Retable architecturé à niche centrale et bas-relief, en pendant avec celui de saint Joseph (4e chapelle nord).
Technique : bois sculpté, doré, polychrome. Partie en ronde bosse, partie en bas relief avec volumes fixés en applique.
Adossées à des pilastres cannelés, corinthiens, engagés quant à eux dans le noyau, supportant l'entablement, reposant sur leurs piédestaux au moyen d'un dé profilé en piédouche - de loin postérieur au reste du retable - deux colonnes torses accostent le monument. Depuis les bagues de leur naissance et jusqu'au tiers environ de leur hauteur une grasse végétation d'acanthe gaine leur fût et se mouvemente selon le strobile ; un mascaron féininin couronné de fleurs, colorié au naturel, accosté de deux coquilles de Saint Jacques et relié à elles par un motif de guirlandes, conclut l'ornement que limite en haut une bague. Au-delà, et jusqu'au chapiteau, corinthien, alternent deux guirlandes : l'une, chargée de fleurs et de fruits, coloriée au naturel, volute suivant les ventres de la torsade ; l'autre, dorée de chêne et de laurier, volute quant à elle suivant les gorges de la torsade. A l'exception des éléments dont la chromie a été notée, l'ensemble des colonnes est doré. L'entablement ressaute à l'aplomb de ces colonnes comme aussi dans l'axe du retable - à l'exception du larmier de la corniche que n'affecte par ce ressaut. L'architrave est composée de deux plates bandes accompagnées de filets. La frise est agrémentée de rinceaux d'acanthe répartis symétriquement autour d'un axe, et, sur les ressauts, de têtes d'angelots.
La corniche : le larmier en est porté par un rang de denticules, un rang d'oves, une série, enfin, de modillons.
Cet entablement constitue comme le segment inférieur du fronton curviligne qui couronne le retable ; ce fronton reprend exactement la modénature de l'entablement. Une couronne florale accostée de bouquets, le tout taillé à part et fixé ensuite, agrémente le tympan de ce fronton. Deux enroulements affrontés, enguirlandés, et sur le groupe desquels est fichée une croix ornée au croisement d'une gloire rayonnante, croix aux extrémités en trident, décorent l'ensemble en amortissement. Entablement et fronton sont peints en gris-bleu, rechampis à l'or quant aux ornements ; les têtes d'angelots de la frise sont colorées au naturel.
Ce cadre architectural sertit un vaste panneau occupé au centre par une niche avec statue et ornée de bas reliefs : l'ensemble de ce décor semble provenir d'un rétable du XVTIIè siècle démembré, décor adapté, non sans goût, au retable de Notre Dame. Le cintre de cette niche est' légèrement surbaissé ; le cul de four en est orné d'un petit bénitier doré ; les écoinçons sont chargés d'un couple d'angelots nus taillés en ronde bosse puis rapportés sur le noyau où ils sont fixés : ils brandissent, dans l'axe de la niche, une couronne florale. Là, sur un socle carré aux pans coupés, reposant lui-même sur un culot orné de crosses et d'enroulements disposés en contrapposto, et de guirlandes, est posée la statue de bois, en ronde bosse de la Vierge à l'Enfant : ce groupe, qui ne manque pas de mièvrerie, d'une facture infiniment moins sévère que les statues du retable majeur, et de date assurément plus basse, est colorié au naturel à l'exception des draperies qui sont dorées. L'attitude du groupe est pivotante et animée ; la facture, comme on voit sur les drapés, en est molle et lâche. L'Enfant et la Vierge sont coiffés de couronnes impériales en métal argenté ornées de pierres brillantes, visiblement rapportées. C'est en encadrement de cette niche que sont fixés des panneaux historiés de bois, en léger relief.
L'Annonciation est figurée d'abord (en haut à gauche) selon un schéma on ne peut plus conventionnel, comme aussi la Nativité qui fait pendant à la précédente composition. Au dessous de cette dernière c'est une anecdotique halte -pendant la fuite en Egypte ; enfin, en pendant, a été figuré un repas de la Sainte Famille, thème idyllique cher aux artistes du XVIIè siècle (Cf. J. Callot) mais représenté ici, curieusement, pendant la récitation d'un benedicite. Au second plan, les Tables de la Loi sont placées sur le chambranle de la porte, détail qui marque bien l'esprit anecdotique du sculpteur. La naïveté de ce dernier ne laisse pas non plus d'apparaître, au vu des faiblesses plastiques, des mollesses du volume des anatomies.
La profondeur de ces volumes n'excède pas les quatre centimètres, mais i'espace auquel ne renonce par pour autant le sculpteur, est obtenu par la mise en place de quelques lignes de fuite : ainsi dans l'Annonciation, la corniche d'un édifice est-elle figurée en perspective scénographique, accélérée, artifice appelé par la faible profondeur du plan de base - si l'on peut appeler plans de base les plans les plus profonds, puisque le sculpteur les rejoint à son gré, bosselant la surface sur laquelle se détachent les figures, selon ses besoins et sans méthode. Dans le benedicite, une cheminée est représentée selon le même artifice perspectif ; dans cette dernière scène, aucune ligne de fuite n'est figurée sur le dallage de la pièce qui puisse accroître l'impression de profondeur que le sculpteur obtient par le seul jeu des matières, plaçant en contraste les drapés des figures, de la nappe, de la table, et le panneautage rectiligne des meubles, les tuyautés mous des drapés et les méplats du mobilier.
La dorure assure l'unité de l'ensemble : seules les carnations et les chevelures des personnages sont coloriées comme au naturel, comme aussi les robes des animaux pour le traitement desquelles le peintre s'est servi d'une terre et d'un gris. Ca et là une touche (un vert par exemple pour la tige des lys de l'ange de l'Annonciation) de couleur. L'opacité de ces coloriages et une certaine lourdeur donnent à penser qu'ils ne sont pas originaux. Il faut noter le nuancé dans le traitement des ors : tandis que l'or des draperies des personnages a été posé sur un lit préparé en rouges ucello ou orangé de mars, l'environnement a été préparé en ocres : de là un effet de matières qui participe à distinguer les plans. Chaque panneau est encadré par une étroite moulure ; les marges demeurées vacantes entre eux, sont dorées : incisé de façon à former des rinceaux, l'or est tantôt lustré tantôt mat : cet ornement fait un effet de "ramages". On peut lire les indices de ce réemploi aux encoches ménagées dans les planches de "fond" du panneau pour permettre leur adaptation à la modénature du cadre architectural : ces encoches sont grossièrement sciées et leur.jointement est trop sommaire pour être original. De plus, les panneaux qui sont adaptés à ce fond, au lieu d'être vissés par derrière, sont vissés par devant. Enfin les panneaux ne paraissent pas dans leurs dimensions originales ; il semble que la "fuite en Egypte" ait été primitivement d'un format plus oblong : retaillé, le panneau a été mutilé à gauche et la mise en page, gauchie ; de même pour le "repas de la Sainte Famille" : la proportion des figures ne répond pas à celles des figures de la "fuite en Egypte" qui lui fait pendant ; en outre, le groupe semble flotter entre deux marges nues trop vastes : une dénivellation du plan de base, visible sur la marge de gauche, donne à penser que cette scène était primitivement sertie dans un cadre plus petit, presque carré.
Les analogies qui existent entre ce retable et le retable de Saint Joseph, sous le rapport du cadre architectural, pourraient suggérer son attribution à Subreuille. Par ailleurs, les formules qui ont inspiré la composition du panneau de ce retable sont évidemment les mêmes que celles qui ont présidés à la composition du retable majeur : niche avec bénitier au cul de four, couple d'anges aux écoinçons ; cependant ni ces angelots, ni la statue qui occupe la niche, ni même la forme de cette dernière n'ont cette sévérité ni cet esprit "classiques" du retable majeur mais une mièvrerie d'un goût- plus tardif. Il convient de voir dans cette composition un chainon évolutif de celle du grand retable. Evidemment exécutées en écho au retable majeur, ces pièces peuvent être celles du retable d'Aliaga donné par ce dernier pour être placé dans l'ancienne chapelle de Saint Vincent Ferrier, dans le choeur.
L'esprit d'unité qui a partout inspiré les différents travaux de Saint Mathieu a permis aux éléments de réemploi de s'adapter sans heurts et même avec une certaine harmonie à ce retable pour lequel ils n'étaient pas destinés.
Autel : Le podium sur lequel repose l'autel, (réemploi sans doute d'un pavement plus vaste), figure, en marqueterie de marbre, une demi rosace de pierres jaunes, vertes, blanches, accostée par deux carrés portant un ornement en damiers, vert et jaune. L'ensemble des motifs est encadré de marbre rose veiné. L'autel, qui ne s'accorde ni au pavement ni à ce qui paraît original dans le retable de Notre Dame, semble avoir été placé là après eux. Le tombeau d'autel repose sur une base profilée en doucine sur plate bande ; la corniche qui le couronne est profilée d'un scotie sumonté d'une baguette : base et corniche sont du même marbre blanc veiné ainsi que le tombeau lui même et les consoles qui le cantonnent et entraînent le mouvement galbé du tombeau. Sur sa face, le tombeau porte un disque de marbre rose, serti, et deux panneaux de même matière qui accostent ce disque ou médaillon. Les cannelures des consoles sont plaquées de marbre rose. La table porte deux gradins, d'apparence très récente, en marbre blanc. Le tabernacle en marbre blanc, présente une façade légèrement convexe où s'ouvre, sous une guirlande figurée en bas relief, une porte en plein cintre ; cette dernière est accostée de deux consoles agrémentées d'acanthe qui porte un entablement (série de filets) ressautant à leur aplomb. La porte du tabernacle - bois sculpté en léger relief et doré - figure une croix en Tau où s'enroule un serpent (serpent d'airain).