AD Hérault. Série E ; sous-série 2 E : 2 E 26/262. Minutes de Me JOURDAN Etienne Jean Charles, notaire à Clermont l'Hérault, 1807. Acte de vente et formation de la société Baumier, Boissière, Lugagne, Rouquet, Delpon et Roqueplane (extraits).

Par devant Etienne Jean Charles Jourdan notaire à la résidance de la ville de Clermont de l'Hérault et les témoins sousignés fut présent sieur Pierre Dominique Ortus marchand domicilié à Clermont agissant en qualité de procureur fondé de M. Louis Antoine Denis Flottes propriétaire foncier domicilié à Marseille, fils majeur et héritier institué de feu sieur Antoine Flottes Raissac, le dit sieur Flottes fils agissant avec le concentement de ses soeurs Jeanne Marie Sophie Flottes et Jeanne Marie Honnorine Flottes majeure ainsi qu'il [?] de trois procuration passées devant Me Raynaud notaire à Marseille le dix sept juin, vingt neuf août et vingt sept octobre derniers enregistrées sur les minutes restées audit notaire dont les expéditions ont été représentées par le dit sieur Ortus et dont il a été fait lecture. Lequel dit Otus en suivant les pouvoirs à lui donnés par les dits actes de procuration et notamment par le dernier du vingt sept octobre a vendu, cédé et transporté en toute propriété à M. Gaspard Baumier, Jean Boissière jeune, Jean Noël Lugagne Delpon, Pierre Rouquet fils, Jean Delpon neveu et Jean Jacques Roqueplane père et fils, marchands fabricants de draps aussi domiciliés à Clermont, présens et acceptant lesdits citoyens formant la raison de commerce Gaspard Baumier, Jean Boissière jeune, Lugagne Delpon et Cie pour la fabrication des draps destinés à l'habillement des troupes, savoir

1° une maison teinturerie boutique de pareur, sol ouvert, jardin et autres bâtiments contigus situés à la rue de la frégère des fauxbourgs de cette ville section G n° trois contenant suivant l'état de section environ deux mille deux cent vingt metres et confrontant au levant sieur Henry Raynaud, au nord la rue de la frégère, au midy le ruisseau de Ronel et au couchant le sieur Jean Bernard

2° un champ rames et étendage en la même ville et sur la susdite rue section D n°72 contenant environ trente un ares et confrontant au levant les sieurs Raynaud et Paul Cathala, au midy la rue de la frégère, au nord des vacans et au couchant les sieurs Jean Bernard et Pierre Angerly et autres s'il y en a

3° les ustensilles effets et mobilier à l'usage de la teinturerie et de la boutique de pareur qui s'y trouvent existés, et qui sont ceux dont le détail suit : quatre grandes chaudières et quatre petites en cuivre évaluées cinq mille deux cent vingt francs, trois cuves bois cerclées en fer de valeur de sept cent francs, quatre campans en fer servant pour les cuves et chaudières, deux cent francs, quatre grands tours pour les chaudières cent francs, huits chevalets cent francs, petits outils pour le service des cuves chaudières ou fournaux évalués deux cent francs, dans la boutique de pareur neuf grandes forces en fer évaluées sept cent vingt francs, six penilles en plomb du poids de huit myriagrammes environ évalués deux cent francs, trois grandes tables de tondeur avec leurs marches pieds deux cent francs, trois ebaptières garnies de quinzes grosses de cardes deux cent francs, enfin le boisage d'une bibliothèque avec son dessus en marbre et deux grandes armoires de valeur de deux cent francs, lesquels objets vendus dependant de la succession dudit feu sieur Flottes Raissac.

Et la consequence ledit sieur Ortus comme procede a tansmis les biens ci dessus specifiés aux acquereurs par manière de corps avec leur appartenances et dependances, les libertés et facultés dont le vendeurs et les auteurs ont joui ou du jouir et les servitudes auxquelles ils ont été fournis, fais que le vendeur puisse etre garant des servitudes inconnues, devant seulement rester soumis à la garantie de droit pour faire cesser tout trouble que les acquereurs pourront éprouver dans la possession paisible des immeubles et effets dont la propriété leur est cédée des ce moment pour en prendre possession et jouissance le vingt deux septembre prochain […] la dite vente est ainsi faite moyennant une somme de vingt huit mille francs savoir les biens fonds dix neuf mille neuf cent soixante francs et les effets mobiliers ci dessus détaillés huit mille quarante francs juste prix du tout convenu de gré à gré entreparties […]

Et entre lesdits sieurs Baumier, Boissière, Lugagne, Rouquet, Delpon et Roqueplane a été dit que leur société de commerce, depuis son renouvellement n'a existé sur d'autre titre que celui de la confience réciproque mais que l'époque de rédiger par écrit leurs conventions sociales était arrivée, vu que l'acquisition qu'ils viennent de faire nécessite des conditions dont l’exécution doit passer à leur postérité. C'est pourquoi sous les auspices de la divinité les dits sieurs Baumier, Boissière, Lugagne, Rouquet, Delpon et Roqueplane ont arrêtés les articles de leur association comme suit :

article premier : il y aura société entre les contractans sous la raison commerciales Gaspard Baumier, Jean Boissière jeune, Lugagne Delpon et Cie pour fournir au gouvernement les draps, tricots, cadis et autres étoffes dont la société obtiendra la fourniture chaque année de F. E. le ministre directeur de l'administration de la guerre pour être les dittes etoffes fabriquées en commun ou séparement par chacun des associés ainsi qu'il sera réglé par la majorité demeurant dit que le terme de cette association sera de neuf années à compter du vingt deux septembre dernier, époque où elle a commencé de fait

2e : pour l'exercice dix huit cent huit, il est réglé que chaque sociétaire fabriquera chez lui le contingent qu'il aura à fournir pendant le cours dudit exercice et il en sera de même pour les années qui suivront jusqu'à ce qu'il en soit décidé autrement à la majorité des voix

3e : chacun des associés versera son contingent de draps dans les magasins de la société mois par mois et les versements seront toujours complettés au trente un juillet de chaque années, à defaut ceux des associés qui auront de draps d'excedant les verseront par égales portions moyennant une bonification de demi pour cent par mois à la charge des retardaires

4e : la reception des draps versés sera faite par tous les associés, excepté le versant qui ne pourra y etre present, cette reception aura lieu à la majorité des voix, et les draps qui seront jugés inférieurs seront rejettés et ensuite remplacés par d'autres recevables

5e : chaque sociétaire est tenu de marquer les draps de son nom sous le chef de chaque pièce en toile, avec la designation de Clermont l'Hérault et en toute lettre, et s'il est reconnu que les pièces ayant été marquées en fort elles seront de droit rebutées

6e : ledit sieur Gaspard Baumier est nommé caissier et aura encore sous sa garde les indigos, cochenilles, drogues et matieres de prix dont il donnera compte

7e : tous les actionnaires coopereront aux achats des drogues et matieres dont la société aura besoin, on pourra néanmoins deleguer à cet effet un ou plusieurs d'entre eux

8e : ledit sieur Lugagne Delpon aura seul la signature et signera de son nom et par procuration de la raison sociale tous les engagemens qui seront souscrits par suite des achats ou dont la cause interessera la société, lesquels engagemens seront inscrits sur un registre particulier

9e : les traités, billets et engagemens quelconques qui seront contractés sous le nom social obligeront tous les associés solidairement l'un pour l'autre et un seul pour le tout se promettant ces derniers mutuelle garantie à cet égard et renonçant expressement au benefice de division et de discution d'action

10e : la correspondance sera tenue et rédigée par lesdits Rouquet et Delpon et sera signée par ledit sieur Lugagne toujours par procuration

11e : la société aura un correspondant à Paris et à ses frais

12e : elle aura aussi à ses frais un comis de confience pour surveiller les opérations de la teinturerie, des presses, activer l'expédition des draps et la tenue des livres

13e : le caissier les comis et generalement tous autres chargés d'agir au nom et pour compte de la compagnie pourront être remplacés par le vœu des sociétaires manifesté par les deux tiers au moins

14e : chaque sociétaire aura la faculté de verifier les arrettés de comptes, les livres, la correspondance et toutes les autres operations pour s'éclairer sur la situation des affaires de la société

15e : les associés auront un droit égal et comme ledit sieur Roqueplane agit sous son ancienne raison de Roqueplane pere et fils, il ne comptera neanmoins que pour un et n'aura que son sixième d'intéret, tant à la société qu'à la maison et locaux acquis par elle du sieur Flottes

16e : a compter du premier janvier prochain les dits associés ne pourront faire teindre ailleurs que dans la teinturerie de la société, les draps qu'ils fabriqueront en leur nom particulier soit pour l'étranger soit pour l'intérieur, ensemble les laines et lisières, et ce aux prix qui seront fixés par la compagnie. Et quant aux draps que d'autres fabricans fairont teindre à la dite teinturerie, le prix en sera reglé par les dits sieurs Baumier et Delpon seuls

17e : il sera tenu par les comis un compte particulier de tout ce qui concerne la teinturerie

18e : les comptes des sociétaires relatifs aux teintures seront regullement reglés aux deux époques de trente juin et trente un decembre de chaque années et il sera fait des billets du montant payable six mois après ces deux époques

19e : à la fin du mois de décembre prochain il sera fait un inventaire des marchandises, matières, et drogues de teinture, effets et ustensilles appartenant à la compagnie. Et cette opération sera renouvellée chaque année à part cette époque jusqu'à l'expiration du terme fixé pour la durée de cette société

20e : le dit terme arrivé s'il y a des actionnaires qui veuillent renouveller la société et d'autres qui veuillent se retirer, dans ces cas les premiers seront tenus de se charger de toutes les drogues de teinture qui se trouveront en nature aux prix de facture et sous une deduction de dix pour cent payables dans six mois, ils se chargeront encore des draps, tricots cadis et autres etoffes d'habillement moyennant une deduction de douze pour cent et de soixante quinze centimes par metre sur le prix fixé par le marché quant aux draps et de six pour cent seulement quant aux tricots et cadis, le tout payable aussi à six mois de datte.[…]

24e : la maison, attelliers et locaux acquis de M. Flottes, par la société l'ayant été pour son usage, chacun des actionnaires fournira son sixième du prix stipulé à mesure des licences, ainsi que des frais et droits de cette acquisition, et de toutes les réparations que l'association jugera nécessaire dont il sera tenu un compte exact.

25e : si la société jugeait à propos de faire des augmentations, comme presses, rames, lavoir et autres, d'aliéner parti des dits bâtiments et locaux ou d'en recevoir d'autre il y sera délibéré à la majorité de vinq voix contre une.[…]

29e : dans tous les cas prévus et autres non prévus, comme la maison locaux et attelliers dont il s'agit ne peuvent être divisés sans les déprécier ou en changer la destination les copropriétaires ne pourront jamais en demander le partage, mais s'ils ne sont pas d'accord entre eux sur le mode à adopter, alors il serait procédé à la vente aux enchères par licitation, et le prix serait divisé entre lesdits copropriétaires ainsi que de droit.[…]

Fait et lu aux parties dans l'étude de nous notaire à Clermont l'Hérault, le quinzième novembre dix-huit centre sept après midi. En présence des sieurs Thomas Joseph Mauhau et Geraud Ortus propriétaires fonciers domiciliés à Clermont. Signés avec toutes les parties et nous dit notaire.