L’intérêt pour les puits à glace également appelés « glacières », remonte à la seconde moitié du 20e siècle, avec la redécouverte par les archéologues locaux de ce type de construction. Plusieurs études scientifiques ont donc été réalisées parallèlement, dont celles d’Anny de Pous entre 1969 et 1970 [DE POUS. Revue Conflent. Numéro 51. 1969-1970, p.p. 123-127].
L’archéologue autodidacte indique alors les premières listes de glacières, sans pour autant les distinguer des puits à neige. C’est dans le cadre d’un D.E.A. d’Etudes catalanes, que l’historien, chercheur et archiviste Denis Fontaine et le Maître de conférences à l'Université de Perpignan Michel Martzluff, ont effectué des recherches archivistiques afin de constituer un inventaire des glacières [FONTAINE, MARTZLUFF, 1999]. Grâce aux travaux effectués par ces derniers, il est possible de connaître la première mention du puits à glace de Prades, connu dans les sources archivistiques dès 1689 (Tableau n°3 : classement par zones géographiques). De plus, il subsiste en façade principale (Sud-Ouest) un bloc de pierre en marbre rose, portant la date « 1690 » gravée, soit un an après sa première mention (durée de la construction ?). Les chiffres sont séparés au centre par deux clés croisées, qui correspondent très certainement aux clés du paradis remis par Jésus à saint Pierre (Nouveau Testament). Aussi, ces éléments renvoient de façon plus générale à l’église paroissiale Saint-Pierre de Prades, ce qui pourrait justifier l’appartenance du puits à glace à un corps de communauté religieuse. En effet, les ventes par adjudication de la glace mentionnées dès le 18e siècle, font état de la « glasiera de la fabrica de leglise de Saint-Pierre ». La glace est régulièrement vendue aux enchères publiques, qui ont lieu devant l’église paroissiale [A.D.P.O. : 123 EDT 5]. Cette pratique marchande apparaît dans les bons de livraisons dits « albarans » en catalan, dont l’un des premiers indiqué date de 1701. À Prades, l’affermage de la glace est convenu entre les fermiers et la viguerie du Conflent (siège à Villefranche-de-Conflent). De plus, la gestion est contrôlée, comme l’indiquent les « albarans » de 1702. En effet, entre le jour de Pâques de l’année 1702 et la Toussaint, les fermiers sont obligés de garder leur provision en glace, afin qu’il puisse en rester pour les consuls de la ville. Ils pourront toutefois la vendre à « la gent de guerre » pour quatre deniers. Aussi, la glacière devra être vide du jour de Pâques à la Saint-André, pour pouvoir la remplir à nouveau l’année suivante [A.D.P.O. : 123 EDT 5]. Par ailleurs, la communauté ecclésiastique des Capucins, fondée au 16e siècle au lieu-dit les Planes à Prades, était en droit de prendre de la glace, tels que l’indiquent les dossiers du fonds de l’Intendance de Roussillon au 18e siècle. L’établissement est pauvre et ne peut assurer de lui-même l’achat de la glace. De ce fait, l’état des charges de la communauté de Prades à payer par les ordres des consuls sur le produit des revenus du consulat entre 1744 et 1755, fait état de charges dites « extraordinaires » estimées à 10 deniers, pour permettre aux Capucins de prélever la glace. Il s’agit en réalité d’une donation réalisée par la communauté laïque de Prades, que le Conseil de la ville ne pouvait honorer faute de moyens financiers [A.D.P.O. : 1 C 1976].
Contrairement à certaines glacières qui pouvaient être en partie alimentées par un cours d’eau situé à proximité, celle de Prades était approvisionnée par de la neige de montagne. L’édifice qui abrite actuellement le puits à glace (N°6 Impasse de l’Agriculture), apparaît sur le cadastre de 1807. Il s’agit d’un corps de bâtiment de profondeur réduite, dont la forme urbaine rappelle celle des granges agricoles. En effet, il se trouve dans une impasse qui regroupait autrefois plusieurs cortals, dont l’actuelle habitation n°4 qui jouxte le bâtiment. Cette dernière conserve une travée centrale de baies axées aux dimensions décroissantes vers le haut ; la dernière possède encore le dispositif d’une poulie, afin de hisser les ballots de foin.
Le corps de bâtiment fut transformé postérieurement en habitation. Le premier niveau était déjà habité au cours du 20e siècle, comme l’atteste les propriétaires actuels. Des travaux de rénovation financés en partie par la Fondation du Patrimoine ont été réalisés entre 2010 et 2011 afin de réparer la toiture. C’est à cette occasion que le linteau de la porte de garage a été repris, par reprise de la maçonnerie alors formée de parpaings.