nef au 14e siècle. Un escalier met en communication le bras gauche avec le dortoir et une porte dessert la sacristie. Dans les première et cinquième travées, deux portes donnent respectivement accès à la ruelle des convers et au cloître. Au-dessus de la croisée du transept est implanté un petit clocher pentagonal. La couverture en dalles directement posées sur l'extrados des voûtes et le clocher carré coiffé d'une coupole placé sur le bras droit sont des réfections modernes reproduisant, au moins pour la couverture, la disposition primitive.
Le cloître
La présence d'un ruisseau à l'est et au nord du site a contraint l'implantation des bâtiments monastiques au nord. Le cloître est couvert de voûtes d'ogives toriques. La retombée s'effectue sur un faisceau de trois colonnettes et, dans le mur, sur des culots tronconiques feuillagés ou à crochets. La construction, commencée au 13e siècle par la galerie sud, s'est achevée dans les premières années du 14e siècle. La galerie nord a été refaite au 17e siècle. Des fouilles ont partiellement dégagé le réseau hydraulique primitif. L'aile orientale était occupée au rez-de-chaussée par la sacristie, la salle capitulaire, un passage permettant d'accéder au cimetière et un second escalier d'accès au dortoir des moines situé à l'étage. La salle capitulaire, avec ses ogives toriques, a été commencée à la fin du 12e siècle, et achevée au début du siècle suivant.
L'aile des convers et du cellier
Côté cour Louis XIV, le bâtiment est percé au rez-de-chaussée d'une porte centrale avec de part et d'autre deux fenêtres cintrées. A l'étage, 17 baies rectangulaires très étroites éclairaient les chambres des moines. Les maçonneries, constituées de blocs en pierre de taille de moyen appareil, sont homogènes sauf autour de la porte centrale et du côté nord, où se remarquent les traces de bâtiments disparus. Dans l'angle sud, l'arcade cintrée de la ruelle des convers prend appuis sur l'élévation. Au rez-de-chaussée, la grande salle rectangulaire longue de 44 m, large de 8 m et couverte d'ogives servait de réfectoire pour les frères convers. Elle reçoit la lumière par deux baies cintrées percées dans l'élévation orientale et par 4 baies géminées ouvertes dans le mur ouest. A l'angle sud-est, la porte, toujours en place, permet de rejoindre la ruelle des convers et le cellier.
Côté cour d'honneur, les maçonneries médiévales sont homogènes. L'appareil en pierre de taille de moyen appareil court sur toute la longueur de la façade et monte jusqu'au deux tiers de l'élévation. En partie basse, les baies géminées du réfectoire dont une paire a été remplacée par une porte monumentale et en partie haute les fenêtres rectangulaires qui éclairaient le dortoir des convers sont nettement visibles même si certaines ont été bouchées. On remarque vers le sud, au niveau du portique qui ferme la cour d'honneur, la trace d'une ouverture au rez-de-chaussée aujourd'hui murée qui communiquait avec le réfectoire des convers prolongé vers le sud par la porterie médiévale et le cellier. L'analyse des élévations permet de confirmer que l’aile des convers et le cellier ont été bâtis de façon semblable, dans le prolongement l’un de l’autre, bien que les assises de pierre de taille de la façade du cellier aient un module plus petit que celui de l’aile des convers.
Dans le tiers supérieur de l'élévation ouest, on remarque clairement la surélévation du bâtiment lors de sa transformation en hostellerie avec le percement de larges baies à croisées protégées par un larmier chanfreiné retombant sur des culots sculptés. La fenêtre rectangulaire qui surmonte la porte médiévale, dispose elle aussi d'un larmier retombant. Elle a donc été percée au moment de l'installation de la cage d'escalier et confirme que l'ancienne porterie, construite dans un bel appareil avec des claveaux finement taillés, perdit alors son rôle défensif. En effet, le linteau monumental, en léger retrait par rapport à l'arc de la porte, laisse assez d'espace pour le passage d'une herse qui devait protéger l'entrée de l'abbaye au Moyen Age. Plusieurs baies, aujourd'hui obturées confirment un usage défensif de cette partie de l'élévation.
L'aile du Prieur, dans la Cour Louis XIV
L'aide du prieur ferme la cour Louis XIV du côté oriental. Le bâtiment ordonnancé présente un avant-corps central dominé par un fronton triangulaire timbré d'un blason flanqué de deux ailes en léger retrait. Au rez-de-chaussée, l'avant-corps ouvre sur la cour par 3 baies cintrées très simples tandis que les 3 fenêtres de l'étage disposent d'un encadrement saillant avec une imposte marquée qui se prolonge par un bandeau qui couvre toute l'élévation. Construit en pierre de taille de moyen appareil, le bâtiment haut d'un étage et couvert d'une toiture de tuiles, est contraint à l'est par le dénivelé du ruisseau. Dans l'angle sud-est, la salle rectangulaire, longue de deux travées voûtées d'ogives, est le vestige d'un logis médiéval dont il subsiste à l'étage une fenêtre gothique et une porte en tiers point. Le profil des ogives et celui des arcs doubleaux en appui sur des culots arrondis confirment le caractère médiéval de cette partie de l'édifice et l'arrêt soudain des nervures contre le mur de séparation placé au nord indique clairement que la salle se prolongeait avant qu'elle ne soit remplacée par les bâtiments actuels. A l'étage, les différentes pièces sont disposées de part et d'autre d'un couloir médian. Leur disposition a fait disparaître celle du Moyen Age cependant les travaux de réfection des toitures réalisés en 2007 ont permis d'observer la présence d'un conduit extérieur de cheminée médiévale sur ce qui semble être le mur-pignon nord jouxte le jardin. En partie basse, une baie géminée permet d'éclairer la pièce voûtée du rez-de-chaussée. Les chapiteaux simplement épannelés et leur imposte sont une restitution récent.
Dans le prolongement de l'aile du prieur mais séparé du reste de l'abbaye par un petit jardin, l'ancien cimetière des moines, subsistent les ruines de l'ancienne infirmerie, construite au-dessus du ruisseau dont le bel appareil de pierre de taille permet d'envisager une édification contemporaine de celle de l'abbatiale. La partie basse, directement appuyée sur le lit rocheux du cours d'eau conserve les traces d'arrachement d'une voûte en berceau aujourd'hui effondrée. L'élévation conservée en partie haute correspond à une vaste salle longue d'au moins 4 travées dont la toiture devait reposer sur des arcs diaphragmes dont il subsiste encore les culots moulurés et les vestiges de baies rectangulaires dont l'ébrasement a été comblé. A l'angle du pignon sud, subsiste la naissance d'une voûte ogive qui devait couvrir la travée sud de l'infirmerie, plus large (Rebière, Oculus, 2015, p. 6). Les contreforts saillants visibles à l'extérieur de l'édifice, à ce niveau, en confirment l'existence.
L'aile nord de la cour Louis XIV
L'aile nord est un bâtiment à une étage en partie ruiné. présente un appareil assez régulier de moellons. Il présente en alternance irrégulière 6 portes et 3 fenêtres en rez-de-chaussée. L'élévation est percée à l'étage de 4 grandes fenêtres et d'une niche. Une partie de ce bâtiment est ruiné et il n'en subsiste plus que l'élévation sur la cour percée de baies. Tous les appuis de baie sont en saillie
L'élévation nord de l'abbaye
Les maçonneries de l'élévation nord de l'abbaye, construites au droit du ruisseau sont hétérogènes. Elles témoignent donc de plusieurs campagnes de travaux. L'angle nord-ouest, percé d'une baie rectangulaire en partie basse, est difficile à analyser. Il correspond sans doute aux bouleversements opérés au moment de la reconstruction de l'aile des convers et de la jonction des bâtiments de cette partie de l'édifice.
Vers l'ouest, les 4 fenêtres en anse de panier de l'étage correspondent à la dernière campagne de travaux, celle qui consista à aligner les bâtiments de la cour Louis XIV et à les surélever. Le changement d'appareil dans la partie supérieure du mur indique la transformation. La partie basse, construite dans un appareil plus large et régulier est antérieure. On y remarque deux arcades, aujourd'hui murées qui correspondent aux salles voûtées du rez-de-chaussée. Une chaîne d'angle signale la limite d'un premier bâtiment contre lequel est venu s'appuyer un second dont la maçonnerie, irrégulière en partie basse, porte une surélévation dont l'appareil régulier est percé de 5 baies. Dans cette partie, la maçonnerie témoigne de transformations antérieures à la surélévation. On y voit des jours, des traces d'empochement de poutres qui prouvent que cet élément fut largement modifié.
Plus loin, vers l'est, prend place l'ancien moulin de l'abbaye dont les maçonneries en pierre de taille sont visiblement médiévales ont été surélevées par Gustave Fayet. En partie basse, la chambre dans laquelle devaient être placées les roues actionnant le mécanisme, est couverte d'une série de 9 arcs surbaissés soutenant la pièce dans laquelle devaient être placées les machines. Un avant-bec renforce l'angle nord-est du bâtiment tandis qu'un contrefort soutient l'angle opposé. La trace d'un solin sur l'élévation orientale indique qu'avant sa surélévation par Gustave Fayet, le moulin était sans doute couvert d'une toiture en appentis.
_________________________________________________________
Régulières sur la cour Louis XIV, les maçonneries de l'élévation côté ruisseau sont plus hétérogènes. Elles témoignent donc de plusieurs campagnes de travaux. L'angle nord-ouest de l'élévation percé d'une baie rectangulaire en partie basse est plus difficile à analyser. Elle correspond sans doute aux bouleversements opérés au moment de la reconstruction de l'aile des convers.
Vers l'ouest, les 4 fenêtres en anse de panier de l'étage correspondent à la dernière campagne de travaux, celle qui consista à aligner les bâtiments de la cour Louis XIV et à les surélever. Le changement d'appareil dans la partie supérieure du mur indique la transformation. La partie basse, construite dans un appareil plus large et régulier est antérieure. On y remarque deux arcades, aujourd'hui murées qui correspondent aux salles voûtées du rez-de-chaussée. Une chaîne d'angle signale la limite d'un premier bâtiment contre lequel est venu s'appuyer un second dont la maçonnerie, irrégulière en partie basse, porte une surélévation dont l'appareil régulier est percé de 5 baies. Dans cette partie, la maçonnerie témoigne de transformations antérieures à la surélévation. On y voit des jours, des traces d'empochement de poutres qui prouvent que cet élément fut largement modifié.
Plus loin, vers l'est, est placé l'ancien moulin de l'abbaye dont les maçonneries en pierre de taille sont visiblement médiévales ont été surélevées par Gustave Fayet.
Vers l'est, une chaîne d'angle
L'aile des convers, située au sud-ouest de l'ensemble, comportait le réfectoire en rez-de-chaussée et le dortoir à l'étage. Dans le réfectoire, Gustave Fayet a ajouté une cheminée (fin du 15e siècle-début du 16e siècle) provenant d'une demeure de Pézenas et une clôture en fer forgé (17e siècle), élément d'un château du Val de Loire. Au début du 17e siècle, l'étage, devenu l'hôtellerie, a reçu une suite de croisées, et la couverture primitive (charpente sur arcs-diaphragmes) a été remplacée par un berceau brisé. L'aile des convers communiquait avec la ruelle, passage étroit et obscur voûté d'un demi-berceau par lequel les frères pouvaient atteindre directement l'église et le cellier. On la retrouve dans quelques abbayes cisterciennes (Aiguebelle, Boquen, Longpont). Le cellier et la ruelle ont été construits à la fin du 12e siècle. Le berceau du cellier paraît avoir été refait au 17e siècle. Au 18e siècle ont été créées la cour d'entrée et la cour d'honneur fermée vers l'est par le bâtiment des convers. L'aile occidentale des bâtiments monastiques, avec l'ancien réfectoire des moines, a aussi subi d'importants remaniements.
Le corps de bâtiments à l'est, sur le jardin, est doté d'une façade qui n'est qu'un décor dissimulant une orangerie.
-
Murs
- calcaire
-
Toitscalcaire en couverture
-
Plansplan en croix latine
-
Étages3 vaisseaux
-
Couvrements
-
Couvertures
-
Statut de la propriétépropriété d'une société privée
-
Intérêt de l'œuvreà signaler
-
Protectionsinscrit MH, 1988/09/15
classé MH, 2001/02/21
-
Précisions sur la protection
Ancienne sacristie, passage et cage d'escalier situés de part et d'autre de la salle capitulaire ; quatre corps de bâtiments fermant la cour dite cour Louis XIV, y compris la partie qui enjambe le lit du torrent à l'est et le moulin au nord ; éléments décoratifs (immeubles par destination) du corps de bâtiment situé entre le cloître et la cour Louis XIV, à savoir : boiseries du salon vert, stucs et boiseries du grand salon avec les peintures de Burgstaal, vitraux composés de papiers aquarellés entre deux plaques de verre fermant les baies de la salle de musique (ancien dortoir des moines) , panneaux de céramiques historiées et décoratives du grand salon et de l'office, boiseries de la bibliothèque ; portail d'entrée de l'abbaye ; cour d'honneur et décor architectural qui la ferme ; sol de la grande roseraie ; parc et terrasses étagées avec leurs statues et fabriques ; vestiges du corps de bâtiment médiéval qui enjambait le torrent à l'est du cloître ; chapelle du père Jean ; mur de clôture ; puits au sud de l'abbaye ; deux tours cylindriques ouest et nord-est ; ferme avec les deux ponts médiévaux qui la relient à l'abbaye (cad. G 320, 331, 332, 334, 336 à 338, 340) : inscription par arrêté du 15 septembre 1988 - Ensemble des parties bâties situées à l'intérieur de l'enceinte de l'abbaye, y compris le porche d'entrée, l'aire du cloître, les murs d'enceinte et les terrasses étagées, à l'exception - en ce qui concerne le corps de bâtiment situé entre le cloître et la cour dite ""Louis XIV"" - des éléments décoratifs intérieurs suivants : les boiseries et les toiles peintes du salon vert, les stucs et boiseries du grand salon avec les peintures de Burgstahl, les vitraux de papier aquarellés entre deux plaques de verre fermant les baies de la salle de musique (ancien dortoir des moines) , les panneaux de céramiques historiées et décoratives du parloir et de l'office, les boiseries de la bibliothèque (cad. G 336 à 338) : classement par arrêté du 21 février 2001
-
Référence MH
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
- (c) Inventaire général Région Occitanie
Bibliographie
-
PEROUSE DE MONTCLOS, Jean-Marie (dir.). Le guide du patrimoine Languedoc-Roussillon. Paris : Hachette, 1996 (col. Guides du patrimoine), 623 p.
p. 244-247 -
Galinier (Jean-François), L'abbaye Notre-Dame de Fontfroide en Languedoc, étude sur le cloître et la salle capitulaire, mémoire de maîtrise d'histoire sous la direction de Marcel Durliat, 1975.
-
Gardey de Soos (Anne), Mémoire de maîtrise d'Histoire de l'Art "L'abbaye N.D. de Fontfroide", étude historique et archéologique du XVIe siècle à nos jours, 1984.
-
Faure (Hyppolite) Recherche historique sur l'Abbaye de Fontfroide, 1894
2002-2008 : chercheur associé à l'Inventaire général
depuis 2008 : cbercheur à l'Inventaire général d'Occitanie
2002-2008 : chercheur associé à l'Inventaire général
depuis 2008 : cbercheur à l'Inventaire général d'Occitanie