"Technique et historique de l'aube

L'aube est en fine toile de lin. La parure du bas, des manches, du col et du devant est traitée en peinture à l'aiguille pour les personnages - soies camaïeu vert blanc et rose très doux - le fond au point de mosaïque. Chaque parure est brodée d'un entre-deux ajouré avec inscriptions en soie, pain brûlé pâle. Le devant de la parure du bas, formant médaillon concrétise l'esprit franciscain : saint François, marqué des stigmates, debout, le regard vers le ciel, contemple l'objet de son amour, Dieu plein de gloire et de majesté... ses mains étendues implorent le secours et les bénédictions divines pour toutes les créatures dont il aimait à se dire le "frère". Sous ses pieds, les 8 concupiscences sous la forme de serpents : l'avarice (ordo paupertatis) opprimée par le détachement de st François et de ses fils, est contrainte de se dégager du pécule dont l'amour est la perte du monde. Au dessous, l'ange de la pauvreté préconise la première béatitude : "Bx les pauvres..." A gauche, l'ange de l'humilité (ordo minorum) transperce l'orgueil et le découronne. A droite, l'ange de la chasteté (ordo Poenitentiae) enchaîne la luxure qui, de ses tentacules crispées, brise le lys de la pureté. En bas, l'ange de l'obéissance (ordo obedientiae) tient un coeur enflammé pour indiquer l'ardeur puissante de cette vertu. Les anges musiciens chantent la vocation de François ; ceux de la gloire proclament l'incomparable mansuétude de son âme séraphique qui ne méprisa jamais la terre parce qu'elle est l'oeuvre de Dieu et l'escabeau de Jésus-Christ. A droite et à gauche de saint François se déploie la majestueuse procession d'un grand nombre de ses fils qui ont versé leur sang pour Jésus-Christ. Ils portent tous l'auréole et la palme du martyre et s'avancent dans l'ordre chronologique.

A droite : st Bérard, st Pierre, st Accurse, st Adjut, st Othon (tous morts en 1220) ;

Bx Jean de Pérouse, Bx Pierre de Saxo Ferrato (tous morts en 1231);

Bx Père Jean, Bx Frère Elie (morts en 1232);

V. Stanislas de Przemyol et ses compagnons, morts en 1241;

Vénérable Gérard et Vénérable Marquild (morts en 1247);

Père Conrad d'Albi, mort en 1266;

Bx Conrad de Saxe et Bx Etienne de Hongrie (morts en 1284) ;

Bx Philippe du Puy, mort en 1288 ;

Père Paschalus et Père Carellan Fabri (morts en 1321) ;

V. Stanislas de Cracovie et ses compagnons, Bx Gentil de Matelica (morts en 1340) ;

V. Pierre Gastold, mort en 1341 ;

V. Nicolas, mort en 1342 ;

Bx Nicolas de Montecorvino, le Père François (morts en 1358) ; Bx Guillaume de Campanie, mort en 1362 ; Père Guillaume de Castellamare, mort en 1364

Frère Antoine de Saxe, Frère Grégoire de Dalmatie, Frère Nicolas de Hongrie, Frère Thomas de Foligno, Frère Ladislas de Hongrie, morts en 1369 ;

Bx Pierre de narbonne, Père Nicolas de Sebenico, Père Donat, Père Etienne de Corse, morts en 1391 ;

Père Hugues Riché, Père Richard Risbé, morts en 1537 ;

Bx Jean Forest, mort en 1538 ;

Père Melchior de Lisbonne, mort en 1540 ;

Père Jean Zuarzo (capucin), Bx Alexandre, morts en 1552 ;

Bx François Laurent, Frère Jean, morts en 1560 ;

V. Père Ruellon, Bx Balthazar du Pré, Père Jean Chalvet, Père Guillaume Scofré, Père Jean Lautret, morts en 1562 ;

Père Julien Maignèse, Père Jean Bruni, Frère Jean de Mer, Père Guillaume de Grandmont, Père Antoine Ablet, morts en 1568 ;

Père Pierre Borgelaire, Père Pierre Tauziete, Père Joachim Dardan, morts en 1571

st Nicolas Pich, st Jérôme de Werda, st Corneille de Vica, st Nicaise Hézius, st Willebade, st Antoine de Hornar, st François Rode, st Pierre d'Asc, st Théodoric Emden, st Godefroy de Merville, st Antoine de Werden, morts en 1572 ;

Frère Antoine Carbonaire, mort en 1575

Père Patrice O' Hely, évêque, Père Connach O' Ruork, franciscain, morts en 1578 ;

Père Charles Lusache, Père Henri de Gourdon, Père Pierre Vabolois, Père Arnould Vigamont, Père Pierre Quatre, morts en 1578

Frère Jean de st Bernard, mort en 1599 ;

Père Sébastien de st Joseph, mort en 1610 ;

Bx Pierre de l'Assomption de Cuerba, mort en 1617 ;

St Fidèle de Sigmaringen, mort en 1622 ;

Bx Pierre d'Avila, Frère Vincent de st Joseph d'Ayamonte, morts en 1622 ;

Bx Appolinaire Franco, Frère Paul (japonais), frère François, morts en 1622 ;

Bx François Galvez, mort en 1623

Bx Louis Sotelo, évêque, Bx Louis Sassandra (japonais), mort en 1624

Bx Antoine de Bonaventure de Tui, Bx Dominique (japonais), mort en 1628

Bx Jean de Prado, Frère Junipère Germain, Père Patrice Flemeng et frère Matthieu Horg, Bx Gabriel de ste Madeleine, morts en 1631

Bx Jérôme Torrès, mort en 1632

Père Ginésius de Queseda et Père Jean Torrela, morts en 1634

Père Jean-Baptiste de Ponti, mort en 1653

Père Malachias Quillaeus, archevêque, mort en 1654

Bx Emmanuel Ruiz, Bx Carmel Motta, Bx Engelbert Kolland, Bx Nicanor Ascagne, Mianio, Bx Soler, Bx François Pinazzo, Bx Jean Jacques Fernandez, morts en 1860

Père Etienne, cap., mort en 1890

Père Ambroise, mort en 1890

Antoine Fontosati, évêque, mort en 1900

Père Zacharie, mort en 1901

Père Salvator, mort en 1901

Père Julien d'Ottawa, mort en 1919

A droite : saint Daniel de Belvédère, f. m., mort en 1227

St Samuel, st Domnule de Montalcino, st Léon, st Hugolin, st Nicolas de Sasso Ferrato, st Ange, f. m. , morts en 1227

Bx Léon, Bx Dominique, Bx Hugues, Bx jean, Bx Eloi, morts en 1232

Bx Etienne de Narbonne, Bx Raymond Charlonnier, Bx Bernard de Carbon, morts en 1242

Père Jacob de Poggio, Père Jérémie, morts en 1266

Bx Monald d'Ancône, Bx François de Fermo, Bx Antoine de Milan, morts en 1286

Bx François de Spolète, mort en 1288

Bx Thomas de Tolentino, mort en 1322

Bx Guillaume d'Angleterre, mort en 1334

Bx Pascal de Victoria, Père Richard de Bourgogne, Père François d'Alexandrie, Père Raymond Ruffi, frère Laurent d'Alexandrie, frère Pierre Martelli, morts en 1340

Bx Ulrich d'Alchonivez et Père Martin, morts en 1342

Père Jean de Florence f. m., archev., Bx Guillaume de Campanie, morts en 1362

Bx jean de Cetine et Bx Pierre de Duenos, morts en 1397

Bx Paul de Perpignan, mort en 1458

Bx André de Spolète, mort en 1532

Père François Matthaei, mort en 1538

Père Bernard Cousin, mort en 1550

Père Jean de Tapia, mort en 1556

Père Pierre Matthieu, Père Pierre Hoès, Père Jean Benoît, morts en 1561

Père François Mirambeau, mort en 1561

Père Aymeric Vitet, Père François Parodi, Père Claude Mocardet, Père Jean Bourges, morts en 1562

Père Paul Vacillator, mort en 1564

Père Grégoire Bournisset et Père Matthieu Mathaei, morts en 1568

Père Jean Cozer et Père Dominique Béralde, morts en 1568

Père François Pélissier, Père Jérôme Graisset, Père Alexis Sampson, Père Roger Viguier, Père Jean Ricard, Père Louis de Plana, Père Michel Grillet, Père Pierre Bonneau, Père Pierre de Molière, morts en 1568

Père Pierre de Vérône et Père Jean de Moret, morts en 1569

Père Antoine de Turno, mort en 1571

Père Jean Gosson et Père Raymond Roussel, morts en 1571

Père Claude Gabriel Fabri, Père Jean Capucio, Père Fergall, morts en 1575

Père Donat O' Ruarch, Père Jean O' Lorcan, Père Edmond Simon, morts en 1575

Père Jean Voisin, mort en 1578

Père François Donzel et Père Pierre de Burgos, morts en 1585

Saint Pierre Baptiste de San Estevan, st Martin de l'Ascension de Beasin, st François Blanco, st Philippe de Las Casas, st Gonzalès Garcia, st François de St Michel, morts en 1597

Père Frédéric Baschtein, Père Jean Martinez, Père Simon, Père Barthélemy de Bergame, Père Jérôme de Milan, Frère Gaspard, Frère Jean de Monte Piano, Frère Jacques d'Augsbourg, Frère Clément, Frère Jean, Frère Christophe, Frère Didace, Frère Emmanuel, Père Antoine, morts en 1611

Bx Jean de ste Marthe, mort en 1618

Bx Richard de ste Anne de Ham, mort en 1622

Bx François de Sainte Marie de Montelvanyo, Bx Barthélemy Laurel, Bx Antoine de st François, japonais, morts en 1627

Bx Agathange de Vendôme, Bx Cassien de Nantes, morts en 1631,

Père Denys Melan et Père Daniel Claudy, morts en 1642

Père Jean-Baptiste Bullaker, mort en 1642

Père François Bel, mort en 1643

Père Ferdinand Isola et Père Jacques Zampa, morts en 1648

Père Paul de Ste Madeleine, mort en 1643

V. Appolinaire de Fribourg et V. Jean François Burté, morts en 1792

Bx Jean de Triora, mort en 1816

Père Thomas de Calangiano, mort en 1840

Les entre-deux portent en inscriptions, en haut : "J'ai été saisi par le Christ Jésus pour le connaître, m'associer à sa passion et me conformer à sa mort" 17 septembre, Fête des Stigmates, 5e antienne de Laudes.

En bas : "En toutes choses il a souffert la tribulation, mais il n'en a point été troublé pour que la vie de Jésus soit manifestée dans sa chair mortelle" (4 octobre - Fête de st François - 6e répons de matines)

Sur le parement de la manche droite sont les 60 clarisses martyrisées par les Tartares à Cracovie mortes en 1259 avec l'inscription "elle s'est attachée à la science de Dieu". Elle a fait choix de ses oeuvres. (12 août - fête de ste Claire verset 2 nocturne)

Sur le parement de la manche gauche, les 73 Clarisses massacrées par les Turcs à Ptolémaïs en 1291 avec l'inscription " le Seigneur l'a chérie entre toutes et Il a aimé sa beauté" (12 août - fête de sainte Claire - verset du 1er nocturne)

Sur le parement du devant, au bas, les armes de Pie XI ; à droite, en montant :

- ste Elisabeth Bartona, de Kent, clarisse pendue sous Henri VIII, morte en 1537

- Clarisse de Lyon qui subit une mort horrible de la part des huguenots, morte en 1567

- Soeur Marguerite de Rouen, clarisse, outrageusement mise à mort par les Calvinistes, XVIe siècle

Capucine du Tiers Ordre régulier, martyrisée au Brésil, morte en 1901

Au-dessus les armes de saint François ; à gauche en montant : sr Agathe Amarella, clarisse martyrisée par les Turcs à Minorque, morte en 1538

Ste Jeanne de Rouen, clarisse indignement tuée par les Huguenots au XVIe siècle.

Bse Joséphine Lenoir, de Valenciennes, clarisse décapitée en 1793.

Au-dessus les armes de Sainte Claire. La parure du col et des épaules porte des séraphins.

P. 84, lundi 24 décembre 1923, veillée. Lettre du Père Zacharie « . […] Il prépare des pèlerinages à Rome et voudrait un ornement pour le Pape, exposé par le pèlerinage de 1926, exposé à Rome […] Notre Révérende Mère qui désire depuis longtemps travailler pour le Pape saisit l'idée avec un bonheur inexprimable. »

P. 186, 27 juin 1926, « L’aube du Pape va être calquée cette semaine, et la semaine prochaine on commencera à la broder. Mais l’ornement est encore loin d’être composé, ce qui donne bien du souci à notre Mère. »

P. 194, 28 juillet 1926 « Depuis quelques temps, les officiers de saint Michel avaient quitté leurs métiers pour aider à la lingerie et à la draperie. Sur l’assurance de Mère maîtresse que les novices finiraient les trousseaux, elles ont repris le travail pour les églises en attendant de se mettre à l’aube et à l’ornement du pape.

P. 216, 1er décembre 1926, "La chasuble du pape est en mains, certaines difficultés d’exécution sont vaincues, Notre Révérende Mère montre par là que rien ne résiste à une bonne volonté effective et aux efforts sincèrement poussés à bout pour l’honneur et l’amour de Dieu. »

P. 224, 8 février 1927, Monseigneur « a vu les morceaux achevés de l’ornement papal et les a trouvés beaux. »

P. 225, 14 février 1927, « Notre Révérende Mère a eu la charité de nous faire voir un morceau fini de l’ornement papal – c’est très beau – et comme dans le conte de fées, « la pièce entière passerait par le chas d’une aiguille à point de Venise ». Pour en montrer la souplesse notre Mère l’a froissé dans sa main, comme une feuille de papier de mousseline. Monseigneur demande qu’on fasse photographier la chasuble pièce par pièce. Notre Mère a pensé à faire des cartes postales de chaque sujet – ce qui charme sœur Marie de Saint Raphaël dont l’idée se promenait autour d’une publication au profit des missions. »

11 mai 1927, « Mardi le Père Zacharie est venu chercher l’ornement du pape – hélas pas achevé. Il a eu la joie de voir la famille Desvallières. Il a compris que l’ornement du Pape ne soit pas fini, mais le Père Provincial ? qui doit aller à Rome à la Pentecôte… La peine est bien pour nous. »

P. 235. 6 juin 1927. « Notre Mère […] promet une messe aux âmes du purgatoire et une aux Saints Anges pour obtenir leur secours demain où l’on doit monter le dos de l’ornement papal. Comme le succès semble assuré, notre Mère fait dire la messe d’avance afin de reporter toute la gloire à Dieu et d’éviter la vapeur de vaine complaisance qui pourrait s’en dégager. »

Jeudi 8 juin 1927. « Jour mémorable. Le dos de la chasuble du pape est assemblé tout s’accorde, il n’y a aucune difficulté. Alleluia ! grâce soient rendues à nos protecteurs et protectrices célestes. »

14 juin 1927. « L’ornement papal est en train ; il absorbe tout mais il marche bien. »18 juin. « Récréation le soir au jardin où l’on se réconforte pour les grandes fatigues au service du Pape. »

P. 237, 10 juillet 1927, « L’ornement papal avance pour tout de bon ; la bourse est finie et montée. »

17 juillet 1927, « l’ornement du Pape semble devoir être fini mercredi. Notre Mère en souffre mort et passion voyant les ouvrières à bout de force et l’équilibre régulier sans cesse en question. »

21 juillet 1927, « le dos de l’ornement papal est fini – demain le devant – la petit sœur Germaine s’est mise aux figures du premier coup.

Samedi 23. « Pour tout de bon l’ornement a passé aux mains de monteuses… »

24 juillet 1927, fin du congrès eucharistique de Mazamet «  et on a pu montrer l’ornement du pape – pas tout à fait fini – Le Curé de Monseigneur dit qu’il a vu à peu près toutes les merveilles et curiosités des expositions et des musées mais rien qui ressemble à cela et donne une vision de beauté aussi complète. Il ajoute que c’est un préjudice à la société que de ne pas exposer ce travail pour élever l’art au-dessus de lui-même et révéler la vie supérieure qui existe dans les monastères. »

Vendredi 29 juillet. « Enfin depuis mercredi on a pu mettre l’ornement à l’exposition – à condition d’y travailler ensuite de 10h à 15h pour finir les détails. […] À la récréation du soir lecture du plan de l’ornement, c’est fort intéressant comme coup d’œil d’ensemble et résumé de l’esprit et des œuvres de l’ordre franciscain […] L’exposition de l’ornement est un bienfait public, elle donne une vue de beauté qui élève l’âme »

30 juillet 1927, « L’ornement reçoit la visite des bébés de trois mois et des mémés de quatre vingts ans et des gendarmes.»

P. 253. 23 décembre 1927. « Retour de l’ornement du pape ».

29-30 décembre. « On s’occupe de faire un montage de vitrine pour l’ornement et à le remettre en état de voyager et de se montrer un peu plus commodément. »

Dimanche 1er janvier 1928. « l’ornement devra être exposé toute la journée pour repartir lundi. Une belle lettre de l’aumônier des hôpitaux de Béziers qui remercie de la charité avec laquelle il a été permis au public de voir cette merveille. Il la compare à tous les chefs-d’œuvre de l’esprit humain, Somme de st Thomas, Messe de Bethoven (sic) etc. Mère Vicaire a guetté le moment favorable pour dévoiler un autre suffrage autrement précieux, celui de l’Archevêque de Cambrai qui rodait en silence autour de l’ornement. Le Père Zacharie l’observait de son côté et voulait savoir la pensée qui mûrissait sous ce silence ? « C’est qu’il doit y avoir une grande abnégation dans la Communauté qui a fait ce travail ; l’unité d’exécution pour rendre la pensée unique du plan général, indique un entier oubli de soi et renoncement à ses propres vues. »

2 janvier 1928. « L’ornement a été exposé de nouveau tout hier et part ce soir pour Castres »

3 janvier. « L’ornement est reparti hier au soir, enlevé par Mr l’abbé Roques qui l’a exposé au couvent de la Présentation à Castres, au milieu de nones extasiées, dit-il. »

p. 272. 26 juillet 1928. « Les moniales réclamaient de notre Révérende Mère l'instruction matinale qu'elle évite de donner tous ces jours-ci, à cause du travail du pape qui va reprendre et sera pressant. »

28 juillet 1928. « Enfin on a pu envoyer l'ornement à Dourgne, porté par Mr Mader, conseiller municipal du quartier […] sœur Marie de l'Espérance accompagnait... et l'exhibition est finie. C'est un soulagement considérable, maintenant, il faut réparer les dégâts, assez notables, avant le 20 août, mais nous saurons que de nos mains cet ornement ne sortira plus que pour être offert au Pape. Madame de Sainte Scholastique a gracieusement remercié et offert deux fromages bien précieux. »

3 août. « L'ornement du pape est enfin rentré. Notre Révérende Mère l'a montré au noviciat ce soir ; la communauté le verra demain ; le public dimanche, et puis fini ! »

P. 276, 18 août 1928. Visite du T. R. P. Melchior, ministre général de l’ordre des Capucins « Nos Pères ont tenu à lui montrer l’ornement du pape, auquel il ne s’est intéressé que par cette politesse ; mais son secrétaire, le Père Octave, le dévorait des yeux. On ne pouvait l'arracher du manuscrit et il a dit que le saint Père, spécialiste et grand amateur le regarderait. C'est une joie que cette assurance. »

P. 277. Dimanche 19 août 1928. « L'ornement est parti. Le R. P. Eleuthère est venu le prendre pour le porter à Paris où son Excellence le Nonce doit le cacheter des sceaux diplomatiques. Par bonheur, on n'a pas trouvé du ouatage tout fait, mais le travail doublé n'était pas fini. Une tourière est allée arrêter le train. Il était dit que tout serait hors du commun pour ce travail. »

P. 280, lundi 17 septembre 1928. « C'est mercredi dernier que l'ornement a été remis au Pape en audience particulière de 8 personnes. Sa Sainteté a donné une demi-heure, tout regardé en ajoutant d'aimables paroles. Comme nous espérons que le Père Zacharie nous donnera le détail des audiences, le peu que nous savons encore n'est pas à noter, mais seulement la bonté du Saint Père qui s'est servi de plusieurs expressions de notre dédicace comme pour montrer qu'il en est touché. Il a dit : « vêtements sacrés » et nous a appelées : mes filles ». Il a dit aussi que l'ornement est une œuvre d'amour filial. »

Mercredi 19 septembre 1928. « Après la messe, Monsieur l'Aumônier nous a dit en quelques mots que le Saint Père en entendant le Père Zacharie lui dire : « Ceci c'est l'aumônier des Clarisses », s'est reculé d'un pas pour bien voir à qui il avait à faire et puis il a dit : « Vous direz à mes filles que je les remercie et que je les bénis et vous leur donnerez cette bénédiction de ma part ». Au (sic), Très Saint Père, je le ferai ». Et il nous a donné cette précieuse et spéciale bénédiction papale que nous avons reçue avec une reconnaissance toute spéciale aussi. »

P. 281, 27 septembre 1928, « Compte rendu in extenso du pèlerinage à Rome

Le Révérend Père Zacharie a commencé par avouer qu’au moment du départ il était à bout de forces physiques et morales. Mais, disait-il, si je me laisse voir comme je suis aux pèlerins, ce serait du beau ! En avant donc et bonne contenance. Et si quelqu’un parlait de fatigue, lui protestait aussitôt qu’il ne s’était jamais trouvé en si bonne disposition.

Il avait en avant le départ une très vive peine, parce que le R. P. Général, vu le petit nombre des religieux et le grand nombre des œuvres, avait parlé de supprimer celle du pèlerinage. Heureusement que le Saint Père s’intéresse beaucoup à ce pèlerinage de l’enseignement, mais ceci est peut-être une anticipation.

Parmi les pèlerins, étaient deux généraux, un socialiste, membre de quelque chose dans l’enseignement. Monsieur Mascurand et sa femme protestante. C’est par l’ornement du pape que le Père Zacharie les a connus. Gens au cœur d’or, avides d’entendre parler de choses religieuses, dévorant des yeux et des oreilles le Père Zacharie. Ce brave homme qui a déclamé toute sa vie contre la [p. 282] calotte et l’armée était stupéfait de voir de près les généraux si doux et aimables. Il avait appris à faire le signe de la croix pour pouvoir recevoir la bénédiction du pape. Et le Père s’occupait de lui dix fois plus que de personne. Il a même dîné chez lui à Paris et promet de le gagner à Dieu.

Passant sur les premiers jours du voyage, le Père nous a menées à Florence, la ville artistique et princière par excellence ; mais il nous a menées à l’Alverne surtout disant que l’Alverne et Assise sont ce qui saisit le plus l’âme des pèlerins, tous sans exception. On a eu une très belle journée, l’ascension s’est faite dans de bonnes conditions […] A Rome, immense déception. Le Pape souffrant n’a pas reçu depuis huit jours. Monseigneur Ceretto, premier majordome et l’amabilité même était à Sydney pour le congrès eucharistique, remplacé par Mgr Bignone, moins à l’aise dans ses fonctions intérimaires et n’y mettant pas les visiteurs. Le Père Zacharie, il se disait, un petto, si je ne réussis pas avec les hommes, je réussirai avec les femmes. Il est allé avec la sœur Cécile de sainte Marthe qui est l’intermédiaire de son couvent avec le Vatican. « Ah ! Père, dit-elle, Monseigneur Bignone, il m’a fait pleurer hier, il m’a dit que nous étions des indiscrètes, etc, j’en ai été malade ». Vous avez eu bien tort, répond le Père, et il va donc trouver le terrible majordome. Il se fit, nous dit-il, flatteur, et a enfin invité Monseigneur Bignone à voir l’ornement. Je n’ai pas le temps. Monseigneur, après l’office à Saint-Pierre, avec Messeigneurs du chapitre. C’est une minute à perdre, et vous ne l’aurez pas perdue. En effet, après l’office de Saint-Pierre, voici Monseigneur Bignone avec le vénérable chapitre, stupéfaction générale… Le Père, fier de son premier succès, a commencé [p. 283] le siège pour une audience : «  Monseigneur, vous pensiez que les Capucins offriraient au Pape un ornement de quatre sous ?... Et Monseigneur Bignone ne disait pas non. Mais émerveillé, il était changé, et emportait le manuscrit enluminé, que personne n’a vu (Notre Révérende Mère l’avait recommandé, il est parti donnant toutes les espérances.)

Or, avec les chanoines de Saint-Pierre, il y avait un journaliste, correspondant de la Croix et rédacteur de l’Osservatore Romano. D’un bond, il était aux antichambres du pape et voilà tous les Monsignori et les Gardes-Nobles qui défilent à Sainte Marthe. Les affaires marchaient bien.

Père, on vous appelle au téléphone, c’est du Vatican. Qui m’appelle ? Monseigneur Bignone lui-même. « Père Zacharie, le cœur ne vous a-t-il rien dit ? Rien Monseigneur, mon cœur parle quand il s’agit de faire plaisir à mes pèlerins, mais pour moi, je ne désire et ne demande rien. Vous aurez une audience privée demain mercredi (12 septembre) et pourrez mener 5 personnes, à 6h précises. Monseigneur, je serai là deux heures à l’avance, plutôt qu’une seconde en retard. Et en effet, il était parti avec ses cinq personnes quand on lui fit dire qu’il pouvait en mener davantage. C’étaient : les deux généraux, deux membres de l’Enseignement Officiel, deux Pères capucins et Mademoiselle d’Hyver qui devait représenter la communauté.

Il n'y eut pas de porte-chape, mais on trouve un porte-manteau et les petites pièces de l'ornement furent placées sur deux tables, c'était dans la salle du tronetto ou petit trône, qui touche aux appartements du Saint Père et où il reçoit les ministres des puissances. Tout le personnel de la maison du Pape était là, les secrétaires bouche bée, et l'un d'eux à genoux près de l'aube la contemplait fil à fil.

Un coup de timbre, c’est le Pape. Tout à l’instant est en rang et à genoux. Après la première bénédiction a commencé l’offrande et explication de l’ornement. Quand le Père signalait une scène, le Pape disait invariablement : « J’ai vu, j’ai lu », ce qui fait croire au Père qu’il avait lu d’un bout à l’autre l’explication de l’ornement et regardé toutes les enluminures. A chaque scène un peu plus admirée par les connaisseurs, le Père mettait la main au-dessous pour mieux signaler, et Sa Sainteté admirait. La visite des ornements a duré au moins 25 minutes. Le Pape a beaucoup loué l’étole ; sur le voile, le réfectoire de St Damien l’a arrêté : c’est cela, c’est bien cela, disait-il. Sa Sainteté s’exprimait d’abord en italien, comme pour lui-même, puis en français pour les pèlerins. Il a cherché le manipule qui se trouvait caché sous autre chose et l’a longuement regardé. Au voile en regardant les papes du 1er et 3e ordres il a dit : « il faut mettre ici Pie XI, je suis tertiaire depuis longtemps, j’ai été tertiaire très jeune ». « Le plus tard possible ici, a dit le Père Zacharie, on y a mis les morts », et montrant le portrait du Pape sur la chasuble : « là, ce sont les vivants. »

Le Pape a dit plusieurs fois : « c’est une merveille, maraviglia, maraviglia ». Et comme le Père Zacharie disait : saint Père, c’est une œuvre d’amour filial, le Pape a repris vivement : « C’est plus que cela, c’est une belle page d’histoire franciscaine » ; il a dit aussi : c’est une œuvre d’art, bello arte, d’un art beau, vrai, et il a paru attacher une grande importance à ce que cette pièce d’art véritable et très beau fut d’un art très français, et vint de France.

L’exhibition finie, le Père Zacharie a dit : « Très Saint Père, j’ai une chose à demander à Votre Sainteté, peut-être est-ce hardi, mais permettez-moi de vous demander de [p. 284] mettre cet ornement pour la messe de votre Jubilé sacerdotal ». « Oh ! s’est écrié le Saint Père, que je suis heureux que la pensée du fils se rencontre avec celle du Père. Je me proposais de le mettre pour la messe de mon jubilé sacerdotal. »

Le Pape a aussi demandé si les Clarisses de France étaient aussi pauvres que celles d’Italie, et la réponse affirmative a paru lui faire plaisir. Le Père Zacharie avait tout le temps fait valoir les ouvrières, le soin apporté au travail, celui de s’instruire exactement de l’histoire de l’ordre avant de commencer et celui de se procurer les documents précis pour que l’exactitude la plus rigoureuse signale le moindre détail, portraits authentique, costumes du temps et des lieux, paysages et harmonisation des encadrements dans la style assorti.

Faisant remarquer les parements de l’aube, il a aussi agréablement dit que les Clarisses avaient su se réserver la bonne place dans la manche du Pape. Mademoiselle d’Hyver a donné quelques détails de plus.

Et la messe du Pape, et l’audience générale pour les pèlerins ? Sa Sainteté a dit : oui, oui, vous l’avez, c’est entendu, réglez cela avec Monseigneur Bignone.

A peine de retour à Sainte Marthe, le Père est appelé au téléphone. C’est le Vatican… Le journaliste de l’Osservatore, correspondant de la Croix qui demandait le récit de l’audience privée pour le transmettre à la Croix. Et le Père en parlant émet une inquiétude au sujet de son audience générale. « Soyez tranquille, une note assure que vous l’avez, surtout ne dîtes rien jusqu’à ce que ce soit officiel. Oui, oui, et le Père n’eut rien de plus pressé que de consoler ses pèlerins inquiets et affligés, car on disait : « après une si belle audience pour quelques-uns, et l’ornement étant offert, nous n’aurons rien ». « Vous aurez l’audience générale et le baisement de main ». Autre appel au téléphone. Encore le Vatican. C’était pour l’audience générale, pli officiel, rien ne manquait. Mais la messe demain à 7h ½. On dit que le Père Zacharie n’est pas aimable pour les dames. Je les verrai toutes, pas une n’ira au Vatican sans que je l’ai vue. Que l’on soit correctes, pas de fenêtres, pas de rigueurs exagérées.

Le Saint Père a célébré la messe dans la salle du Consistoire où l'on avait dressé un autel portatif. Tout yeux, le Père Zacharie s'aperçoit que les manches de l'aube sont trop étroites et l'encolure de la chasuble ; le Saint Père a dû pour l'entrer ôter sa calotte et ses lunettes. Après la messe, on a appelé le Père, il en savait autant que les camériers et caudataires pouvaient lui dire. Il a rapporté les manches et le R. P. Lazare rapportera l'ornement en octobre, la réparation est facile.

Sur la messe, le Père ne nous a rien dit, sauf les très beaux chants des pèlerins, il n’avait que cinquante minutes, et la grande audience était son grand intérêt après celle de l’offrande de l’ornement.

Sainte Marthe est à l’extrémité opposée de la Place St Pierre que l’on traverse a pied en chantant des cantiques, sur une rangée de six. 280 pèlerins de France et un groupe de la Suisse française catholique, conduit aussi par les Capucins. C’est très beau, aucun pèlerinage ne fait cela, et l’impression est grande, excellente. Tout le Vatican aux fenêtres. Le Père dit : «  Ceci, je ne le fais pas pour Dieu, mais pour les hommes, parce que je crois que cette belle ordonnance et discipline les élève à Dieu. Cette fois, ce n’est plus le bon Père Zacharie, « je suis terrible ». On monte le grand escalier du Vatican, halte à chaque [p. 285] palier. Les pèlerins sont rangés en deux salles et Sa Sainteté a donné sa main à baiser à chacun. Le Père lui présentait tous ceux qui avaient une notoriété même modeste, pour que le plus grand nombre possible ait son mot. Ça, c’est l’aumônier des Clarisses. Ah ! l’Aumônier des Clarisses. Le Saint Père s’est reculé d’un pas, il a bien regardé et dit : « Vous direz à mes filles mon admiration et ma reconnaissance et que je les bénis. Vous les bénirez de ma part. Oui, Saint Père, je le ferai… et le Père Zacharie n’a pas été écouté le reste, car il y en avait d’autres à présenter. Il y a encore des lacunes dans ce récit si détaille.

Les pèlerins ont été tous réunis dans la salle du tronetto et le Saint Père s'étant assis a prononcé une allocution très affectueuse, beaucoup plus longue qu'aucune de celles que le Père Zacharie a jamais entendues en pareilles circonstances. Il a remercié pour l'ornement, l'a beaucoup loué et témoigné et témoigné d'une grande satisfaction, il a insisté encore sur l'art vrai et très français dont cet ornement resplendit. Il paraît avoir l'intention de s'en servir. Il a loué le chant des pèlerins et dit sa grande satisfaction de voir cette belle assemblée autour de lui. Comme c’est le pèlerinage de l’enseignement, Sa Sainteté a insisté sur l’importance de l’enseignement en ce moment et dans un pays comme la France.

Le Pape a chargé chacun des pèlerins de rapporter sa bénédiction en France, à tous ceux qui la désirent, à ceux qui ne la désirent pas, à ceux même qui n’en voudraient pas. Faisant la sienne la parole d’un de ses prédécesseurs qui traversait la France, prisonnier, s’adressant à un jeune homme qui semblait refuser de recevoir sa bénédiction, alors que tous ceux qui l’entouraient se pressaient à l’envie, le Pape lui dit « Mon fils, recevez la bénédiction, car la bénédiction d’un vieux père ne peut jamais faire de mal.

Le Pape est rentré dans ses appartements à travers les rangs des pèlerins qui chantaient des chants sacrés.

Il a été convenu que ce pèlerinage porterait parmi les autres le nom de « Pèlerinage de l’ornement du Pape », mais cet ornement était devenu l’ornement du Père Zacharie, et lui-même avouait que presque il croyait l’avoir fait et « j’avais à me défendre des tentations de vaine gloire ». Il a fait une grande sensation à Rome. »

P. 286. « L'appréciation du Pape sur l'ornement fait sensation dans le monde artistique déjà mis en éveil, sa haute compétence personnelle, appuyée de sa dignité fait infaillibilité. »

P. 287, septembre 1928, réception d’une lettre du cardinal Gasparri, secrétaire d’Etat de Sa Sainteté

16 octobre 1928. « Notre Révérende Mère nous a donné à chacune une lettre du Pape remerciant de l'ornement, plus on la lit, plus on la voit belle. Nos amis la savourent. Melle Blondel s'en enivre. »

P. 296, 13 novembre 1928, « Le P. Norbert a raconté qu’à Périgueux, ville apathique, l’ornement du Pape a soulevé une véritable émotion populaire. Parmi les visiteurs était un artiste professant l’incroyance. Il observe longtemps dans un sombre silence puis il pleure et se convertit. »

P. 306, 12 décembre 1928. « Il y a quelques jours que la chasuble et l'aube du Saint Père nous ont été envoyées de Rome par l'Ambassadeur français afin d'élargir les manches de l'aube et d'agrandir l'encolure de la chasuble. Le travail qui donnait du souci a été si bien fait que tout y a gagné. Sur les manches de l'aube, plusieurs Clarisses martyres y ont été ajoutées, la chasuble descend un peu plus et paraît plus gracieuse. Hier, le Père Zacharie est venu en toute hâte le chercher, ayant reçu un télégramme de la Nonciature qui demandait que l'ornement fut rapporté aussitôt afin que le Pape puisse le mettre pour la messe de son Jubilé, qu'il célébrera le 20 courant. »

Samedi 18 mai 1929. « Notre Mère s'occupe activement de faire préparer les dessins pour l'ornement du sacre de Monseigneur Roques, et avec le drap d'or qui n'avait pas été employé pour la chasuble du Pape, on va commencer aussitôt tout ce qu'il sera possible. Le supplément nécessaire pour la chape est mis en fabrication mais les Duviard demandent cinq semaines. Cependant, nous espérons un effort de leur part pour le livrer plus tôt, nous ne pourrions sans cela avoir fini pour le 24 juin. »

P. 430, janvier 1930, « on nous a envoyé une carte postale représentant le Pape célébrant sa messe jubilaire à Latran, revêtu des ornements faits par la Communauté. »

P. 307, 10 décembre 1933, « Exposition de la ceinture destinée au Pape par Melle da Silva Ramos – très belle. Les agneaux boivent au fleuve de vie qui coule des armes du Souverain pontife. La moire a été tissée exprès. Rien de si beau et tout à fait à la main, un joli coffret la renferme. Mère Marie de saint Michel avait beaucoup rabaissé la ceinture modèle – elle était belle et soignée comme on fait pour un évêque quand on n'en sait pas davantage. »

P. 334, 8 mai 1934, « Renouvellement des vœux au chœur, en grande dévotion, de sœur Marie de la Grâce, sœur Marie de la Croix et Mère Marie Gertrude. Dieu est admirable dans ses saints. On ne peut qu'en être saisi en voyant la belle chaîne de novices et jeunes professes qui se sont attirées les unes les autres courant sur les pas de Sabine Desvallières, chez qui la bonne volonté a produit des œuvres hors de proportion avec ses moyens, et dont la vie paraît plus féconde encore depuis que, malade, elle est à peu près inactive. Sans doute, toutes les moniales procurent à Dieu une somme semblable de gloire, mais celle-ci semble donnée en exemple pour nous faire croire, en effet, au mystérieux apostolat de la bonne volonté mise sans réserve au service de Dieu. Car celles qui se sont dévouées jusqu'à la mort à l'ornement du pape sont, en effet, les premières qui ont déclenché ce mouvement... »

Albi, Archives diocésaines, fonds des Clarisses,

Album 19,

quelques pages tapées à la machine au début de l’album

« Ornements

que les Pères Capucins de la Province de Toulouse firent exécuter pour marquer le 7e Centenaire de N. P. St François et qui furent offerts à Pie XI à l’occasion de son Jubilé sacerdotal.

Travail composé et réalisé par les Clarisses de Mazamet

La préparation de ce travail exigea de patientes recherches dans les documents. Mère Marie [Thérèse] de Jésus et Mère Marie de St Michel se livrèrent à ces recherches avec un inlassable dévouement durant de longs jours et souvent une partie des nuits.

Mère Marie de St Raphaël, sur ces données, créa tous les dessins. Ils étaient prêts en 1926. Elle assura les peintures sur papier modèle et sur fonds qui devaient être brodés, aidée de Mère Marie Jeanne d’Arc.

Toutes les brodeuses y travaillèrent de 1926 à 1928, en journées qui se prolongeaient souvent très tard. Des moniales, non brodeuses, aidaient en enfilant des provisions d’aiguilles.

Les contemporaines (survivantes en 1970) se souviennent de ces ornements sans pouvoir préciser en détail ce qu’elles y ont exécuté.

Sœur Marie Cécile – brodeuse des vêtements des personnages de la croix de la chasuble, dos et devant, de plus l’apothéose de l’Immaculée Conception, scènes mission d’Ethiopie, St Jean de Capistran, etc… Le voile en quatre scènes concernant les Clarisses.

Sœur Marie de la Visitation, centre du dos de la chasuble et d’autres scènes des côtés – aidé à d’autres parties selon nécessité – entre-deux de l’aube, broderie anglaise (avec fils d’Alsace très fin) etc…

Sœur Marie des Anges, spécialisée aux figures, les a assurées presque en totalité – de même les décors ou agrémentations des vêtements des personnages – de plus, broderie de l’apothéose de St François, haut du dos de la chasuble -  la scène de St Laurent de Brindes, etc…

Sœur Marie de la Providence a aidé aux figures – brodé les scènes du Curé d’Ars, S. Bernardin, st Pascal Baylon – participé à la broderie des vêtements des saints de l’aube, etc…

Sœur Marie de la Fidélité qui n’était que postulante vers la fin du travail n’a pas de souvenirs très précis de sa collaboration, sauf pour broderie de petits anges, vêtements de quelques saints et de la corde franciscaine formant galon autour de chaque pièce.

Elle participa davantage à une aube, pareille à celle du Saint Père demandée par le Père Zacharie[1] exécutée au noviciat sous la direction de Sœur Marie de la Providence et avec son concours.

Mère Marie Pia et Mère Marie de St Gabriel assuraient surtout le nattage des fonds d’or – de plus, Mère Marie de St Gabriel fit la reproduction de notre Monastère en or nué fil à fil, petite miniature, merveille de soin et de patience !...

Sœur Marie de l’Immaculée Conception a brodé les manches de l’aube.

Sœur Marie de l’Enfant Jésus y participa surtout pour aider au travail de préparation – entr’autres elle piqua, à l’aiguille, tout le dessin de l’aube du Pape.

Remise des ornements au souverain pontife

11 septembre 1928

Extrait de la brochure « Xe Pèlerinage franciscain » - par Jeanne Ancelet Hustache.

« … Les négociations pour parvenir à la personne du Saint Père ont donc abouti. Le Père Zacharie a obtenu plus qu’il n’a demandé, souhaité même, puisqu’une audience privée lui est accordée avant la Messe du Saint Père et l’audience générale du Pèlerinage.

L’ornement est exposé dans la salle du Tronetto. Une main adroite a placé les diverses pièces sur des tables et des porte-chape, de telle sorte que tout soit mis en valeur. Par la petite porte, soudain l’émouvante présence blanche. Le Saint Père avait beau être prévenu, il ne pouvait soupçonner quel présent lui apportaient les pèlerins de France. Il est saisi par la noblesse de l’ensemble – ces couleurs harmonieuses parmi les ors qui châtoient – puis il regarde longuement chaque détail qu’il ne quitte qu’à regret pour le suivant. Il admire la solidité du dessin et la perfection du travail ; en même temps son érudition lui permet d’apprécier le patient labeur qu’a nécessité la documentation pour tant de scènes et de personnages historiques. Tout lui est cher dans cette œuvre : c’est un fils de St François qui en a eu l’idée pour glorifier le fondateur de son Ordre, et les filles de ste Claire qui l’ont exécutée, ont résumé en elle la magnifique épopée franciscaine. Or l’Ordre séraphique est, entre tous, près du cœur de Pie XI puisque, dit-il, bien avant d’être prêtre, il était déjà tertiaire franciscain.

Le Père Zacharie qui voit l’ornement apprécié comme il le mérite, ose exprimer un désir : cette aube, cette chasuble, cette étole, ne revêtiront-elles pas le Souverain Pontife quand il célèbrera sa Messe jubilaire ? Il lui est répondu : ‘l’idée du fils a devancé celle du Père »

Dès le soir « l’Osservatore Romano » consacre une colonne au pèlerinage et au don fait au Saint Père.

Le lendemain matin, mercredi 12 septembre, à sept heures et demie, le Souverain Pontife dira sa messe pour les pèlerins…

(12 septembre) Les ornements ont été déposés sur l’autel. Le Saint Père en est maintenant revêtu. Nous devinons de loin les sujets que nous avons tant de fois admirés, mais la salle est trop vaste pour que nous les distinguions nettement : la beauté de tous, la douceur des ors, seules, restent perceptibles à cette distance, elles ne l’ignoraient pas les merveilleuses artistes et pourtant, elles ont œuvré avec autant de soin et d’amour ce qui devait être fondu dans l’ensemble, pareilles à leurs frères en patient labeur, les Sculpteurs des cathédrales, qui ont apporté la même perfection aux fleurs et aux figures du porche et à celles du faîte, alors que celles-ci ne pouvaient plus être distinguées par les yeux humains…

(Le soir du même jour : audience des pèlerins)

Le Saint Père passe devant chacun de nous que le Père Zacharie lui présente. Un bon sourire éclaire la face vénérable à chaque nom nouveau : aucun en effet ne saurait lui être indifférent puisque nous sommes tous ses enfants. Quand vient le tour de l’aumônier de Mazamet (M. l’Abbé Gau), le Saint Père s’arrête plus longtemps et le charge de redire à l’Abbesse lointaine et à ses filles sa reconnaissance et sa paternelle affection.

… Le Saint Père a maintenant monté les degrés du trône. Il s’adresse à nous tous… Il remercie encore ceux qui sont venus lui apporter ces ornements dont il a voulu nous offrir, pour ainsi dire, les prémices, à cette Messe du matin… et il renouvelle la promesse de revêtir ces ornements, si Dieu lui accorde la grâce de célébrer sa Messe jubilaire.

            (ensuite bénédiction pontificale)

Après le retour en France, le Père Zacharie a reçu de son Eminence le Cardinal Gasparri, la lettre suivante :

Dal Vaticano, le 21 septembre 1928

Mon très Révérend Père,

            Le Souverain Pontife me confie le soin de vous redire par écrit les félicitations toutes paternelles ainsi que les sentiments de reconnaissance avec lesquels il a agréé l’hommage des ornements sacrés que, de concert avec les autres Provinces de France, vous lui avez présentés au cours de l’audience accordée aux pèlerins de l’Enseignement.

Sa Sainteté vous en remercie avec effusion de cœur, particulièrement heureux de voir dans cette magnifique offrande une manifestation de foi et de piété familiale qui l’a ému à double tirtre, car par ce travail d’une si grande richesse et d’un art si noble, vous avez voulu traduire votre dévouement sans réserve au Vicaire de Jésus-Christ, ainsi que le culte de votre reconnaissance filiale envers le Séraphique Père et envers la famille religieuse dont vous êtes les membres.

Vous ne pouviez sans doute pas donner au septième centenaire de votre Fondateur un relief qui en rappelât à l’avenir la date avec plus d’éloquent et fervent amour. Les filles de Sainte Claire ont bien mérité par là et de leur Ordre et du Père Commun : à vous donc, mon Révérend Père, comme à elles, Sa Sainteté dit avec bonheur combien Elle apprécie ce travail d’une si grande valeur historique et artistique, et combien elle admire l’amour, la patience et les talents qui l’ont amené à un achèvement si parfait.

C’est en vous donnant l’assurance de ces sentiments bien paternels et en formant pour tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce chef d’œuvre, les meilleurs vœux de sanctification personnelle et de toujours plus fervent apostolat, que le Souverain Pontife implore pour tous l’abondance des faveurs divines et envoie bien de cœur à vous-même et à tous vos religieux des Provinces de France, ainsi qu’aux filles de Sainte Claire qui ont été de si merveilleuses « apes argumentosae » une toute spéciale Bénédiction Apostolique.

Veuillez agréer, très Révérend Père, l’assurance de mon entier dévouement en Jésus-Christ.

                        Signé : Cardinal Gasparri

N. B. Il va de soi que Sa Sainteté remercie aussi de tout cœur pour l’hommage de l’Album[2] qui explique et reproduit avec d’admirables miniatures le merveilleux poème franciscain tissé sur les diverses parties des ornements. »

Le 27 juin 1929, la Communauté recevait le diplôme qu’on peut voir à l’entrée de la Salle de travail.

Qu’on veuille bien excuser s’il y a oubli sur ce qui est relatif aux participants à ce travail, c’est faute de documents et de mémoire !

[1] Père Zacharie du Couvent des Capucins de Carcassonne, principal intermédiaire en cours de travail de l’ornement – et qui, plus tard, l’exposa en diverses villes de France.

[2] Fait par Mère Marie de Jeanne d’Arc et Mère Marie de St Raphaël