Molitg-les-Bains de la Préhistoire au 12e siècle
L’occupation du territoire de Molitg-les-Bains remonte à la période préhistorique, comme l’atteste la découverte de plusieurs dolmens au cours du 20e siècle. Certains d’entre eux sont situés en frontière de plusieurs localités, comme c’est le cas au site de Les Costes, situé en limite géographique entre les communes de Molitg-les-Bains, Catllar et Eus. Le site mis au jour dans les années 1970 par l’archéologue Jean Abélanet [LE FIL A SOI, N°32, décembre 2002, p.9], fait état de trois sépultures datées du Néolithique, caractéristiques du culte préhistorique dolménique, notamment pour deux tombes qui correspondent à la typologie du dolmen. Ces sépultures se trouvent en zone frontière mais restent rattachées à la commune de Catllar, comme l’atteste le dernier inventaire réalisé.
Environ six dolmens ont été mis au jour sur le territoire de Molitg-les-Bains, dont plusieurs d’entre eux sont géolocalisables. Il s’agit des dolmens de Sant Ponci, de la Pineda, du Pla de l’Arca, et du Coll del Tribe. Quatre dolmens ont fait l’objet d’une publication réalisée en 1832 par Joseph Jaubert de Réart. Ce dernier est en effet l’auteur de l’article intitulé « Monuments druidiques trouvés sur la montagne de Molitg, département des Pyrénées-Orientales », publié dans le n°34 de la revue Le Publicateur [ABÉLANET, 2011, p.278]. Parmi ces constructions mégalithiques, celui du Pla de l’Arca et du Coll del Tribe, se distinguent par leur bon état de conservation. Le dolmen du Pla de l’Arca, situé à 400 m environ au Nord-Est du cortal de Saint-Saturnin, comprend une dalle de couverture qui porte une trentaine de cupules hémisphériques et repose sur deux montants latéraux (Sud-Ouest : 2,08 m de long / Nord-Est : 1 m de long) ainsi que sur une dalle de chevet (1,65 m de long, épaisseur de 0,18 m). L’ensemble orienté au Sud-Est, constitue vraisemblablement une sépulture individuelle. Le tumulus encore conservé est de plan ovale et a probablement fait l’objet d’un épierrement postérieur [ABÉLANET, 2011, p.274]. Plus à l’Est, le dolmen du Coll del Tribe localisé en limite géographique avec le territoire d’Eus, présente une typologie similaire au précèdent, avec une entrée également orientée Sud-Est. Les fouilles archéologiques effectuées en 1967 ont permis de constater que la chambre funéraire avait été pillée et réemployée postérieurement en tant qu’abri pour les agriculteurs puis les chasseurs. Quelques tessons préhistoriques atypiques découverts et un petit fragment de silex ont été mis au jour, ainsi qu’une médaille de cuivre ou de laiton, avec la représentation de la Vierge à l’Enfant et d’un blason catalan à l’avers [ABÉLANET, 2011, p.278]. Jaubert de Réart fait également la mention en 1832 du dolmen dit de la Bressa (lieu-dit Les Clauses), dont l’emplacement exact reste encore à préciser. Il a par ailleurs probablement été détruit à cause d’un possible reboisement du lieu. C’est également le cas du dolmen de la Pineda, qui selon les dernières recherches effectuées dans les années 2000, aurait été édifié à proximité du cortal Pinède [ABÉLANET, 2011, p.273], situé au Nord-Ouest de Molitg. Enfin, le dolmen de la Portella, signalé et décrit par Isidore Rouffiandis en 1872, dans le volume XIX du Bulletin de la Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales, serait situé à 2 km au Nord-Ouest du village. Orienté au Sud, le dolmen est formé de « trois pierres longues et étroites plantées de champ » [ABÉLANET, 2011, p.270] et sa dalle de couverture a disparu. Le dernier monument mégalithique mis au jour est celui de Sant Ponci, localisé à l’Est du territoire près d’un cortal ruiné portant le même nom. Découvert en 1966 [ABÉLANET, 2011, p.268], il ne subsiste en place que la dalle de chevet ainsi que la dalle de support Ouest. Plusieurs cupules ainsi qu’une petite croix gravée sont conservées sur la dalle de couverture.
Le territoire de Molitg-les-Bains apparaît dans les sources historiques à partir du 9e siècle, notamment en 844 avec la dénomination « Valle Molegica ». Au 10e siècle, plusieurs noms sont employés, dont « Valle Mollegio » ou encore « Moligio ». L’origine toponymique du lieu proviendrait du latin « Molinum », qui désigne un moulin, très certainement construit en bordure de la rivière de la Castellane [BASSEDA, 1990, p.520]. De plus, les différentes terminologies employées peuvent se rapporter au nom latin « Mollis » accompagné du suffixe -idium, relatif à un lieu possédant un sol humide de type mouillère [BASSEDA, 1990, p.520]. En effet, le village est situé dans une zone creuse marquée par de l’humidité, malgré le caractère aride des environs. A cette époque, Molitg-les-Bains est une seigneurie puissante détenant des territoires étendus, dont les « vilars » (petits hameaux) de Campolime (commune de Campôme) et de Fornols [ALART, 1868, p.28]. De plus, le territoire d’Eus (alleu de Coma) situé à l’Est de celui de Molitg, apparaît comme une ancienne dépendance de la seigneurie [DE POUS, 1981, p.57]. Par ailleurs, le château de Paracolls, dont les ruines dominent l’ensemble thermal de Molitg-les-Bains, est mentionné pour la première fois en 948 sous la dénomination « castrum paracolis » [Alessandri, Bayrou, 2001, p.57]. Il apparaît également au 11e siècle parmi les possessions des comtes de Cerdagne, dont Guifred, fils d’Oliba et fondateur de l’abbaye de Saint-Martin-du-Canigou [ALART, 1868, p.30]. Cette donnée historique mentionnée dans les Notices Historiques de l’archiviste Bernard Alart est importante, étant donné que le territoire de Molitg se trouve dès l’an 1000 parmi les possessions du comte Guifred [DE POUS, 1981, p.60].
L’église du village est mentionnée pour la première fois en 1024 dans un acte de donation, indiquant la transmission de l’alleu de la « villa » de Molig par le prêtre Durand, à destination de l’abbaye de Saint-Martin-du-Canigou. Cet alleu comprenait alors un mas, qui possédait en tant que « quatrième limite (…) le chemin qui va à Sainte-Marie » [CAZES, Le Roussillon sacré, 1977, p.38]. La période de construction de l’église correspond vraisemblablement à celle de la chapelle Saint-Pierre de Paracolls, érigée au sein du castrum actuellement en ruine. En effet, malgré l’absence de données historiques antérieures au 13e siècle (1299), les relevés architecturaux effectués sur la chapelle en 1989 permettent d’identifier un style bien particulier, relatif au roman lombard tardif du 11e siècle [ALART, 1868, p.31]. Au même titre que le castrum de Paracolls, l’église paroissiale Sainte-Marie fut rattachée dès le 11e siècle parmi les possessions des comtes de Cerdagne, comme en témoigne les dispositions testamentaires de Guifred, rédigées en 1036 [CAZES, Le Roussillon sacré, 1977, p.38]. Ce dernier laisse ainsi une partie du domaine de Molitg ainsi que son église à son troisième fils, du nom de Bérenger [DE POUS, 1981, p.60]. Par ailleurs, l’édifice était dès cette époque inféodé aux seigneurs de So, momentanément privés en faveur d’un certain Bérenger. Il avait en effet été convenu que Bernard de So et ses successeurs tiendraient l’église de Molitg seulement après la mort de Bérenger [DE POUS, 1981, p.60].
En dehors de l’église paroissiale et du château de Paracolls, les anciennes sources thermales présentes non loin de la Castellane sont identifiées dès le 11e siècle. Le nom « Banneres » employé en 1024, renvoi au nom latin « Balnearia », qui désigne une baignoire [BASSEDA, 1990, p.521]. Par ailleurs, le correc (ravin) de les Banyeres identifié sur le cadastre napoléonien, constitue probablement un point d’approvisionnement supplémentaire aux sources existantes.
A la fin du siècle, la mainmise du territoire de Molitg par les comtes de Cerdagne est encore importante, comme en témoigne la transmission par testament du château de Paracolls, faite par Guillem-Ramon à son fils Guillem-Jorda en 1095 [BASSEDA, 1990, p.61]. Par ailleurs, les sources historiques identifient dès 1102 [BAYROU, 2004, p.323]. la famille de Paracolls en tant que vassale du comte de Cerdagne, qui conserve le château éponyme jusqu’en 1250.
Molitg-les-Bains du 13e siècle au 18e siècle
Au 13e siècle, la seigneurie de Molitg passe sous la domination du royaume de Majorque, avant d’être transmise à Pons de Caramany en 1312 [CCRP, Molitg-les-Bains, Église paroissiale Sainte-Marie. 2005]. C’est probablement à cette époque que sera édifié le château de Molitg, construit contre la façade Sud de l’ancienne église médiévale.
Les données démographiques concernant la seigneurie sont recensées dès le 14e siècle, à travers le « fogatge », qui est un impôt sur le revenu foncier réparti en fonction des différents feux (foyers d’habitation). Molig (ancienne graphie) compte ainsi 11 feux en 1378 et 1385 [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, 1973, pp. 18 et 23]. De plus, le lieu-dit des Bains connu depuis le 11e siècle et mentionné au 14e siècle sous la dénomination « Els Banys », semble comprendre un nombre de feux plus important qu’à Molitg. En effet, la localité compte 41 feux en 1358 et 40 feux en 1365 et 1370 [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, 1973, pp. 13 et 16]. A cette époque, la seigneurie de Paracolls est transmise à la famille de Tregura, dont Francesc de Tregurà, mentionné dans les textes en tant que « donzell » [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter. 2004, p.10].
Tout comme le territoire de Joch situé dans le Bas-Conflent, celui de Paracolls reste jusqu’au 16e siècle considéré comme étant une baronnie [ABELANET, FRENAY, PONSICH, et alii, 1983-1985, p. 967], tenue par des seigneurs locaux affranchis du pouvoir central exercé à Molitg. Jaspert de Tregurà prit le titre de seigneur de Paracolls en 1408 et sera succédé par son fils aîné, Père, lors de l’occupation des comtés de Rosselló et de Cerdanya par le roi de France Louis IX [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.10]. En 1487, Joana de Tregurà, porta le titre de baronne de Paracolls à la suite de son frère Joan de Tregurà, qui mourut sans descendance.
A la fin du siècle, le nombre de foyers diminue fortement, avec 3 feux entre 1470 et 1490 (Paracolls), contre 23 feux à Molitg [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 26 et 27]. Cette baisse démographique peut s’expliquer par un important mouvement de la population, amenée à se rapprocher de l’église paroissiale et de son château, afin de bénéficier de leur protection. De plus, c’est seulement au 15e siècle que le château est véritablement mentionné, avec l’apparition dans les textes du terme « castrum » en 1437 [CAZES, Les églises de la Vallée de Molig, 1969, p.16].
Au 16e siècle, la population de Molitg ne cesse de décroître (conséquence des épidémies ?) et apparaît dans les sources historiques au côté de la localité de Campôme. Cette dernière était en effet comprise parmi les possessions de la seigneurie de Molitg, jusqu’à la révolution française. Ainsi, Molitg compte à elle seule 9 feux en 1515 et 5 feux en 1553 avec Campôme [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 29 et 31]. Au cours de cette période, la baronnie de Paracolls est indivisée entre les deux plus proches parents de Joana de Tregurà, que sont Anna de Tregurà et Angel de Vilanova [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.10]. Les Vilanova exerceront leur pouvoir jusque dans les années 1630, période marquée par l’union de Dona Magdalena de Vilanova à un membre de la famille de Llupià. Celle-ci possédait au 17e siècle les seigneuries de Llupià et de Castellnou, auxquelles s’ajouta celle de Paracolls [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.14]. Aussi, toutes ces baronnies ainsi que les lieux de Molitg et de Coma (Eus), resteront dans les mains de la famille de Llupià jusqu’à la révolution française.
Le 17e siècle est marqué par plusieurs remaniements du bâti, notamment du château seigneurial ainsi que de l’église paroissiale Sainte-Marie. Le château fut en effet transformé à de nombreuses reprises au cours des périodes qui ont suivi sa construction, notamment au début du siècle par la volonté du marquis de Llupia, seigneur de Molitg [CAZES, Les églises de la Vallée de Molig, 1969, p.16]. En 1697, l’église paroissiale Sainte-Marie est désorientée, avec la disposition d’un nouveau chœur à l’Ouest terminé par un chevet plat et la construction d’une nouvelle entrée à l’Est [CAZES, Les églises de la Vallée de Molig, 1969, p.16]. En effet, l’édifice était à l’origine constitué d’une nef terminée à l’Est par une abside semi-circulaire. De plus, l’entrée s’effectuait au Sud, à partir d’un portail roman en plein cintre et en pierres de granit. Au 17e siècle, un nouveau portail est alors aménagé à l’Est, au sein d’un porche dissimulant l’abside primitive. En dehors du portail d’entrée dont la structuration rappelle les constructions du 12e siècle, l’église conserve dans les parties hautes du flanc septentrional les vestiges d’une corniche à modillons moulurés. Celle-ci a très certainement été intégrée dès l’époque médiévale. Au-dessus du porche, se trouve un clocher arcade à baie unique et sans cloche, positionné au centre d’une toiture à trois pans en lloses et à arêtiers en tuiles canal. Son accès s’effectue depuis l’extérieur à partir d’un escalier droit, qui mène à une porte percée au Sud du porche d’entrée. Par ailleurs, une seconde entrée cintrée en cayrous située en contrebas de l’escalier permet de rentrer à l’intérieur du porche. Les deux chapelles latérales en berceau brisé continu qui s’ouvrent sur la nef, ont été rajoutées lors des remaniements puis dans la première moitié du 18e siècle, comme l’atteste la présence de pierres datées (1697, 1701 et 1723) dans la maçonnerie extérieure (bras droit du transept et chapelle Nord).
Si les données démographiques concernant le 17e siècle ne sont pas connues, celles du 18e siècle sont nombreuses. La population est en hausse par rapport aux siècles précédents, avec 55 chefs de famille comptabilisés en 1730 [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, p. 40]. Le recensement des années suivantes intègre le territoire de Campôme, jusqu’en 1792, avec 64 feux en 1740, 807 habitants en 1787 et 697 habitants en 1791 [[BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 42, 48 et 49]. Sous la révolution française, plusieurs localités qui étaient jusqu’à présentes détenues par Molitg-les-Bains deviennent indépendantes. C’est le cas de Campôme, devenue commune à part entière, comme l’atteste les recensements de la fin du 18e siècle [CAZES, Molitg-Les-Bains, Campôme, 1993, pp.50 et 52]. Plusieurs localités sont ainsi rattachées à Campôme, dont le château de Paracolls et son hameau [BASSEDA, Revue Terra Nostra,Numéros 73 à 80, 1990, p.521]. Par ailleurs, le village de Coma sur le territoire d’Eus, prend également son indépendance [CAZES, Molitg-Les-Bains, Campôme, Prades, 1993, p.4].
La commune de Molitg-les-Bains voit sa population augmenter progressivement ; 503 habitants sont recensés entre 1792 et 1793, et plus de 511 entre 1798 et 1799 [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, pp. 51 et 53].
C’est au 18e siècle que les propriétés thérapeutiques des eaux de Molitg ont pu être analysées pour la première fois, notamment grâce à l’intervention du médecin perpignanais Thomas Carrere. Ce dernier entreprit la visite du site en 1754, au côté du chimiste Pierre Bayen et du médecin montpelliérain Gabriel François Venel [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.16]. Une construction modeste « d’environ 2,33 m² et 2 m d’élévation » renferme alors « un petit bassin creusé dans le roc », dont l’usage des eaux chaudes reste limité à la vallée de la Castellane [ANGLADA, Traité des eaux minérales et des établissements thermaux du département des Pyrénées-Orientales. [en ligne], 1833, Vol. 2, Tome 1, p.249]. Ces eaux proviennent de plusieurs sources sulfureuses, situées à proximité d’un torrent appelé au 18e siècle « Lo Torrent de Riell » [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.17]. Leur propriété thérapeutique a été analysée par le docteur Carrere, qui indique dans son « Traité des Eaux Minérales du Roussillon » écrit en 1756, que les eaux « font les mêmes impressions sur nos sens que celles de Cauterets et de Barèges, et que les Eaux Bonnes et Chaudes » [CARRERE, Traité des eaux minérales du Roussillon [en ligne], 1756, 133 pages]. Ainsi, la réputation des eaux sulfureuses de Molitg, essentiellement utilisées dans le cas de maladies de peau, sont désormais reconnues au-delà de la vallée.
Au 18e siècle, l’état de pauvreté dans lequel se trouve les habitants amène le curé de Molitg du nom de Tolra, à adresser une lettre à l’Intendant du Conflent le 22 juin 1767, afin de recevoir « une boîte de remèdes », envoyée en temps normal tous les ans pour les pauvres. En effet, malgré la proximité du village avec les sources minérales connues pour leur bienfait thérapeutique, les plus pauvres ne « peuvent se procurer les remèdes convenables pour leur guérison » [CAZES, 1993, p.26]. Après la construction du premier établissement thermal sur trois étages en 1785 par le Marquis de Llupià dit « Thermes Llupià » [Panneau signalétique patrimonial. Molitg-les-Bains, thermalisme dans un écrin de beauté. 2018], l’utilisation des bains et l’usage des eaux minérales de Molitg-les-Bains deviennent gratuits pour les habitants des lieux de Molitg et Campôme, les soldats au service du roi et les pauvres [CAZES, 1993, p.12]. Par ailleurs, les conditions sont mentionnées dans une ordonnance royale, datée de la même époque [Panneau signalétique patrimonial. Molitg-les-Bains, thermalisme dans un écrin de beauté. 2018]. Les personnes extérieures aux lieux cités ci-dessus, sont tenues de payer certaines sommes auprès du « fermier ou de M. le Marquis de Llupià, seigneur du dit lieu », comme l’indiquent les criées (règlements de police locale) de Paracolls, Campôme et Molitg publiées en 1789 [CAZES, 1993, p.12]. Ces personnes devront payer six sous pour chaque bain, douche et étuve, deux sous par jour « pour la boisson de l’eau à la source », ainsi que six deniers « pour chaque bouteille d’eau qui sera transportée ailleurs » [CAZES, 1993, p.12].
Molitg-les-Bains du 19e siècle à nos jours
Au cours du 19e siècle, une nouvelle analyse des eaux de Molitg est réalisée par Joseph Anglada, professeur à la faculté de Montpellier. Il évoque dans son « Traité des eaux minérales et des établissements thermaux du département des Pyrénées-Orientales » écrit en 1833, la présence de quatre sources, dont la principale « surgit du rocher dans l’intérieur même de l’établissement » [[ANGLADA, Traité des eaux minérales et des établissements thermaux du département des Pyrénées-Orientales. [en ligne], 1833, Vol. 2, Tome 1, pp.254-305]. Celle-ci est en effet la plus importante, en raison de « la richesse de ses matériaux médicamenteux ». D’autres sources sont indiquées, notamment celles de l’établissement thermal Mamet, établi par la famille de même nom en 1819, à proximité des Bains des Llupià [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.29]. Le site comprenait alors « une fontaine, sept cabinets à bains (…) contenant huit baignoires en marbre blanc d’Italie » [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.29]. Cette construction entraina de vives contestations du Marquis de Llupià, résigné par la présence d’un second établissement thermal. À la suite du décès en 1824 de Jean Calt, propriétaire des thermes Mamet, une vente par licitation est exercée au cours de l’année suivante. La famille de Llupià pu ainsi racheter les thermes Mamet, au prix de 6045 francs [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.31].
Plusieurs travaux de modernisation ont été apportés aux thermes de Molitg, à la suite du rachat du site par la famille de Massia en 1836 [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.51], dont la réalisation d’une nouvelle extension du bâti existant. En effet, le nombre croissant de baigneurs et l’exiguïté des constructions présentes, nécessite de repenser le site thermal. L’établissement Mamet est détruit, pour être remplacé par un nouveau bâtiment, appelé « Etablissement de Massia » [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.53]. Ce dernier comprenait quatre niveaux, avec au rez-de-chaussée les Thermes composés de « douze cabinets avec baignoires en marbre, un cabinet à douches ascendantes et descendantes, une buvette, une salle de réunion (et) le réservoir des eaux » [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.53]. Les deux niveaux supérieurs étaient occupés par des appartements (28 lits), qui donnaient au Sud sur le site de Paracolls et au Nord sur une place ainsi que les Thermes Llupià. Enfin, le troisième étage comprenait des chambres de taille plus réduite, ainsi que deux cuisines. Malgré les bienfaits des soins prodigués sur les curistes, le manque de confort et de distractions se révèle très vite présent. Joseph de Massia entrepris alors d’améliorer les Thermes Llupià, à partir de 1842 [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.59]. Le nombre de cabinets de bain jusqu’ici limité, est porté à 20, grâce à l’augmentation du volume des sources. Les travaux de modernisation ont également concerné la réfection de l’ancien chemin de Prades à Mosset, dont l’aménagement d’une route carrossable jusqu’à Molitg fut décidé en 1829. En 1843, une portion de route est aménagée par un entrepreneur des travaux du nom d’Antoine Costes, afin d’accéder à la plate-forme de l’établissement thermal. Retardés en raison de problèmes administratifs et financiers, les travaux de la route carrossable sont finalement achevés en 1852 [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.69]. Les baigneurs peuvent ainsi se rendre au Thermes en diligence, comme l’atteste les cartes postales produites au début du 20e siècle.
Le hameau des Thermes se dote au 19e siècle d’une chapelle, construite à proximité de l’établissement thermal le long de la route des Bains. Selon l’abbé Cazes, un premier édifice de petite taille semble avoir été construit au milieu du siècle, sur la rive droite de la Castellane. Il s’agirait d’une chapelle dédiée à Notre-Dame de Bon Secours [CAZES, Molitg-Les-Bains, Campôme, 1993, p.14]. Actuellement disparu, l’édifice est ainsi remplacé en 1854 par la chapelle dite des Thermes, située au hameau portant le même nom [CCRP, Molitg-les-Bains, Chapelle des Thermes, 2005]. La construction de cet édifice a nécessité de réaliser un emprunt de 1800 francs, qui fut en parti couvert par des loteries organisées par le clergé [Office de tourisme de Molitg-les-Bains, Patrimoine, Chapelle des bains [en ligne], mise à jour en 2020], des dons de particuliers et de curistes. Ces derniers trouvaient en effet le chemin des bains trop escarpé et long pour se rendre à l’église paroissiale du village. L’implication des curistes marque alors le nom de la chapelle, connue aussi sous l’appellation « chapelle des baigneurs ». L’architecture néogothique de la chapelle a également été adoptée en 1895 pour la construction du château de Riell, qui domine le hameau ainsi que les thermes. Cet édifice a la particularité d’avoir été édifié à l’emplacement d’un ancien château médiéval (13e siècle ?), comme l’atteste les vestiges de souterrains en sous-sol. La construction du château fut entreprise à la fin du 19e siècle par le docteur Edouard de Massia (1824-1892), fils de François de Massia (1796-1878) et Maire de Molitg de 1865 à 1881, qui hérita des établissements thermaux en 1859 [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.84]. Edouard de Massia apporta de nombreuses améliorations des différents établissements thermaux, dont la réparation de baignoires, le pavage des cabinets et des galeries des thermes Llupià [A.D.P.O. : 3 E 55/184]. De plus, il fit construire une piscine et réaliser une promenade longue de 200 mètres.
Dans la première moitié du 19e siècle, la population de Molitg-les-Bains ne cesse de s’accroitre. En effet, la commune compte 543 habitants en 1806, 567 en 1836 et 620 en 1846 [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, p. 67]. Elle diminue progressivement par la suite, avec 658 habitants en 1861, 506 en 1872 et 418 en 1891. A cette époque, le besoin de modernisation se traduit dans la nécessité de construire de nouveaux bâtiments publics, dont une maison d’école, afin d’assurer l’enseignement scolaire. Les documents concernant la construction de l’édifice conservés aux Archives Départementales des Pyrénées-Orientales, mentionnent l’existence de plusieurs projets de maison d’école, notamment dans les années 1860. En effet, un bail à ferme daté du 15 Avril 1862 établi entre le maire de Molitg, monsieur Jean Carol et monsieur Roussié Jacques, prévoit de céder à titre de bail à loyer pour un an, une partie d’une maison située à Molitg. Celle-ci serait ainsi composée d’une « grande salle servant pour la classe, (…) de deux chambres, d’une pièce pour servir de bûcher, d’une cuisine (…) ainsi que d’une cour pour la récréation des élèves » [A.D.66 : 2Op 2084]. Le bail a semble-il été établi pour la somme de « soixante-dix francs, que le Maire de Molitg « s’oblige à payer par trimestre jusqu’à l’expiration du bail ». En échange, les réparations qui seront établies dans le courant de l’année devront être à la charge de Monsieur Roussié. Le projet n’a certainement pas abouti, puisqu’en 1876, deux propriétés écartées du centre de Molitg sont achetées par la municipalité (mandat d’Edouard de Massia) pour la somme de deux mille francs, afin d’acquérir un local pour l’aménagement d’une maison d’école [A.D.66 : 2Op 2084]. L’absence de plans concernant ces projets ne permet pas de connaître l’implantation exacte de cette maison d’école, probablement non réalisée. Ce n’est qu’à partir de 1900 que la volonté de construire un groupe scolaire est à nouveau actée, comme l’indique un acte de vente daté du 21 octobre, concernant une parcelle « de terre champ », située au lieu-dit « Près le Chemin des Bains », dit Camp de la Route [A.D.66 : 2Op 2084]. Il s’agit d’une parcelle appartenant à Coupet Joseph et à son fils Coupet Jean, tous deux habitants de Molitg. Cette vente fut fixée pour la somme de douze cents francs, avec un financement de la construction possible grâce à un emprunt effectué auprès de la Caisse Nationale des retraités pour la vieillesse. Malgré l’absence de plans permettant de juger la distribution intérieure des espaces, l’acte de vente mentionne la construction d’un groupe scolaire, intégrant également les locaux de la mairie. Pour les besoins en eau du groupe scolaire, une canalisation a ainsi été prévue par le Conseil Municipal, à partir de « la nouvelle fontaine » située à proximité de l’emplacement adopté pour la construction de l’école. Il s’agit vraisemblablement de la fontaine localisée en bordure de la Rambla Pau Casals, construite vers 1897.Actuellement, les locaux de l’école-mairie abritent une boulangerie artisanale ainsi que le restaurant « L’Estaca ».
La baisse démographique à Molitg amorcée à la fin du 19e siècle, n’a pas cessé de progresser tout au long du 20e siècle. En effet, l’exode rural et montagnard a entrainé d’importants déplacements de populations vers les plaines, délaissant ainsi les campagnes reculées. Au début du siècle, le nombre d’habitant est stabilisé autour de 300 personnes (372 en 1901, 349 en 1911 et 338 en 1921), pour diminuer progressivement, jusqu’à atteindre seulement 198 habitants en 1954 [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, p. 67]. Dans les années 1960, une légère augmentation de la démographie est observée, notamment en 1968 avec 229 habitants recensés. A cette époque, l’économie locale est favorisée par de nouveaux modes de production agricole, liée à la plantation d’arbre fruitiers, tels que les pêchers et les pommiers. Ces derniers ont progressivement remplacé la vigne, principalement cultivée au 19e siècle pour l’autoconsommation personne et la vente à l’extérieur [Panneau signalétique patrimonial. Molitg-les-Bains, thermalisme dans un écrin de beauté. 2018]. Par ailleurs, quelques façades des maisons traditionnelles de Molitg conservent une treille, pour la production du raisin de table. Le 20e siècle est également marqué par la construction des bains-douches, entre les rues del Sastre et Nou.
Edifié dans les années 1940 [témoignage des habitants de Molitg], l’établissement communal permettait aux habitants de bénéficier d’un accès aux douches et baignoires. En effet, malgré l’adduction progressif en eau potable dans la première moitié du siècle, les douches n’étaient pas présentes dans les maisons d’habitations. L’accès n’était toutefois pas gratuit et chaque habitant pouvait en bénéficier qu’une fois par semaine. Fermés dans les années 1966, les bains-douches sont actuellement partagés en deux espaces, qui accueillent le comité des fêtes et une association locale de sardane. Les principes hygiénistes prônées tout au long du siècle se retrouvent également au sein de l’établissement thermal, restructuré au cours du 20e siècle. L’ensemble qui comprenait cinq corps de bâtiments ainsi que cinquante baignoires, est vendu le 28 octobre 1913 à Marcel Ecoiffier [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.127]. Celui-ci bénéficia également des bosquets, de la « montagne de Paracolls avec ses ruines », ainsi que du canal d’amenée à l’usine électrique ». Aujourd’hui disparue, l’usine électrique qui permettait de fournir en électricité les établissements thermales, a été construite en 1908 par François Ecoiffier, dans le lit de la Castellane [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.116]. Malgré la mainmise du site thermal de Molitg par Marcel Ecoiffier, la famille de Massia s’associa avec le nouveau propriétaire en 1927, à travers la S.A.R.L. « Etablissement Thermal de Molitg-les-Bains » nouvellement créée. Un an plus tard, François Auter, propriétaire d’un hôtel-restaurant situé entre la Route de Molitg et l’établissement thermal, s’associe à la S.A.R.L., augmentant ainsi son capital de 100 000 francs [[ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.130].A la fin de la seconde guerre mondiale, la gérance de la société est confiée à un certain Adrien Barthélemy [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.115], qui prit alors la tête de l’établissement thermal de Molitg. Le nouvel actionnaire est également connu pour avoir fondé la Chaîne Thermale du Soleil, considérée comme étant la première chaîne française d’établissements thermaux. Adrien Barthélémy entrepris une rénovation complète du site, notamment avec la construction du Grand Hôtel en granit et marbre rose de Villefranche-de-Conflent, à partir des plans de l’architecte régionaliste Edouard-Mas-Chancel [ROSENSTEIN, Revue Terra Nostra, Numéro 97 ter, 2004, p.134]. De plus, un lac artificiel est construit au niveau du parc, ce qui confère au site le caractère pittoresque qu’il est encore possible d’apprécier. Actuellement, la famille détient toujours l’établissement thermal de Molitg-les-Bains, ainsi que le site de Paracolls et le château de Riell.
Selon le recensement de la population en vigueur à compter du 1er janvier 2020, la commune de Molitg-les-Bains fait état de 237 habitants [Insee, décembre 2019, p.5]. La démographie a légèrement augmenté depuis les années 1990 (185 habitants en 1990, 207 habitants en 1999), notamment en 2017, où le nombre d’habitations est estimé à 233 [Insee, Synthèse-Comparateur de territoires, Statistiques locales]. De plus, la démographie s’est stabilisée dans les années 2000, avec 217 personnes recensées en 2007, 212 en 2012 et 233 en 2017 [Insee, Statistiques locales].La population est essentiellement vieillissante, comme l’atteste les données INSEE produites en 2017. En effet, les 60 à 74 ans sont les plus représentés, avec 25,2%, suivi des 45 à 59 ans (19,7%), des 75 ans ou plus (15%), des 15 à 29 ans (14,1%), des 30 à 44 ans (13,2%) et enfin des 0 à 14 ans (12,8%) [Insee, Portrait démographie et conditions de vie, 2017]. Enfin, la part des ménages étudiée en 2017 selon la catégorie socioprofessionnelle des habitants, est majoritairement constituée de retraités, comptabilisés au nombre de 82, suivis des agriculteurs exploitants (15) et des professions intermédiaires [Insee, Portrait démographie et conditions de vie, 2017].