L’histoire du théâtre Jean Alary est liée à celle de l’ancien couvent des Jacobins, construit à la fin du 16e siècle sur l’emplacement du théâtre actuel. Confisqué à la Révolution et vendu comme Bien national, le couvent devient propriété de particuliers. Benoît Faral, l’un des acquéreurs, décida de transformer ce qui était auparavant l’église du couvent en salle de spectacle. Il confia la transformation à l'architecte toulousain Jean-François Champagne dont le projet prévoit que la scène et les dépendances soient installées dans le chœur de la chapelle des Augustins.
En 1843, Casimir Courtejaire (1795-1887) acheta l’ensemble des bâtiments à André Hertz. Dernier propriétaire de l'établissement, il le légua à la Ville en 1874 avec son matériel et ses décors. Toutefois, l’ampleur des dépenses pour procéder à la réparation des sièges et à l’aménagement de la scène de ce lieu de divertissement étaient considérables : il resta sans entretien pendant plusieurs décennies de sorte que la Dépêche du Midi le décrit dans les années 1930 comme menaçant ruine.
Carcassonne, comme toutes les communes de plus de 10.000 habitants, est obligée par la loi Cornudet du 14 mars 1919 de se doter d’un Plan d’aménagement, d’embellissement et d’extension (PAEE). Elle en profite donc pour doter la ville basse d’un nouvel établissement, mais il faut attendre une dizaine d’années supplémentaires pour que le Conseil municipal rende officielle le 9 juillet 1929, la décision de construire un nouveau théâtre, à l’emplacement de l’ancienne salle de spectacle, et, pour qu’il soit plus spacieux, de faire l’acquisition de deux immeubles voisins qui seront détruits.
De tous les projets mis au concours, c’est celui de Raymond Esparseil (1876–1966), de Carcassonne, qui est retenu. Cependant la difficulté du chantier dans un quartier ancien et fréquenté ne pouvait pas être confiée à un simple ingénieur civil et l’administration lui demanda de s’adjoindre un collaborateur spécialisé. Esparseil s’associe donc à l’architecte parisien Marcel Oudin (1882–1936) dont la réputation n’est plus à faire : il avait été choisi pour construire le pavillon des Magasins Réunis au Village Français de l'Exposition internationale des arts Décoratifs en 1925 et était surtout connu pour avoir bâti des cinémas un peu partout en France. Il maîtrise parfaitement la technique du béton précontraint, qui consiste à armer le béton avec des aciers très fortement tendus, ce qui confère à l'ensemble des caractéristiques de résistance particulière. Ainsi, la salle de spectacle pourrait-elle disposer d’un grand espace sans poteaux. Ce type de réalisations, qui exigent un savoir-faire si particulier, ne s’est vraiment développé qu’après la Seconde Guerre mondiale. Utilisé dans les années 1930 à Carcassonne, il fait du théâtre un ouvrage novateur par sa technicité. C’est l’entreprise Fiorio de Limoux qui fut chargée en outre son exécution, des études de béton armé.
Le chantier dure de 1933 à 1935 et les décors sont confiés à plusieurs artistes. Ainsi, la fresque qui orne le foyer, intitulée « La Symphonie pastorale », est l'œuvre Jean-Noël Garrigues (1889-1952), formé dans l’atelier de Laurens. Malgré son allusion à la partition de Beethoven, elle reste l’une des rares décorations publiques de l'artiste encore en place. Gustave-Louis Jaulmes (1873-1959), grand prix de Rome, décorateur et peintre réalise le décor du grand escalier et celui du cadre de scène avec des références à Erato et Terpsichore.
Une attention spéciale a été portée au système de chauffage, élaboré par la maison Garric de Carcassonne et l'éclairage fut aussi soigneusement étudié. Le jeu d’orgue et le rhéostat qui permettait de régler l’éclairage, encore conservés, ont été installés par les établissements Clémançon sur un modèle qui équipait la salle de spectacle du paquebot Normandie.
Inauguré le 8 juillet 1935 avec une conférence de Paul Valéry, le théâtre de Carcassonne fut conçu et construit en un temps record avec des techniques très novatrices pour l’époque puisqu’elles ne seront réellement employées à grande échelle qu’après la Seconde guerre mondiale.
2002-2008 : chercheur associé à l'Inventaire général
depuis 2008 : cbercheur à l'Inventaire général d'Occitanie