L’édifice est une ancienne maison de notable située au plus près de l’église Saint-Pierre et de la place centrale de Prades, lieu qui concentre dès le 16e siècle un petit centre d’activités (marchés, manifestations religieuses et civiques). En effet, l’émergence de la bourgeoisie locale et d’une société composée de commerçants et d’artisans, amène le développement de demeures patriciennes au cœur du centre ancien, dont la maison Felip.
Les éléments architecturaux visibles en façade et à l’intérieur de l’édifice, témoignent d’une occupation comprise entre les 17e et 19e siècles. Le bâti serait toutefois plus ancien, car il résulte très certainement de la fusion de deux ou trois maisons, pouvant être datées de la fin du Moyen Âge [TJOYAS, 2011, p.4]. En effet, le cadastre napoléonien de 1807 permet de visualiser le découpage du corps de bâtiment actuel en deux parcelles. Celles-ci ont donc été regroupées postérieurement, pour former un seul ensemble. De plus, un jardin d’agrément occupait toute la partie Ouest de la propriété. La famille Felip possédait encore la demeure dans la seconde moitié du 19e siècle, comme l’atteste l’étude de la matrice cadastrale réalisée en 2011 par l’historien M. Aymat Catafau. En effet, elle appartenait à François Felip en 1811 puis à Joseph Felip en 1887 [TJOYAS, 2011, p.14].
La famille Felip possédait un important patrimoine mobilier, dont un hôtel particulier développé à l’origine entre la rue du Palais de Justice et la place Catalogne. Il jouxtait à l’Ouest la chapelle du Rosaire (mairie en 1854) et aurait eu plusieurs propriétaires, dont la famille Garau au 16e siècle, Romeu entre les 16e et 18e siècles, Saint-Jean au 19e siècle, puis Felip au 20e siècle [JANDOT, 2020, p.p. 126-132]. Celui-ci était le petit-fils du père de Maurice Felip, dernier propriétaire connu à ce jour de la maison Felip [témoignage recueillie auprès de Mme. Céline JANDOT, archéologue à l’Inrap].
Une étude sur l’hôtel particulier et plus largement sur l’îlot dans lequel se trouve la parcelle, a été réalisée en 2020 par Mme. Céline JANDOT, dans le cadre du projet immobilier « Cœur de ville », porté par la société Agir-Promotion. En effet, un programme de fouilles archéologiques préventive (Juillet à mi-novembre) est en cours de réalisation sur l’îlot d’habitations, dont la plupart d’entre elles ont été détruites pour construire un hôpital de jour et des logements [KOTARBA, 2017, p.p. 35-37]. Ainsi, des recherches approfondies ont pu être faites sur les maisons édifiées entre les 15e et 19e siècles en bordure de la rue du Palais de Justice, axe mentionné au 14e siècle sous le terme de « Ruha » (du catalan médiéval « Arruga » signifiant « sillon » et traduit en français par « Grande Rue ») [HUSER, CATAFAU, 2011, p.p. 25 et 26]. À l’intérieur, les éléments architecturaux recensés datent principalement du 18e siècle, tels qu’un jambage de cheminée en stuc, une niche pour l’éclairage avec des carreaux en terre cuite moulés et décorés, ainsi qu’une fenêtre croisée placée devant une ouverture bouchée [JANDOT, 2020, p.p. 126-132].
Inhabitée depuis 1990, la Maison Felip est identifiée dans les années 2000 par la ville de Prades, dans le but d’y développer un pôle d’activité culturelle et touristique au cœur du centre urbain ancien. Plusieurs études de faisabilités vont donc être faites, notamment en 2011 par l’architecte Mimi Tjoyas et l’agence de conseil spécialisée dans le secteur culturel LordCulture en 2012. Les projets de réaménagements ont ainsi mis en avant la volonté d’aménager un centre d’interprétation dédié au musicien Pablo Casals, aux peintres Martin Vivés et François Branger, ainsi que des locaux pour la gestion, la valorisation et la promotion du Festival. L’agence d’innovation culturelle 9b+ (Toulon) proposera également en 2014 des projets de réaménagement dans son rapport intitulé « Etude de définition pour la création d’un espace à vocation culturelle, patrimoniale et touristique dans la maison Felip à Prades : Espace Casals ».
L’ensemble de la propriété fut acheté au début des années 2000 par l’Office 66. Un important aménagement extérieur lié à la transformation du jardin en parking public est alors réalisé. Les dépendances Sud ont été détruites, afin de bénéficier d’un espace supplémentaire.
Acquise par la Mairie de Prades en 2016, la propriété Felip est actuellement au cœur d’un important projet de développement culturel du territoire, porté par la Communauté de communes Conflent Canigó. Il consiste à intégrer les locaux du futur Pays d’art et d’histoire au sein d’un pôle de tourisme intercommunal, le CIAP (Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine) et les bureaux du Festival Pablo Casals. Ce projet s’inscrit plus globalement dans le Schéma de développement culturel, réalisé en 2019 par le cabinet d’étude Bénédicte Dumeige Conseil. Aussi, la mission de programmation et d’assistance à maîtrise d’ouvrage pour la rénovation de la Maison Felip mise en œuvre entre 2020 et 2021, a consisté à proposer plusieurs scénarios d’implantation des activités prévues et des premières pistes muséographiques du futur CIAP [Filigrane Programmation, 9 Juillet 2020, 39 pages]. L’équipe de l’architecte DPLG et urbaniste Philippe Pous active à Perpignan, a été retenue pour mettre en œuvre le projet architectural. Au rez-de-chaussée, les espaces comprendront l’Office de Tourisme intercommunal Conflent Canigó (accueil, billetterie, boutique) et le CIAP ; les salles d’activités seront établies au 1er étage et les bureaux du Pays d’art et d’histoire ainsi que du Festival Pablo Casals au 2ième étage. Des espaces extérieurs, à savoir le « Cloître » et le « Théâtre de plein air » sont également prévus. L’extension projetée dans la continuité de l’existant et à l’emplacement d’une partie de l’ancien jardin, consiste à construire une grande salle d’activité et à aménager un parking semi-enterré. L’accès à l’Office de Tourisme et au CIAP s’effectuera depuis la place de la République, par la façade principale. Dans ce sens, la façade principale sera restaurée dans le respect de la volumétrie d’origine. Des accès secondaires sont projetés au niveau de la rue Voltaire pour se rendre aux espaces verts et à la grande salle d’activités. Celle-ci pourra également être accessible depuis la placette des Pyrénées. Tous ces accès seront régulés, en fonction des horaires d’ouverture et des animations prévues.
Enfin, le démarrage des travaux (Hiver 2022) s’effectuera quelques mois après une opération de fouille archéologique, conduite par Mme. Céline JANDOT. La présente notice sera donc complétée ultérieurement.
Architecte