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  • (c) Inventaire général Région Occitanie
  • (c) Conseil départemental des Pyrénées-Orientales

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Thuir
  • Commune Thuir
  • Emplacement dans l'édifice dans le camaril du maître-autel
  • Dénominations
    morceau de tissu
  • Appellations
    Lampas ou samit aux aigles bicéphales" de Nostra-Senyora-de-la-Victoria

Ces fragments de tissu proviennent d'une ancienne chasuble qui pourrait être, selon les historiens de l'art, ceux d'une robe de la Vierge, c'est à dire d'une sorte de manteau ou chape de fête enveloppant la statue de plomb Notre-Dame de la Victoire.

Ils ont été restaurés en 1955 par Me Parquet pour être assemblés sur un fond de soie rouge placé sous verre. Il s'agit dans ce cas précis, d'un samit façonné hispano-mauresques à décors sassanides zoomorphes. Pendant longtemps ces restes très déchirés et fragmentaires furent exposés conservés dans deux cadres vitrés entreposés dans le camaril de la Vierge à Thuir.

L'étoffe était, associée au culte d'une Vierge en plomb, vénérée sous le nom de Nostra Senyora de la Victoria (Notre-Dame de la Victoire), parce qu'elle aurait d'après la légende accompagné l'armée de Charlemagne dans sa reconquête du Roussillon et lui aurait accordé la victoire contre les Sarrazins à Monastir del Camp, à quelques kilomètres de Thuir.

Dès le Moyen-Age, le sanctuaire dédié à la Vierge reçoit de nombreuses offrandes, dont le tissu dit aux aigles bicéphales qui constituait l'étoffe extérieure d'une chasuble considérée comme une relique possédant des pouvoirs mystérieux.

Cette étoffe était réputée pour faciliter les accouchements et on distribuait des fragments aux femmes en couche afin de hâter leur délivrance. Elle fut exposée jusqu'à la fin du 16e siècle à la vénération des fidèles une fois par an, à Noël durant la messe de minuit. L'évêque Onuphre de Réart (1599-1622) en interdit l'usage afin de la protéger. Le vêtement fut alors placé dans un reliquaire installé à côté de la statue de la Vierge, on continua à apporter le reliquaire aux femmes en train d'accoucher et aux malades.

J.A. Brutails a vu le vêtement en 1893, il l'identifie comme une chasuble : [...] très échancrée sur les côtés ; le devant plus court que la partie postérieure, se termine en pointe ; l'ouverture qui sert à placer la tête est, de même, taillée en pointe par devant et munie par derrière d'un capuchon qui a été cousu après coup. la soie a presque disparu : c'est un tissu rouge sombre, à dessins noirs et jaunes, qui pourrait être à d'origine orientale ; il ne reste guère que les doublures, elles-même en fort mauvais état, à cause de l'habitude où l'on était jadis de distribuer des fragments de cette chasuble aux femmes en couche..."

Par la suite, en 1955, au cours d'une restauration ordonnée par le Service des Monuments Historiques, les fragments de l'étoffe de soie, séparés de la doublure, furent divisés en deux groupes : le morceau le plus petit d'un seul tenant a conservé l'arrondi du tissu ; l'autre est un assemblage des parcelles restantes. Un fragment composé d'un aigle entier en bon état a été vendu en 1906, au Musée des Tissus de Lyon par M. Chamouton pour la somme de 800 frcs (il s'y trouve toujours conservé).

  • Période(s)
    • Principale : limite 12e siècle 13e siècle

Trois fragments de tissu de soie de couleur rouge, avec des dessins noirs et jaunes. brodés de plusieurs couleurs. Les analyses du Laboratoire de recherche des Monuments historiques donnent de précieuses indications sur la nature des fils et de leurs composants et contribuent ainsi à l'établissement du dossier scientifique.

Les filés métalliques, dorés à l'origine et qui ont maintenant un aspect grisâtre, correspondent à de la baudruche. Cette technique, originaire du bassin méditerranéen (Chypre et Byzance), fut importée en Europe dès le XIe siècle et s'est particulièrement développée au 13e siècle. Egalement issue d'un souci de rentabilité, elle permettait de réaliser des fils d'or et d'argent avec peu de métal : une très fine couche est posée sur une lamelle de muqueuse viscérale (intestin, vessie...) de mouton ou de boeuf ; elle est ainsi directement collée par et sur le substrat humide. L'inconvénient, très vite vérifié et qui a valu l'abandon de la méthode dès le XVe siècle, était son manque de solidité entraînant la disparition du revêtement métallique. Nous pouvons constater ce phénomène sur le tissu de la dalmatique où seules quelques traces de métal subsistent dans les clos du tissage. Le manque de matière analysable n'a pas permis de déterminer s'il agissait d'un alliage or-argent ou de la superposition d'une feuille d'or sur une couche d'argent.

Les colorants utilisés pour teindre les trames de soie ont été analysés par chromatographie en phase liquide à haute performance ; il s'agit de Kermès (violet), de gaude (jaune), de gaude et indigo (vert) et de bois du Brésil (beige).

On a attribué à certains colorants un rôle thérapeutique et prophylactique. Tel est le cas du kermès qui, d'après un médecin arabe chrétien du IXe siècle, Yahya Ibn Masawaih, avait la réputation de soigner les maladies du sang. Son pouvoir s'étendait à la soie teinte et pouvait être utilisé par les femmes enceintes sous forme de ceinture de soie pour protéger le foetus. Les fragments d'une chasuble conservée à Thuir (Pyrénées-Orientales), décorée d'aigles se détachant en jaune et noir sur un fond rouge (kermès) et qui était censée faciliter les accouchements, illustrent cette croyance.

  • Catégories
    tissu
  • Matériaux
    • soie, rouge, bleu lampas
    • lin, bleu
    • fil métal, doré, broché
  • Mesures
    • h : 19,4 cm (Panneau 3)
    • la : 29,7 cm (Panneau 3)
    • h : 64,8 cm (Panneau 2)
    • la : 105 cm (Panneau 2)
    • h : 85 cm (Panneau 1)
    • la : 112 cm (Panneau 1)
  • Iconographies
    • perroquet, adossé, en médaillon
    • palmette
    • aigle
    • cheval
    • paon
    • bouquetin
  • Précision représentations

    Thèmes zoomorphes (oiseaux à deux têtes, chevaux, queue de paon) disposés symétriquement.

    Le décor se répète sur trois lignes, celle du haut est tronquée en partie supérieure. Sur le fond rouge vif du tissu se détachent des rangées d'aigles bicéphales, à queue de paon, aux ailes déployées saisissant par le cou un bouquetin dans chaque serre. Ils sont séparés les uns des autres par de grandes hampes ou hom (arbres de vie) portant à leur sommet la terminaison caractéristique des couronnes sassanides.

    La comparaison des motifs avec des exemples de type de tissu mieux conservés laissent supposer la présence de palmettes, bordées de rubans perlés, pointant dans les quatre angles de l'espace séparant les cercles. Motif commun à tous les textiles de ce groupe. Entre ces palmettes, des motifs végétaux stylisés de moindre hauteur, s'adaptant à la courbure des médaillons. Le tout rayonnant autour d'une étoile bordée d'un ruban perlé, ou bien encadré dans un petit médaillon circulaire perlé, ou encore, d'une rosace inscrite dans une étoile-motifs, eux aussi , communs à tous ces lampas.

    Le corps des aigles bordé à l'encolure et sur les côtés d'un ruban perlé, est décoré d'une mosaïque d'octogones tracés par la trame rouge et enfermant des carrés jaunes ornés de 4 pois bleu-noir, jaunes et rouges. Les cous séparés des têtes par des rubans perlés sont couverts de chevrons en escalier, bleus, noirs, jaunes et rouges.

    Le haut des ailes est décoré d'haxagones imbriqués dans ces trois mêmes couleurs et séparés des pennes verticales par un ruban de perles rouges et jaunes sur fond bleu-noir. La queue est ornée de croissants et de chevrons. le corps des bouquetins est bleu-noir serti de jaune.

    La thématique de l'aigle emportant des proies très présente dans l'Espagne Maure et l'emploi du Kermès pur en très grosses quantités sont des indices en faveur d'un centre de fabrication espagnol, probablement l'Andalousie se distinguant depuis l'Antiquité et le Haut Moyen-Age comme l'un des principaux centre de récolte de l'insectes rare coccidé source de la fameuse couleur rouge.

  • Inscriptions & marques
    • inscription, brodé, sur l'oeuvre
  • Précision inscriptions

    inscriptions brodées en coufique. Ces inscriptions traduites par Madame Georgette Cornu qui les a analysées répètent le Mot Al-Rahim " le Miséricordieux" reproduit chaque fois en miroir.

  • État de conservation
    • oeuvre restaurée
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Protections
    classé au titre objet, 1955/05/25
  • Référence MH
  • Carbonell-Lamothe, Yvette, "Trésors tissés, trésors peints". centre d'Art Sacré. Hospice d'Ille sur Têt (Pyrénées-Orientales) , juin 1989-Pâques 1990,

    p.15-17.

Bibliographie

  • CARDON, Dominique. [Carcassonne, Musée des Beaux-Arts, 1993], Fils renoués, trésors textiles du Moyen Age en Languedoc-Roussillon. Carcassonne, 1993.

    p.109 à 123
Date(s) d'enquête : 1973; Date(s) de rédaction : 1975, 2014, 2023
Édifice
Eglise paroissiale Notre-Dame-de-la-Victoire

Eglise paroissiale Notre-Dame-de-la-Victoire

Commune : Thuir
Adresse : place de la Cellera