Dossier d’aire d’étude IA66003547 | Réalisé par
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Présentation de la commune de Campôme
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Dossier non géolocalisé

Campôme de la Préhistoire au 13e siècle

L’installation des premiers habitants sur le territoire de Campôme remonte à la période préhistorique, principalement du Paléolithique Supérieur. En effet, un ensemble de gravures aux motifs géométriques, ainsi que des représentations animales composées d’oiseaux, d’isards et de bouquetins [BASE MERIMEE, 1992, Rocher gravé de Fornols] ont été mises au jour par l’archéologue Jean Abélanet le 9 Janvier 1983, lors d’une campagne de protection des vestiges mégalithiques localisés au plateau du Pla Valenço. La datation des gravures a été établie par Dominique Sacchi, alors chargé de recherche au C.N.R.S et spécialiste des civilisations du Paléolithique Supérieur en Languedoc-Roussillon [CAZES, Revue Conflent. Numéro 133, 1985, p.3]. L’affleurement schisteux qui conserve les gravures se trouve sur le lieu-dit de Fornols, non loin du Pla Valenço et en limite communale entre Campôme et Ria-Sirach. Les figurations laissent apparaitre des avant-trains et arrière-trains d’animaux, ainsi que des têtes de cervidés ou de capridés tournées dans des directions opposées. Il s’agit d’un ensemble de gravures découvertes dans un cadre exceptionnel, en raison de leur présence à l’air libre. De plus, ces dernières constituent les premières gravures Paléolithiques découvertes en Roussillon. Afin de les protéger, un classement au titre des Monuments Historiques a été établi par arrêté du 26 février 2008.

Jean Abélanet a également observé sur le site de Carmajó (771 m d’altitude) situé au Sud du village, des aménagements en terrasses et des murettes en pierre sèche, qui rappellent l’organisation d’un ancien oppidum. L’occupation du lieu pourrait correspondre à la fin du Néolithique ou à l’Age du Bronze, comme en témoigne la mise au jour de tessons de poterie modelée et de deux meules plates en granit [KOTARBA, CASTELLVI, MAZIERE, 2007, p.268].

Enfin, les vestiges archéologiques découverts sur le site de Paracolls lors de fouilles menées en 1989 en une seule campagne et plusieurs sondages, révèlent une occupation ancienne du lieu, très certainement dès l’époque préhistorique. En effet, plusieurs cupules sont présentes au niveau du socle granitique sur lequel le donjon est taillé, ainsi qu’une grande pierre plate à cupules sur le flanc Est, appuyée contre la paroi rocheuse et servant d’abri. Cette pierre pourrait avoir servi de table d’un dolmen, qui aurait pu se trouver à l’emplacement des vestiges du château [BAYROU, 2004, p.325]. L’occupation antique est également attestée, notamment avec la découverte d’un fragment de sigillée sud-gauloise. De plus, une colonne à chapiteau conservée à l’intérieur de l’enceinte et actuellement visible, serait probablement de facture romaine, comme l’atteste l’archéologue Pierre Alessandri, alors en charge des fouilles menées au 20e siècle.

Les sources historiques du 9e siècle évoquent l’existence d’un hameau sur le territoire de Campôme, identifié en 887 sous la dénomination « vilare crosellos » [BASSEDA, Revue Terra Nostra. Numéros 73 à 80, 1990, p.521]. Celle-ci aurait deux origines, notamment du latin « cruce » pour désigner une croix et le rajout du suffixe -ellus, qui se rapporte à de petites croix gravées sur des bornes ou des croisements de chemins. Le latin « crosus » suivit du suffixe -ellus, désigne quant à lui des petites cuvettes creusées par une rivière. Cette dernière origine est la plus probable, en raison de l’emplacement de l’actuel lieu-dit Crouells, développé de part et d’autre de la Castellane au Sud de Campôme. La première mention du village de Campôme date de 901, dont l’étymologie du nom « campus ultimus » traduite par « le champ le plus éloigné » [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.17], se réfère à la position géographique du territoire, alors rattaché à la seigneurie de Molitg-les-Bains. A cette époque, la vallée de la Castellane est divisée en territoires étendues, dont les « vilars » (petits hameaux) de Campolime et de Fornols, rattachés à la « villa » de Molitg [ALART, Notices historiques sur les communes du Roussillon, 1868, p.28].

Mentionné pour la première fois en 948 [ALESSANDRI, BAYROU, AAPO, 2001, p.57] sous la dénomination « castrum paracolis », le château de Paracolls, dont les ruines dominent l’ensemble thermal de Molitg-les-Bains, constitue l’un des plus anciens ensembles castraux répertoriés dans les Pyrénées-Orientales. Un réaménagement du château semble avoir été effectué au 11e siècle, sous la descendance de Guifred, comte de Cerdagne entre 1036 et 1095. De plus, le « castrum » de Paracolls est mentionné en 1094 dans le testament de Guillaume-Raymond, afin d’être légué à son fils du nom de Guillaume-Jordà [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.18]. En effet, les hameaux identifiés plus haut ainsi que le village de Campôme intégrés dans la vicomté de Fenouillèdes, sont compris au 11e siècle parmi les possessions des comtes de Cerdagne, dont Guifred, fils d’Oliba et fondateur de l’abbaye de Saint-Martin-du-Canigou. Au cours du siècle, Guifred fit la donation de son alleu de Campolime à sa fille Fides et du domaine de la « villa de Fornols » à son quatrième fils, du nom de Bernard [ALART, Bernard. Notices historiques sur les communes du Roussillon, 1868, p.30]. Les comtes exerçaient leur pouvoir auprès de la famille de Paracolls, dont Raymond-Bérenger de Paracols en 1102, qui fut l’un des premiers à se voir attribuer la fonction de vassal. En dehors du territoire de Molitg, les seigneurs de Paracolls exerçaient leur domination jusque dans les terres du Roussillon ainsi qu’en Cerdagne, tel que l’atteste un acte de vente de terrains à Angostrina daté du 13 septembre 1175. La famille resta feudataire du château jusqu’en 1250 [BAYROU, 2004, p.323]. Pour autant, le nom est gardé dans la toponymie locale, comme l’atteste la mention en 1260 du lieu de « Paracollibus » [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, p.521]. La famille de Fornols était par ailleurs elle-même vassale des Paracolls, malgré le placement du pouvoir de la seigneurie sous la suzeraineté des seigneurs de So, vicomtes d’Evol. Les écrits historiques indiquent les possessions de la famille de So dès le 13e siècle, dont quatre mas à Fornols [CAZES, Revue Conflent, 1993, p.22]. Par ailleurs, l’appellation du lieu-dit Pla Valenço situé au Sud de l’ancien hameau provient du nom de cette illustre famille.

La chapelle castrale de Paracolls dédiée à Saint-Pierre et implantée en retrait du château, apparaît seulement dans les textes en 1299 [ALART, Notices historiques sur les communes du Roussillon, 1868, p.31]. Toutefois, les relevés architecturaux effectués sur l’édifice en 1989 permettent d’identifier un style bien particulier, relatif au roman lombard tardif du 11e siècle.De plus, les fouilles réalisées en 1989 sur le site de Paracolls, ont permis de dégager des restes d’un vaisselier constitué de céramiques vernissées et glaçurées monochromes, de céramiques communes de cuisine et de céramiques polychromes du Levant Espagnol, témoignant d’une occupation relativement longue entre les 13e et 18e siècles [ALESSANDRI, BAYROU, AAPO, 2001, p.57]. Le mobilier mis au jour atteste des relations entre les fournisseurs français et catalans, liés à la position frontalière de Paracolls. En effet, le territoire de Campôme alors intégré dans la région du Fenouillèdes, appartenait jusqu’à présent au roi d’Aragon. Faisant suite à la signature du traité de Corbeil en 1258 entre Jacques Ier d’Aragon et le roi de France Louis IX, les terres du Fenouillèdes se rattachent à la couronne française, fixant ainsi la frontière au sud des communes de Rabouillet et de Sournia.

Campôme au 14e siècle

Les relations franco-catalanes demeurent au 14e siècle, notamment en 1305 où le château de Paracolls est cité parmi les propriétés de Jacques de Majorque. Celui-ci se chargea de nommer les châtelains, dont les Pons de Caramany jusqu’en 1340, puis les Tregura, les Vilanova et les Llupia, qui se voient attribuer le titre de barons de Paracolls [BAYROU, 2004, p.323].

La chapelle Saint-Christophe de Fornols, aussi appelée Saint-Christophe del Bosc (de la forêt) [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.18], située au Sud-Est de Campôme, n’est mentionnée dans les textes qu’à partir de 1341 [BAYROU, 2004, p.323]. Cette mention, paraît relativement tardive par rapport au style architectural de l’édifice. En effet, malgré l’important état de ruine dans lequel se trouve la chapelle actuellement, les quelques murs porteurs conservés sont massifs et ne présentent aucun percement susceptible d’apporter de la luminosité extérieure. Tout comme la chapelle Saint-Pierre de Paracolls, l’édifice présente des éléments architecturaux caractéristiques du 11e siècle, comme l’appareillage des murs porteurs conservés en moellons de schiste mêlés à des pierres équarris, ainsi que le traitement des chaînes d’angles harpées. Orientée Ouest-Est, la chapelle comprend une nef unique, terminée par une abside semi-circulaire. Quelques pans de murs subsistent encore, dont une partie de ceux de la nef, qui supportent un voûtement légèrement brisé caractéristique des constructions du 12e siècle [MALLET, 2003, p.191]. Une grande partie de l’édifice s’est effondrée, notamment les murs développés au Nord-Ouest. La partie occidentale présente à l’intérieur des traces d’enduit de ciment, ainsi que les restes d’un encadrement en plein cintre, comprenant des claveaux de granit. L’entrée s’effectuait au niveau du mur méridional, dont il ne reste plus que le montant occidental en pierres de schistes. Ce dernier s’apparente à un départ de voûte, renforcée par un rang de pierres équarries en schiste.

Le clocher-mur, ajouté entre les 13e et 14e siècles au-dessus de la façade occidentale, conserve un arc unique en plein cintre légèrement outrepassé, constitué d’un arceau de plaques de schiste. Le granit a été employé en pierre de taille pour la clé de l’encadrement, ainsi que pour l’un des montants du clocher. Par ailleurs, l’appareil des bas-côtés est en opus mixtum, avec une alternance de pierres équarries et de lloses en schiste. La toiture de la chapelle s’est effondrée en très grande partie dans les années 1960. Toutefois, un tronçon de voûte encore conservé se distingue par un appareil d’origine en schiste, dont les pierres ont été posées de champ. Un creusement circulaire visible dans l’intrados de la voûte, matérialise probablement l’emplacement d’un ancien vase en céramique. Ces derniers ont très bien pu être utilisés pour améliorer l’acoustique de l’édifice.Cette originalité architecturale se retrouve dans des églises aux dimensions relativement modestes, comme c’est le cas pour l’église de Saint-André (vieille) de Baillestavy. En dehors de l’acoustique, les pots pouvaient être employés pour recevoir le croisillon de suspension des lampes de dévotion [CAZES, 1993, p.21]. Plusieurs traces d’enduit au ciment sont visibles sur les murs, notamment à l’intérieur de la nef. Probablement issus de restaurations non achevées, ces traces devaient recouvrir intégralement la maçonnerie. Elles ont par ailleurs été appliquées au niveau du soubassement de l’abside, qui a vraisemblablement été reconstruit postérieurement.

Les premières données concernant le recensement de la population sont connues dès le 14e siècle, grâce à l’étude des fogatges. Le fogatge est réparti en fonction des « feux » (foyers), dont il semblerait qu’un « feu » pouvait comprendre jusqu’à 5 maisons ou familles [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, p.7]. En 1319, Campôme compte ainsi 8 feux, soit un peu plus de 40 habitants. Le lieu-dit de Fornols apparaît également relativement tôt dans les recensements de la période moyenâgeuse. En effet, 7 feux sont dénombrés entre 1365 et 1370. La population du castrum de Paracolls est quant à elle comptabilisée au côté de celle du hameau de Coma (ancien franc-alleu qui comprenait le village d’Eus et la vallée de Molitg), avec 36 feux [[BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 16 et 17]. De 1378 à 1385, la population se stabilise avec 8 feux à Campôme, 5 feux à Fornols et 4 à Cruells [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 18, 19 et 23]. Cette dernière localité correspond à l’actuelle lieu-dit de Croueill, dont l’habitat semble s’être très tôt formé.

Campôme du 16e siècle au 18e siècle

Aucune donnée démographique n’est actuellement connue pour le 15e siècle, sans doute en raison des ravages causés par les épidémies de peste. Les feux mentionnés seulement au 16e siècle, font état de 4 familles à Campôme et d’un foyer au hameau de Cruells [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, p.29]. Ce dernier est indiqué pour la dernière fois dans les textes entre 1694 et 1696, avec la mention d’une unique maison. L’absence de données pour le lieu-dit de Fornols, témoigne de son abandon progressif entre la fin du 14e siècle et le 15e siècle.

L’église Sainte-Marie ou église de la Nativité de Notre-Dame située dans le village de Campôme, fut construite en 1671, comme l’atteste la date gravée dans la pierre, de part et d’autre de la porte d’entrée. L’existence d’un premier édifice n’est pas mentionnée puisque la commune dépendait jusqu’à présent de la paroisse de Molitg-les-Bains [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.17]. L’église à nef unique, est constituée d’un clocher-mur sur la façade d’entrée et est terminé par un chevet plat flanqué d’un clocher-tour. Un oculus entouré d’un rang de pierres de schiste, surmonte l’entrée principale. Le parvis de l’église a la particularité d’être pavé de galets, formant une croix et laissant difficilement apparaître une date (19e siècle ?). Le clocher-mur est percé par deux ouvertures oblongues en plein cintre, abritant chacune une cloche en bronze. La partie sommitale est à deux pentes et comprend au niveau du faîte une croix en fer forgé.

A cette époque, la chapelle Saint-Christophe de Fornols reste également rattachée à Molitg. L’édifice est cité plusieurs fois, notamment en 1632 et 1688 [PONSICH, Revue Terra Nostra, Numéro 37, 1980, p.97]. C’est à cette dernière date qu’il apparaît sous le nom « hermita de Sant Christofol de Furnols », témoignant de sa transformation en ermitage. Cette reconversion laisse supposer que le hameau de Fornols était déjà abandonné par les habitants [MALLET, 2003, p.190]. (lié aux épidémies de peste du 14e siècle ?). A partir du 18e siècle, la paroisse de Molitg-Campôme se rend en procession à l’ermitage de Saint-Christophe, afin d’y célébrer la messe, les complies et les vêpres [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.18]. C’est au cours de cette période que l’ermitage est abandonné, à la suite des lois anticléricales promulguées au cours de la révolution française. Par ailleurs, un écrit de 1738 évoque l’envoi d’une lettre au Monseigneur évêque de l’époque par la paroisse de Molitg, pour « éjecter l’ermite de l’ermitage de Fórnols » (traduit du catalan per traura lo hermita de la ermita de Furnuls) [CAZES, Revue Conflent, 1993, p.22].

Dans la troisième moitié du 18e siècle, les feux recensés sur la commune de Campôme sont rattachés dans un premier temps à ceux de Molitg. En effet, le territoire ne jouit pas encore d’une autonomie administrative complète. Un total de 60 feux est ainsi dénombré pour ces deux communes en 1740. La population passe par la suite à 807 habitants en 1787 et 697 habitants en 1791 [[BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, pp. 42, 48 et 49]. L’état du nombre des familles indigentes de la paroisse de Molitg et Campôme daté du 21 avril 1790, fait mention de 30 familles en situation économique difficile [CAZES, Revue Conflent, 1993, p.28]. En effet, les conditions de vie restent complexes, en raison de la rudesse du climat et de l’isolement géographique. Rédigé par le curé Escape, le document souligne que « dans l’hiver, lorsqu’il fait 3 ou 4 jours de mauvais temps, il y a pour le moins dans la paroisse 20 familles de plus réduites à la dure nécessitée de mendier ». De plus, le nombre d’indigents est susceptible d’augmenter (environ 200) avec la présence des passants, étant donné que « la paroisse se trouve sur le chemin du Languedoc », ancienne voie de communication autrefois suivi par les troupeaux de moutons. A cette époque, l’accès aux soins reste limité. Toutefois, il était possible aux habitants de Campôme et notamment les indigents, de prendre gratuitement les eaux de l’établissement thermal de Molitg. Ce dernier, construit en 1785 sous l’impulsion du marquis de Llupia, propriétaire du site et seigneur de Molitg, est en effet édifié à l’emplacement de sources dont les propriétés thérapeutiques sont reconnues depuis l’époque médiévale [ANGLADA, Traité des eaux minérales et des établissements thermaux du département des Pyrénées-Orientales, 1833, Tome 1, p.240].

Sous la révolution française, Campôme devient une commune à part entière, comme l’atteste les recensements de la fin du 18e siècle (296 habitants entre 1792 et 1793, 301 habitants entre 1798 et 1799 [CAZES, Revue Conflent, 1993, pp.50 et 52]). De plus, le château de Paracolls et son hameau sont désormais compris au sein du territoire communal [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, p.521]. Par ailleurs, c’est à cette époque que le nom de la commune est francisé, avec l’ajout d’un accent circonflexe sur le « o » tonique. À la suite de la période révolutionnaire, le découpage du territoire communal entraîna plusieurs tensions entre localités, notamment en 1791. Le 13 mars de la même année, les habitants de Campôme sont attaqués par les habitants de Molitg ; afin d’y remédier, les Campômois sont aidés de 100 hommes de Mosset, qui avec leurs 12 fusils, réussirent à faire fuir les Molitjaires [SARDA, 2000, p.10]. De plus, le Directoire du District de Prades annonce le 9 juin 1792 que l’entretien d’un des ponts qui sépare Molitg à Campôme, sera désormais à la charge de Campôme, étant donné qu’il « n’a pas pu obliger la municipalité de Molitg à continuer à entretenir le pont sur la rivière qui sépare les deux communes car elle ne retire aujourd’hui aucun avantage ». En effet, il semblerait que la fréquentation du pont soit particulièrement concernée par la population de Campôme. Enfin, la nouvelle délimitation territoriale ne prend pas en compte la forge dite de Campôme active entre les 15e et 19e siècles [NOËLL, 1996] et située sur la commune de Mosset, pourtant rattachée historiquement au territoire étudié dans ce diagnostic. A la fin de l’époque moderne, l’église Sainte-Marie de Campôme est agrandie, avec l’adjonction de deux chapelles latérales, dont la méridionale en 1760 [CAZES, Revue Conflent, 1993, p.15]. Le 8 décembre de la même année, la chapelle ainsi que l’autel de Saint-Isidore reçoivent leur bénédiction d’affectation au culte, par le curé de Molitg.

Campôme au 19e siècle

Le clocher-tour de l’église Sainte-Marie fut construit en 1858 [CAZES, Revue Conflent, 1969, p.18], grâce à des contributions pécuniaires ainsi que divers travaux d’hommes et d’animaux (mulets ou bœufs) [SARDA, 2000, p.12]. Ces contributions ont été rendues possible grâce à plusieurs membres de familles originaires de Campôme, dont les noms ont été inscrits sur les pierres du clocher. Parmi les noms des familles citées dans les archives de la commune conservées aux archives départementales, figurent les Lavila, Laguerre, Cassoly, Sarda, Porra, Vergès, Signé ou encore Rousse. Au total, 65 signatures ont pu être recueillies pour la construction du clocher [A.D.P.O. 2 Op 624]. Le coût global de cette partie de l’église est à l’époque estimé à 2 730 francs, dont 1 589 francs ont pu être obtenus par souscription [SARDA, 2000, p.12].

De plan carré et agencé sur quatre niveaux, le clocher-tour vient flanquer le chevet plat. Il se distingue par la présence de trois fines ouvertures quadrangulaires sur la face Nord-Ouest. Le dernier niveau séparé des précédents par un bandeau en brique locale, est percé d’ouvertures en plein cintre à encadrement de cayrous. Sur l’une de ces ouvertures (face Ouest) se trouve un cadran d’horloge daté de 1867, remplaçant celui qui avait été installé en 1859. L’horloge permettait de donner une heure précise pour les temps d’arrosage, notamment pour le partage des eaux des canaux d’irrigation. Enfin, le clocher est surmonté d’un couronnement en briques rouges, dont les formes rappellent des denticules décoratifs. La terrasse supérieure comprend en son centre un campanile en fer forgé, abritant deux cloches. L’intérieur de l’église conserve à l’Ouest de l’entrée un escalier balancé, à rampe débillardée sur bois, marches en brique et nez de marche en bois. Cet escalier permet d’accéder à une tribune à rambarde sculptée en bois. Un espace aménagé dans le mur Est de la nef pourrait correspondre à un ancien débarras ou pièce de stockage de matériel (agricole ?). Le sol est en terre battue et les murs sont maçonnés en moellons de granit. L’espace conserve une toiture caractéristique des bâtiments agricoles, avec une toiture en appentis maintenue par des solives en bois. L’accès à la sacristie s’effectue au Nord-Est, par une porte constituée de panneaux taillés en pointe de diamant. Cet espace comprend une niche en plein cintre creusée et éclairée par une fenêtre centrale, ainsi qu’un ancien évier taillé dans du granit. La sacristie conserve également l’ancien mécanisme de l’horloge en métal. En dehors de la pièce aménagée à droite de l’entrée principale, tous les plafonds et murs sont recouverts par un enduit. Les retables sont en bon état de conservation mais restent menacés par des infiltrations d’eau, notamment au niveau du retable du Christ.

L’analyse démographique du 19e siècle permet de constater une augmentation progressive de la population, par rapport au siècle dernier. Plus de 300 habitants sont ainsi comptabilisés entre 1806 et 1861, avec un pic de 365 habitants en 1836 [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, p.59]. Le 19e siècle est également marqué par un épisode pluvieux intense, causant la destruction en 1814 de nombreuses terres, ainsi que d’un ancien pont, qui permettait d’accéder aux terres agricoles de la rive gauche de la Castellane. Le pont a donc été reconstruit entre 1817 et 1819, à la demande de la commune de Campôme.

Le taux d’illettrisme étant très important à cette époque, la nécessité de scolariser les enfants s’est avérée primordiale. Un premier instituteur est nommé en 1812 (Etienne Castre, de Mosset), mais aucun bâtiment scolaire municipal n’est prévu pour la tenue des classes. Jusqu’à la fin du 19e siècle, l’école se tient dans des maisons, dont l’une d’entre elles aurait été une école privée tenue par des sœurs vers 1870 [SARDA, 2000, p.19]. La décision de construire un bâtiment scolaire est actée en 1879, afin d’accueillir 60 élèves et d’intégrer une salle de mairie. Un devis descriptif dressé le 22 Janvier 1879 par un ingénieur civil du nom de Mamon, prévoit la construction de la nouvelle école sur un terrain échelonné en gradins sur la rive droite de la Castellane. Il est également fait mention de cours, prévues d’être « exposées au Midi et toujours en plein soleil » [A.D.P.O. 2 Op 623]. Les travaux de réalisation de l’école ont été confiés à l’entrepreneur François Bourreil, originaire de Catllar. L’ensemble est édifié en 1882, sur un terrain acheté aux familles Combaut et Fabre, pour la somme de 15 496 francs et 40 centimes [SARDA, 2000, p.19].

Enfin, c’est au 19e siècle qu’est amorcé le désenclavement de la vallée de la Castellane, jusqu’à présent accessible par l’ancien chemin royal de Prades, qui passait à Catllar et suivait le long de la rivière principale. En 1878, une nouvelle voie est tracée de Prades jusqu’à Mosset et facilite ainsi l’accès au village de Campôme. La voie est prolongée en 1892, afin de pouvoir accéder plus facilement au Col de Jau [SARDA, 2000, p.14].

Campôme du 20e siècle à nos jours

Au 20e siècle, plusieurs travaux sont effectués sur l’école, dont l’exhaussement d’une partie du local scolaire existant, pour l’aménagement du maître. Un premier étage sera donc construit en 1907, au niveau du corps de bâtiment principal [A.D.P.O. 2 Op 623]. De plus, le rez-de-chaussée qui comprenait des caves, est réaménagé afin d’installer une cuisine avec cheminée et une salle à manger pour l’instituteur. Quatre chambres sont intégrées au premier étage, dont deux seront chauffées. Les travaux réalisés sous la conduite d’un architecte de Prades (Jourda ?), ont également consisté à refaire la toiture de la salle de classe avec les matériaux d’origine, ainsi qu’à installer une canalisation avec tuyaux en fonte pour alimenter une borne fontaine placée dans la cour de l’école (existante ?). Par ailleurs, le canal d’arrosage présent derrière l’édifice permettait d’arroser des « lieux d’aisances » (cours ?). En 1930, des travaux sont à nouveau menés, dont le remplacement du plancher en 1930 et très certainement l’adjonction de l’aile Ouest. L’architecture de l’école-mairie est marquée par un traitement néoclassique des volumes et des baies des façades. En effet, l’édifice comprend un corps principal de bâtiment à sous-sol, rez-de-chaussée, étage carré et comble, ainsi que deux ailes en rez-de-chaussée qui l’encadrent de part et d’autre. Les ouvertures sont pour la plupart ordonnancées et se composent d’un arc surbaissé enduit à crossettes.

La baisse démographique à Campôme amorcée à la fin du 19e siècle, n’a pas cessé de progresser tout au long du 20e siècle. En effet, l’exode rural et montagnard entraine des déplacements importants de populations vers les plaines, qui délaissent les campagnes reculées. Ainsi, 276 habitants seront recensés en 1901, 206 en 1921, 131 en 1936, 146 en 1946 et 104 habitants en 1968 [BATLLE, GUAL, Revue Terra Nostra, Numéro 11, 1973, p.59]. Cette diminution est également expliquée par l’impacts des guerres successives, qui n’ont pas épargné la population du monde rural.

Pour autant, le 20e siècle est marqué par plusieurs projets de modernisation, dont l’aménagement des axes routiers. En effet, la jonction routière située entre l’église Sainte-Marie et l’intersection de l’entrée du village (actuelle D14A), est aménagée en 1910 par le département [SARDA, 2000, p.15]. De plus, l’ancien chemin de Mosset est restructuré à la fin des années 1920 (actuelle route de Brèzes), afin de relier le village au Sud du village de Mosset. Ces travaux sont accompagnés d’une modernisation des réseaux, dont l’installation du réseau électrique en 1929 de l’éclairage public en 1930 et l’adduction d’eau potable en 1959.

Jusqu’à la fin du 20e siècle, la population vivait essentiellement de l’agriculture, grâce aux jardins individuels qui permettaient de s’alimenter en fruits et légumes. Les pommes de terre, ainsi que les choux et les haricots blancs sont alors les légumes les plus consommés. Les aliments essentiels tels que les épices, sel et café étaient stockés dans les épiceries, dont celle de la famille Cassoly (fermée après la seconde guerre mondiale) et celle de Léontine Salies, qui resta ouverte jusqu’en 1968 [SARDA, 2000, p.24]. La charcuterie est bien présente dans l’alimentation ; les cochons familiaux sont nombreux et font l’objet chaque année d’une fête traditionnelle « al matança dal porc » (tuaille du cochon), qui consistait à abattre les animaux pour ensuite préparer divers repas culinaires (saucissons, boudins, pâtés, etc.). Le vin était également de production locale, avec des vignes étendues entre le lieu-dit de Falgueres et le plateau de Fournous. De plus, plusieurs champs d’oliviers sont à cette époque cultivés, notamment aux lieux-dits de Paracolls et de Croells. Cueillies en Septembre puis séchées au cours de la période hivernale, les olives étaient pressées dans les moulins d’Ille-sur-Têt ou de Millas, afin d’obtenir de l’huile. Cette production continua d’être exercée jusqu’à la fin des années 1960. Les arbres fruitiers ont été plantés tardivement, dont les pommiers vers 1930 et les abricots du Roussillon après la seconde guerre mondiale. En essor dans les années 1960, la culture de la pêche fut une production dominante du territoire. L’ensemble de cette production était acheminé vers la coopérative fruitière de Catllar, active jusqu’aux années 1990.Enfin, l’économie locale était surtout marquée par la production de céréales (blé et seigle principalement), implantées sur les collines, notamment au plus près des cortals. Cette activité allait de pair avec l’élevage, notamment de caprins et ovins dès le début du 19e siècle . Au Printemps, les chèvres partaient en transhumance jusque dans les hauteurs de Mosset (Col de Jau). Le village possédait également plusieurs troupeaux de vaches, dont la production de lait constituait un complément économique non négligeable auprès des plus pauvres.

Selon le recensement de la population en vigueur à compter du 1er janvier 2020, la commune de Campôme fait état de 115 habitants [INSEE, décembre 2019, p.10]. En diminution nette depuis les années 1990 (121 personnes recensées), la démographie s’est toutefois stabilisée au 21e siècle, avec une petite augmentation au cours des dernières années (106 en 2007, 113 en 2012 et 111 en 2017) [INSEE]. La population est essentiellement vieillissante, comme l’atteste les données de 2017 faisant état de 22,5% des 60 à 74 ans, contre 12,6% des 30 à 44 ans, 18,9% des 15 à 29 ans et 7,2 % des 0 à 14 ans. Cependant, la part d’adulte compris entre 45 et 59 ans reste supérieure, avec 25,2% [INSEE, 2017]. Enfin, la part des ménages étudiée selon la catégorie socioprofessionnelle des habitants, est majoritairement constituée de retraités (45,5%), suivie des professions intermédiaires tels que ceux relatifs à la santé, l’enseignement et le travail social (27,3%). Les artisans commerçants et chefs d’entreprises représentent 18,2% et les agriculteurs exploitants une faible part, estimée à 9,1% en 2017 [INSEE, 2017].

LE CADRE NATUREL

Caractéristiques paysagères et hydrauliques

Le territoire de Campôme d’une superficie de 526 hectares, s’étend le long de la rive droite de la rivière de la Castellane. Avec une altitude comprise entre 357 mètres et 1120 mètres, il est délimité par les communes de Mosset au Nord-Ouest, Molitg-les-Bains à l’Est, Catllar au Sud-Est et enfin Ria-Sirach à l’extrémité Sud. Le plateau de Fornols qui doit son nom à la chapelle Saint-Christophe de Fornols, constitue une grande partie méridionale du territoire. La vallée de la Castellane s’étend jusque dans les hauteurs de Mosset, au niveau du Col de Jau (1506 m), éminence géologique constituant la limite géographique entre les départements des Pyrénées-Orientales et de l’Aude. Le paysage est formé par une végétation essentiellement méditerranéenne, constituée de chênes verts, de cistes, ou encore de pieds de lavandes non loin de Paracolls. Quelques châtaigniers sont présents en bordure de cours d’eau, au côté de cyprès plantés par l’homme. Les hauteurs de Campôme sont marquées par l’implantation de conifères, qui contrastent avec le paysage aride des plateaux développés au lieu-dit de Fornols. Toute la vallée de Campôme est traversée par la rivière de la Castellane (Castellana en Catalan), qui portait autrefois plusieurs noms, dont ceux de Kastelan au 14e siècle et de Castelar au 16e siècle. Ce cours d’eau qui prend sa source au niveau du Pic du Bernard Sauvage (2412 m) et du flanc Est du Pic du Madres (2469 m), se jette dans le fleuve de la Têt, non loin de la commune de Catllar. Étendu sur 27 km de long, il permet l’irrigation de nombreuses terres des territoires de Campôme, Mosset, Molitg-les-Bains et de Catllar.

De nombreux correcs (ravins) alimentent en eau la Castellane, dont ceux de Fornollica depuis Fornols ainsi que del Solà et de la Serrania, qui prennent leur source sur le territoire de Mosset. Actuellement, le territoire agricole d’une superficie d’environ 60 hectares, se compose principalement d’arbres fruitiers, dont les pêchers et les pommiers. Enfin, la commune de Campôme est traversée par la route de la Castellane (D14), axe sinueux suivant une partie de la Castellane et reliant les communes de Catllar et de Mosset, en direction du Col de Jau.

Plusieurs canaux d’irrigation traversent le territoire de Campôme, dont celui identifié sur le cadastre napoléonien sous le nom de « canal d’arrosage ». En effet, ce dernier permet d’arroser une grande partie des terres situées à l’Ouest du village. Le canal comprend une digue à revêtement en béton de ciment et présente des parties creusées dans la roche existante. Outre l’arrosage des terres, le canal alimente les fontaines du village , dont celle construite sur la Place (dite « la Pile ») et la fontaine d’en Paroll. La fontaine de « la Pile » située à l’angle des rues de la Fontaine et de la Tramontane et considérée comme la fontaine publique du village, fut probablement édifiée dans la dernière moitié du 19e siècle. Elle n’apparaît pas sur le cadastre napoléonien mais est projetée sur un plan daté de 1879, qui indique un nouvel aménagement hydraulique. Le volume d’eau de cette fontaine étant insuffisant pour répondre aux besoins de la population, il a été décidé en conseil municipal de capter les eaux de deux sources, qui se trouvaient sur le terrain d’un certain Laguerre Pierre. Ces sources ont donc été conduites dans le canal au moyen de drainages en pierres sèches, creusés dans le tuf granitique.Entièrement réalisée en pierre de taille (schiste), la fontaine publique comprend trois bassins, dont deux latéraux de petite taille. Cet élément du patrimoine vernaculaire est probablement l’une des plus anciennes fontaines, qui alimentait en eau les habitants et servait également d’abreuvoir.

La fontaine d’en Paroll a quant à elle été construite en 1933, comme l’indique la date gravée dans la borne bétonnée. Celle-ci s’ouvre sur un grand bassin longitudinal, lui-même terminé par un petit bassin quadrangulaire. Deux robinets en fonte sont visibles, dont celui de la borne (principal) et un robinet de trop-plein à l’arrière du grand bassin.

Un second canal d’irrigation parcourt les terres de Campôme, au niveau du lieu-dit El Menat. La portion reste minime par rapport au reste du parcours ce dernier s’étend essentiellement sur tout l’Ouest de Mosset, ainsi que sur les terres de Molitg. Le canal est mentionné sur le cadastre de Mosset (1811), avec la dénomination « ruisseau d’arrosage de Molitg ». Il s’agit de l’ancien canal de Mosset, dont un premier aménagement a été réalisé en 1300, à la suite de l’autorisation du seigneur du lieu d’utiliser « les eaux de la rivière de Kastelan, pour l’arrosage (des) terres », accordée auprès des habitants de Mosset, Molitg et Campôme. Cette description permet de connaître la prise d’eau du canal, au niveau de la rivière de la Castellane. L’emplacement est modifié vers 1818 dans les hauteurs du village de Mosset, afin de renforcer structurellement la digue du canal. Cette nouvelle construction réalisée pour la somme de 1667 francs, permettait ainsi au 19e siècle d’arroser environ 235 journaux de terres (8356 ares) sur les terroirs de Campôme et de Molitg.

La commune de Campôme conserve les vestiges de deux moulins à farine à fonctionnement hydraulique, dont la documentation reste succincte. Celui localisé au lieu-dit Crouete est le plus mentionné dans les textes, notamment dans l’état des moulins à farine du Conflent dressé en 1741. Le document évoque la fonction du moulin, qui appartenait à un avocat de Prades du nom de Nicolas Saletas. Par ailleurs, l’activité du moulin pouvait lui rapporter annuellement 80 livres [ROSENSTEIN, Revue Conflent, 1989, p.34]. Le nom du propriétaire est à nouveau indiqué en 1799, dans un procès-verbal de visite des usines et cours d’eau en date du 1er septembre de la même année. Ce dernier indique que le moulin conservait deux meules pour le fonctionnement hydraulique [Inventaire des forges et moulins de l’an VII, (en ligne) mise à jour le 13/02/2018]. Le document précise également que la prise d’eau est sans digue et sur une distance de 208 mètres. L’édifice apparaît également dans une délibération municipale en date de 1819, qui indique le moulin en tant que « seul écart » (…), éloigné de moins d’un quart de lieu » [SARDA, 2000, p.9]. Actuellement constitué de trois corps de bâti, le moulin bénéficiait de la force hydraulique du canal de Mosset, plus particulièrement d’une branche aménagée au Nord de Campôme. Le bâtiment principal de plan quadrangulaire et construit sur une terrasse alluviale, comprend un sous-sol, un rez-de-chaussée, ainsi que deux niveaux supérieurs (dont les combles). L’ensemble a été transformé en maison d’habitation, avec une réfection complète des façades au 20e siècle. Tout le sous-sol de l’édifice abritait l’ancien mécanisme du moulin, comme l’atteste la présence de deux sorties d’eau voûtées en plein cintre, avec un encadrement constitué de pierres de granit posées de champ. Celles-ci sont visibles en façade Sud, plus haute que celle orientée au Nord.

Le second moulin situé en aval du précèdent, a certainement été construit à la fin du 19e siècle, à la suite de la décision du conseil municipal de Campôme prise en 1823, visant à « éviter le monopole de Jean Signé ». Ce dernier était en effet le propriétaire du moulin à farine déjà existant depuis le 18e siècle. Un ancien chemin dit « chemin des moulins » permettait de relier les deux édifices. La portion de la D14A appelée « chemin du moulin » garde par ailleurs le souvenir de ce passage. Probablement construit à l’emplacement d’une ancienne forge, le moulin est tenu dans la première moitié du 20e siècle par M. Buscail (ancien poilu mort à la guerre de 1914-1918), puis par Joseph Gondral, maire de Campôme de 1948 à 1965. Ce dernier entrepris la reconversion du moulin en scierie , qui fonctionna jusque dans les années 1960. Depuis la fin du 20e siècle, le bâtiment est une propriété privée appartenant à la famille Lesire-Borrut. Le moulin à farine recevait l’énergie hydraulique à travers un canal de dérivation encore partiellement conservé. Ce dernier est en effet creusé artificiellement dans le terrain et protégé par une digue en pierres sèches. La prise d’eau certainement située en amont du moulin, est actuellement difficile à identifier en raison de l’abondante végétation présente sur le site. Deux corps de bâtiment de forme quadrangulaire composent le moulin. Le plus ancien comprend en façade principale (Est) deux voûtes en plein cintre à arceaux en granit, pour l’évacuation de l’eau du conduit d’amenée. Les niveaux supérieurs sont formés du rez-de-chaussée, accessible par une large porte en bois à arc surbaissé et d’un étage supérieur. Le second bâtiment étagé sur trois niveaux, est une adjonction au bâti principal construit en 1959.

Patrimoine vernaculaire : constructions en pierres sèches

Campôme est un village de moyenne montagne essentiellement agricole, qui vivait principalement de la culture de la vigne et de l’olivier jusqu’au 20e siècle. L’éloignement des terrains cultivés par rapport aux maisons d’habitations a nécessité la construction de cabanes en pierres sèches, afin de servir d’abris pour les agriculteurs. Celles-ci ont été édifiées dans des zones autrefois arides, comme c’est le cas de toute la partie Sud du territoire appelée Fournoux (cadastre napoléonien) ou Fornols, située non loin de la chapelle Saint-Christophe et reboisée par des cèdres et des pins. Certaines cabanes identifiées dans ce diagnostic, ont fait l’objet d’une fiche descriptive sur la plateforme participative Wikipedra [Wikipedra, Constructions en pierres sèches, Fiches de cabanes (3) : 10/12/2019 (PRATS, Michel)], destinée au recensement des constructions en pierres sèches. Relativement en bon état de conservation malgré l’effondrement du toit de l’une d’entre elles, leur organisation est identique. En effet, elles ont toutes été bâties selon un plan circulaire, avec un voûtement en encorbellement. Les blocs en moyen et grand appareil généralement constitués de schiste, sont équarris et reposent les uns sur les autres, en laissant des interstices comblés à l’aide de petits moellons. Aucune adjonction de mortier est réalisée, d’où l’emploi systématique de cette technique ancestrale, qui permet de faire perdurer l’état de conservation des cabanes. Ces cabanes aux dimensions relativement réduites, sont construites contre un mur de terrasse et pour certaines d’entre elles sur un affleurement rocheux, afin de renforcer leur stabilité. L’ouverture est orientée au Sud, avec un linteau formé d’une grande dalle horizontale. De manière générale, l’espace intérieur comprend des éléments rudimentaires, dont des petites banquettes en pierres, autrefois utilisées en tant que siège ou couchette. Les cabanes les plus sophistiquées sont percées de niches quadrangulaires aménagées en partie inférieure, qui avaient la fonction de « celler » pour la conservation de bouteilles de vin à température ambiante.

En dehors des cabanes en pierre sèche, le territoire de Campôme est marqué par la présence d’ancien cortals, qui sont des bâtiments destinés à l’élevage et utilisés pour abriter les animaux [BASSEDA, Revue Terra Nostra, Numéros 73 à 80, 1990, p.73]. Le mot « cort » en latin peut en effet désigner une cour, une étable ou encore une bergerie. De plus, le suffixe -ale se rapporte à l’existence d’un réduit pour le bétail.

Le cadastre napoléonien de 1811 projette l’emplacement de deux cortals (« Fournoux Bas Cortal » et Fournoux Haut Cortal »), situés non loin de la chapelle Saint-Christophe. Ceux-ci n’ont pas disparu (cadastre : 0B 26 et 18) mais sont actuellement en état de ruine. Les études sur ce type de construction réalisées par l’archéologue Anny de Pous dans les années 1960, attestent de l’existence des cortals dès l’époque médiévale [CAZES, Revue Conflent, Numéro 21, 1964, pp.103-114]. Ceux de Fornols sont difficilement datables, en raison de leur très mauvais état de conservation et de l’absence de mention avant le 19e siècle. Selon Anny de Pous, le cortal désigne un bâtiment à vocation agricole, comprenant une armature formée par des piliers de pierres [CAZES, Revue Conflent, Numéro 21, 1964, pp.103-114]. En effet, les cortals en ruine identifiés à proximité de la chapelle de Fornols conservent en leur centre un pilier quadrangulaire, qui devait très certainement maintenir la toiture développée en appentis. Leur fonction et typologie est à différencier de celle des cabanes en pierres sèches ou orris (zones de moyenne à haute montagne). Ces derniers sont en effets des constructions qui permettaient au berger de conserver le lait et les fromages [Parc naturel régional des Pyrénées-Catalanes, Cahier pratique du Parc, Mai 2004, p.32]. Des couloirs de traite ainsi que des enclos composent ainsi le paysage pastoral. Les constructions en pierres sèches pouvaient également servir d’abri dans le cadre de la viticulture, comme c’est le cas des cabanes conservées sur le territoire de Campôme. Les cortals étaient donc des bergeries relativement grandes, qui réunissaient les animaux avant et après les estives. Ils comportaient généralement deux niveaux ; le rez-de-chaussée servait à abriter le bétail, tandis que l’étage supérieur à stocker le fourrage.

Matériaux de construction

Les matériaux employés pour le bâti de Campôme sont essentiellement des pierres d’extraction locale, tels que les moellons de granit et de schiste. Campôme a la particularité de présenter une géomorphologie contrastée, avec des maisons d’habitations construites sur un tuf granitique rocheux. Le granit présent sur le territoire est le même que celui observé plus au Nord, sur le massif granitique de Quérigut-Millas. De plus, toute la zone Sud est constituée de schistes tachetés et cornéennes, qui sont des roches métamorphiques en contact avec le granit [LAUMONIER, A.A.P-O, 2005, p.485]. Le schiste apparaît très tôt dans la construction locale, notamment dans les édifices romans repérés sur le terrain. C’est une roche qui se délite en feuillets, utilisée à joints secs (cabanes en pierres sèches) ou avec du mortier de hourdage à base de terre. La chapelle Saint-Christophe de Fornols présente une maçonnerie essentiellement composée de blocs de schistes, encore mêlés par endroits avec un mortier de hourdage de terre. Fragilisée par les agressions climatiques, la maçonnerie a été reprise, avec un comblement des joints à la chaux et le recouvrement de l’appareil par un enduit de ciment.

Les dépendances agricoles observées au village ont des maçonneries rustiques, avec des moellons de granit qui restent plus ou moins apparents. Afin de protéger le parement, les joints à la chaux sont « beurrés », en laissant simplement apparaître les pierres qui dépassent. Par ailleurs, ce type de construction comporte des ouvertures très peu modifiées, dans le cas où il n’y a pas eu de reconversion en habitation. C’est le cas de la grange située au n°1 rue de la Tramontane (0A 83), qui conserve son linteau droit en bois d’origine. Les maisons d’habitations ont également des murs montés intégralement en moellons, avec des chaînes d’angle de gros moellons équarris. Au cours des dernières années, des réfections de façades ont été faites, avec une reprise du mortier de chaux (annexes 20 et 21). Entre les années 1945 et 1950, de nombreuses façades ont été recouvertes de crépi afin d’assurer une étanchéité des murs [SARDA, 2000, p.21]. L’habitation n°23 de la Place (0A 56) possède une façade principale entièrement crépie, contrairement aux façades latérales. Une inscription au-dessus de la porte d’entrée et soulignée à la truelle, semble antérieure à la pose du crépi ; une date ainsi que des lettres difficilement déchiffrables (« AVELAVI LA 1604 » ?), peuvent faire référence à la période de construction de l’édifice ainsi qu’au nom du propriétaire bâtisseur.Le recouvrement des façades est également visible à travers l’usage de l’enduit tyrolien, notamment pour souligner l’encadrement des baies. Ce dernier apparaît autour des ouvertures ainsi que sur le pourtour des chaînes d’angle. Outre la fonction de protection contre l’humidité et le froid, l’enduit joue le rôle d’ornementation. Les habitations bourgeoises se remarquent par ce type d’embellissement, qui concerne essentiellement la façade principale. En effet, les façades sur jardins sont moins sophistiquées et sont rejointoyées de manière économique.

Parmi les matériaux utilisés dans l’architecture traditionnelle, le bois est présent sur les encadrements de baies, ainsi que dans les dispositifs de couverture et de plancher. Toutes les anciennes habitations de Campôme conservent sur un ou plusieurs niveaux un cadre de charpente en bois, avec des volets bois disparus ou plus récent. Seules quelques granges gardent leur volet bois d’origine, dont certains semblent dater du 18e siècle. Certains débords de toiture sont portés par des chevrons en bois taillés en biseau, fixés sous une volige de même matériau. Ce type d’avant-toit a certainement été utilisé avant l’usage généralisé de la tuile, afin de protéger les façades du froid hivernal. Les charpentes de planchers apparents sont simples et constituées d’une structure en bois, comportant des chevrons et pannes, et plus rarement des corbeaux taillés en tête-de-chat. Cette dernière particularité intégrée dans la salle commune de la maison, était destinée à éloigner les mauvais esprits [MORIN, 2014, p.46].

Le bâti de Campôme conserve également une maçonnerie composée de brique locale (cayrou), employée pour les chaînes d’angle et les encadrements de baies. En effet, de nombreux cortals du village possèdent en portail d’entrée des linteaux à arc surbaissé et jambages en cayrous. Selon plusieurs témoignages oraux recueillis sur le terrain, le cayrou visible sur certains édifices de Campôme proviendrait d’une ancienne briqueterie, probablement active à la fin du 19e siècle. En effet, la liste des matériaux employés pour la construction de l’école en 1879, indique la présence de briques provenant « des fours du pays » [A.D.P.O. 2 Op 623], dont très certainement la briqueterie qui en possédait un. Située au lieu-dit Croueill, la maçonnerie de cette micro-industrie est à l’image du matériau produit, avec une insertion en façades principales de cayrous disposés en rang. L’édifice a par la suite été transformé en habitation, comme l’atteste la modification des baies et l’insertion d’une véranda contre la façade Sud-Est. Au début du 20e siècle, la briqueterie ne semble plus en fonctionnement, probablement en raison de la concurrence des usines de Prades. En effet, la construction en 1909 du logement du maître au sein de l’école de Campôme, a consisté à employer des briques de maçonnerie provenant de la sous-préfecture des Pyrénées-Orientales [A.D.P.O. 2 Op 623]. Le cayrou est un type de brique fabriquée à base de terre argileuse, de préférence riche en silice. Son étymologie renvoie au catalan « cairó », qui désigne un carreau. De plus, elle fait référence à un élément en forme de parallélépipède rectangle de grandes dimensions, dont la taille standard est généralement de 44x22x5 cm [CAUE 66, Fiche d’inventaire du patrimoine culturel immatériel, 2019, p.7]. Son utilisation se généralise en Roussillon et dans le Conflent à partir du 19e siècle, période caractérisée par une grande restructuration du bâti rural. Plusieurs étapes de fabrication sont nécessaires afin d’obtenir un matériau robuste, notamment la préparation de la matière première, le façonnage, le séchage naturel et la transformation par la cuisson dans un four à système de foyer mobile. Ce procédé est particulièrement connu dans les Pyrénées-Orientales grâce à la briqueterie Sainte-Marcelle de Saint-Jean-Pla-de-Corts, active à partir de 1926 et toujours en activité. La terre cuite est également présente dans les joints de façades, sous la forme d’inclusion de brisures autour des moellons. Ce procédé permet d’assurer la tenue des joints, tout en donnant un aspect plus ou moins esthétique. Par ailleurs, certaines constructions de Campôme sont marquées par des surélévations de façades réalisées au 19e siècle, avec des incrustations de morceaux de briques dans le mortier.

Les couvertures en tuiles canal des habitations sont également en terre cuite, même si leur introduction reste tardive. En effet, les toitures étaient à l’origine couvertes de llose, matériau résistant à l’enneigement en période estivale. L’église Sainte-Marie est le seul édifice qui conserve sa couverture d’origine en llose, contrairement aux habitations qui ont été contraintes d’adopter l’usage de la tuile canal. En effet, les réglementations urbanistiques ont imposé son emploi, qui s’est par ailleurs généralisé sur une grande partie du bâti en Conflent. Quelques fours à pains et débords de toitures conservent néanmoins des dalles de schiste, placées en rang. De plus, la maçonnerie des façades est protégée dans certains cas par des tuiles canal disposées en porte-à-faux, au-dessus de rangs de briques et de lloses. Par ailleurs, quelques tuiles de débord conservent une décoration simple au lait de chaux, utilisé pour apporter une protection contre les mauvais esprits.

Enfin, la pierre de taille est plus rarement utilisée dans la construction traditionnelle. Elle se retrouve dans le bâti au niveau de quelques encadrements de porte d’entrée, comme c’est le cas de l’habitation n°11 rue de Fournous. Les jambages ainsi que la partie supérieure de l’encadrement ont certainement été insérés au 19e siècle, comme l’atteste la date 1827 gravée au centre du linteau. La pierre de taille apparaît également en tant qu’élément d’ornementation ou de pierre de réemploi, notamment au sein des édifices La chapelle Saint-Pierre de Paracolls conserve un modillon sculpté en pierre de taille de granit, ainsi que des blocs de marbre rose, provenant certainement d’un autre édifice. Le marbre est aussi employé sur des constructions contemporaines, telle que l’habitation n°76 route de la Castellane, construite au début du 20e siècle.

FORME URBAINE

Implantation du bâti

Les anciens lieux-dits de Fornols et de Crouells actuellement situés dans le territoire de Campôme, étaient autrefois rattachés à la paroisse de Molitg. Celui de Fornols s’est très certainement développé autour de la chapelle Saint-Christophe, malgré l’absence de vestiges liés à un habitat. Toutefois, plusieurs cabanes en pierres sèches liées à l’activité agricole, sont encore présentes dans le paysage. De plus, les traces de l’économie pastorale sont matérialisées par la présence de plusieurs cortals, dont ceux de Fornols, qui témoignent de ce que pouvait être autrefois la vie en montagne. Si l’évocation de l’ermitage de Fornols est attestée au 18e siècle, la survivance du hameau à cette époque parait moins probable. Ce dernier a pu être délaissé très tôt, notamment au 14e siècle lors des épisodes d’épidémies de peste.

Le hameau de Crouells situé au Nord de celui de Fornols, doit son nom aux cuvettes géographiques formées par la rivière de la Castellane. Il s’agit d’une zone à vocation agricole, qui possède un bâti développé en bordure de cours d’eau. En effet, les corps de bâti de plusieurs cortals présents sur le cadastre de 1811, sont projetés sur la rive droite de la Castellane. Il est actuellement possible de repérer ces anciens cortals, pour la plupart transformés en habitation. C’est le cas de celui correspondant aux parcelles 0B 174 et 175 , converti en habitation dès le 20e siècle. L’édifice est implanté en bordure de la Castellane, sur un terrain privé de 6 hectares. A l’origine, le cortal était constitué d’un unique bâtiment (0B 175), édifié sur un plan carré. La forme trapézoïdale telle qu’elle se présente actuellement, résulte de la construction du second corps de bâti, en continuité Nord de l’existant.

Toute la partie ancienne de Campôme est implantée sur la rive droite de la Castellane, à flanc de coteau rocheux. L’organisation du bâti est groupée, notamment de part et d’autre de la Place du village goudronnée seulement en 1947 [SARDA, 2000, p.22], ou encore de la Placette. Contrairement à l’habitat développé en plaine, celui de Campôme ne s’est pas formé autour d’un édifice de pouvoir ou religieux. L’église Sainte-Marie a en effet été construite tardivement, et constitue la limite Nord du village. Si les traces d’une architecture médiévale sont actuellement difficiles à identifier du fait des nombreux remaniements du bâti réalisés au 19e et 20e siècles, les rues restent étroites et obscures. Pour autant, leur tracé est rectiligne et permet de délimiter des îlots relativement denses. Cette organisation est liée à l’activité économique d’autrefois, où les rues devaient être encombrées par les attelages d’animaux. En effet, l’élevage d’animaux (bovins et ovins) constituait l’une des principales ressources et l’habitat lui-même en était impacté. De plus, les rues relient directement d’anciens chemins de communication empruntés par les animaux, dont celui de Campôme à Molitg, celui de Mosset (portion de l’actuelle route de la Castellane) et le chemin de Campôme à Prades.

A l’origine, le cimetière de Campôme entourait au Nord et à l’Est l’église Sainte-Marie, comme l’atteste un plan projeté de la surface du cimetière (107, 44 m²) daté du 28 juillet 1893 [A.D.P.O. 2 Op 625]. Pour des raisons de salubrité et d’hygiène publique, la question de son déplacement est en plein débat et conduit la municipalité à trouver un nouveau terrain ; en 1914, une aire est retenue près des deux moulins. Les conditions sanitaires de Campôme semblent mauvaises à cette époque, comme l’indique une lettre du sous-préfet de Prades, adressé au préfet des Pyrénées-Orientales le 18 avril 1893. En effet, plusieurs cas de fièvre typhoïde ont causé la mort de plusieurs habitants, principalement en raison de la « position du cimetière (et du) mauvais état dans lequel il se trouve » [A.D.P.O. 2 Op 625]. Le projet de translation est finalement reporté en raison de la Grande Guerre et le cimetière est déplacé en périphérie Ouest, dans la commune de Mosset.

Le bâti de Campôme était autrefois constitué de cours à usage agricole pour volailles et cochons appelées paragueres en catalan [SARDA, 2000, p.19], dont certaines sont encore projetées sur le cadastre napoléonien. Celles-ci ont disparu progressivement, au profit de l’agrandissement du bâti vers l’arrière, même si certaines ont encore été conservées. Les parties Sud et Est du village comprennent de grandes parcelles cultivées, indiquées en tant que jardins sur le cadastre napoléonien. Ces parcelles bénéficient en effet encore actuellement de la proximité avec la Castellane, qui joue un rôle important dans l’irrigation des terres.

La plupart des habitations de Campôme sont construites en pentes, et suivent le nivelé du terrain naturel. Une grande partie des maisons localisées à l’Est du village comportent une façade Sud-Ouest à un ou deux niveaux, ainsi qu’une façade arrière au Nord-Est à deux ou trois niveaux. Cette différenciation entre les étages s’explique principalement par la présence d’un sous-sol ou rez-de-chaussée, construit directement sur un affleurement rocheux. Les habitations accolées entre elles, présentent une organisation bi-orientée, lorsqu’une rue passe sur l’arrière, avec une disposition en bande. Les enrochements présents sur site ont par ailleurs modifié cet alignement, entre la rue du Fournous et le chemin d’en Paroll. Plusieurs rues en cœur du village présentent ce type d’implantation, notamment une partie de la rue du Fournous, la rue des Hirondelles ainsi que la rue du Four à Pain (au niveau de la Placette). Les rues perpendiculaires (rue d’Alger, rue de la Fontaine, rue de Paracoll et rue du Cami Clos) délimitent des îlots d’habitations plus denses. Par ailleurs, les îlots développés au Sud bénéficient de la proximité de jardins et de parcelles agricoles. L’îlot situé au Nord-Ouest entre la Route de la Castellane ainsi que la rue d’Alger, concentre des parcelles développées en lanière et correspondant à des granges, dont certaines orientées sur la Route de la Castellane ont été construites à la fin du 19e siècle. En effet, les parcelles visibles sur le cadastre de 1811 ont été agrandies vers l’arrière ou redécoupées en plus petites unités. Enfin, les petits îlots situés au plus près de l’église possèdent un habitat très certainement présent depuis le 17e siècle (dont le presbytère cadastré 0A 143), malgré de nombreuses transformations établies au 19e siècle et la construction de nouvelles habitations au 20e siècle.

L’extension urbaine de la commune de Campôme amorcée dans les années 1950 et 1960, a concerné la partie Nord Est ainsi que la zone Sud-Est, non loin des anciens moulins à farine. L’urbanisation s’est accélérée dans les années 1970, avec le développement d’un habitat de type pavillonnaire à l’Ouest du village et l’aménagement du lotissement La Bilade. Ce dernier continue son expansion dans les années 1980 et au début des années 2000. Enfin, de nombreux terrains agricoles situées de part et d’autre de la route de la Castellane ainsi que du chemin de Carmajou, sont urbanisés dans les années 1980 et 1990 [Géoportail, Remonter le temps].

Typologies de l’habitat

L’architecture des maisons d’habitation identifiées sur la commune de Campôme, sont caractéristiques du bâti traditionnel en Conflent, développé entre les 16e et 17e siècles [GRAU, POISSON, Olivier. Etudes roussillonnaises offertes à Pierre Ponsich, 1987, p.361]. De plus, l’habitat s’est très certainement formé lors de la construction de l’église Sainte-Marie à partir de 1671. Les maisons généralement développées sur deux ou trois niveaux, comprennent dans de nombreux cas un escalier latéral en pierres de granit ou de lloses, qui permet d’accéder à la pièce principale. La disposition des marches s’adapte à l’exiguïté de certaines rues en s’élargissant progressivement, de manière à positionner le perron en porte-à-faux par rapport à l’espace public. Par ailleurs, l’escalier mène à un perron maçonné en moellons de granit et pouvant être bordé d’une murette, recouverte de larges briques rouges. Les rampes ont fonte ont quant à elles été rajoutées postérieurement. Le rez-de-chaussée donne accès aux dépendances ainsi qu’à l’étable, généralement disposées autour de cours à puits [GRAU, POISSON, Olivier. Etudes roussillonnaises offertes à Pierre Ponsich, 1987, p.361]. La pièce du premier niveau correspond au séjour, et dispose d’une cheminée ainsi que d’un four à pain. Un escalier intérieur distribue le second niveau, constitué des chambres et des combles. Ceux-ci servaient également de stockage alimentaire et de grenier de séchage. Cette typologie de l’habitat se rapporte à celle de la maison de journalier ou d’ouvrier, caractérisée par l’absence de terrain contigu et par une élévation de la façade principale étroite sur une à deux travées de baies. Généralement, les baies en façade principale sont non axées et la toiture est à deux pentes. Certaines de ces maisons simples ont été transformées par adjonction de nouveaux espaces, comme c’est le cas pour l’habitation n°77 route de la Castellane, avec l’ajout d’une grange probablement à la fin du 19e siècle. Dans certaines maisons simples, l’ancien grenier-séchoir situé au dernier niveau a été modifié, avec l’intégration d’une grande terrasse.

Les habitations plus importantes du village adoptent un plan différent, avec un volume bâti imposant et agencé en terrasse. De nombreux percements d’apparence aléatoire, ont été réalisées aux 19e et 20e siècles, notamment en façades latérales. Celles-ci suivent en effet l’inclinaison de la pente et ont des travées d’ouvertures plus nombreuses qu’en façade principale. Ce type d’habitat possédait dès le 17e siècle une cour aménagée à l’arrière, supprimée à partir de la fin du 19e siècle pour la construction de nouvelles habitations. De plus, l’habitat comprend plusieurs travées de baies sur deux à trois niveaux, avec en rez-de-chaussée une grange abritant une étable, dont la chaleur des animaux permettait de chauffer la salle commune au premier étage. Cet espace annexe reste accolé au corps de bâtiment principal et possède une toiture en appentis, contrairement au reste de l’habitation (toit en bâtière). Si la plupart des baies ont été transformées postérieurement, certaines habitations conservent des encadrements d’origine, dont le linteau droit de la porte d’accès à la grange, ou encore les fenêtres à carreaux vitrés et petits bois. L’habitation n°44 rue d’Alger développée en angle, garde les caractéristiques de l’habitat traditionnel, malgré le remaniement de la façade Ouest. Par ailleurs, la façade Sud a été modifiée avec l’ajout d’un cadran solaire cimenté (20e siècle ?). Prévu d’être restauré, ce dernier avait sa devise « No doni si no dones » (Je ne donne pas si tu ne donnes pas), qui s’adressait directement au soleil [CAZES, Revue Conflent, 1993, p.22].

Enfin, le développement de l’agriculture au 19e siècle, a nécessité de construire de nouveaux bâtiments agricoles, les « cortals », qui se distinguent de ceux identifiés dans les hauteurs de Campôme. Il s’agit de remises agricoles, qui se succèdent pour la plupart le long des anciennes rues. L’absence de terrain attenant à la maison d’habitation a en effet conditionné l’édification de ces bâtiments, détachés sur quelques parcelles plus loin. La rue de la Fontaine concentre ce type de construction traditionnelle, qui présente une faible largeur sur rue et une organisation sur deux niveaux ; le rez-de-chaussée abritait les bovins et ovins et le niveau supérieur servait à conserver le foin. De plus, les cortals ont une unique travée d’ouvertures quadrangulaires, axée aux dimensions décroissantes vers le haut. Par ailleurs, ils ont généralement été épargnés des transformations diverses, en dehors des cortals développés sur la route de la Castellane. En effet, la plupart d’entre eux ont été remaniés en maison d’habitation, avec la grande ouverture du rez-de-chaussée transformée en porte de garage.

L’architecture traditionnelle locale se caractérise également par la présence d’éléments de convivialité, tels que les bancs en pierres (pedriç en catalan), qui étaient placés en bas de chaque habitation. La Place conserve également des bordures maçonnées le long des façades, qui témoignent de la relation de proximité qu’entretenaient les habitants. Les bancs isolés sont en voie de disparition, en raison de la généralisation de la circulation automobile. D’autres aménagements typiques de l’habitat vernaculaire en Conflent sont reconnaissables sur les parcelles, dont les pots encastrés destinés à chasser les volatiles, appelés pardaleres. Par ailleurs, les pierres de lloses placées en saillie de certaines façades, se rapportent à d’anciens supports de séchoirs à fruits, qui recevaient autrefois une planche pour la dessiccation.

En dehors du village, la typologie de l’habitat se réfère au modèle du cortal, avec un corps de bâtiment plus important que celui identifié le long des rues. C’est le cas du cortal du lieu-dit Croueill identifié plus haut, transformé en habitation dès le 20e siècle, puis remanié dans les années 2000 avec l’adjonction d’un second corps de bâti au Nord. La façade principale (Sud) est caractéristique du modèle de remise agricole, avec une travée d’ouverture axiale aux dimensions décroissantes vers le haut et le développement sur deux niveaux. Malgré le remaniement des ouvertures avec l’ajout de fenêtres en PVC et d’un balcon en fonte, les jambages en cayrous sont d’origine. Les niches latérales aux ouvertures centrales présentent le même type d’encadrement. Elles ont très certainement été ajoutées postérieurement à la construction du cortal, afin d’apporter de la luminosité dans les pièces à vivre.

Documents d'archives

  • Sans date
  • 1879-1882 / 1909
  • AD Pyrénées-Orientales : 2 Op 624
    1852-1859
  • 1889-1893
  • 1879
  • 1817-1819
  • Janvier et octobre 1964
  • 1811
  • 1811
  • 1811
  • 1811
  • 1811
  • 1811
  • 1811

Bibliographie

  • 2011
  • Juillet 2005
  • ALART, Bernard. Cartulaire Roussillonnais [en ligne]. Perpignan. Éditions Charles Latrobe. 1880, 125 pages.

    1880
  • 1868
  • ANGLADA, Joseph. Traité des eaux minérales et des établissements thermaux du département des Pyrénées Orientales. Baillière, Paris/Sevalle, Montpellier, 2 volumes, 1833 (réimpr. 1899).

    En ligne : https://books.google.fr/books?id=GU_u8O9zDs8C&pg=PA149&lpg=PA149&dq=anglada+trait%C3%A9+eaux&source=bl&ots=xb_KbPEA1_&sig=V2KAK7gAKD7Rf85zjvOER50zV6o&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjDopvVmYDaAhWF6RQKHe9hAWwQ6AEISDAG#v=onepage&q=anglada%20trait%C3%A9%20eaux&f=false

  • 2004
  • 2011
  • 1998
  • 1977
  • CAZES, Albert. Guides touristiques des Pyrénées-Orientales. Prades. 1969. 86 pages.

    Médiathèque de Prades
    1969
  • Sans date
  • 1985
  • 1973
  • 2010-2011
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  • 1988
  • 1987
  • 1987
  • 2007
  • 2005
  • 2013
  • 2003
  • MORIN, Bruno. L’habitat traditionnel des Pyrénées catalanes, Le connaitre et le restaurer. Parc naturel régional des Pyrénées-Catalanes. Carbonne : Nouvelles Éditions Loubatières. 2014. 119 pages.

    Médiathèque de Prades : LD 690 MOR
    2014
  • Mai 2004
  • 1995
  • 1996
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  • 26 février 2008
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  • 1986

Périodiques

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  • 1967
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  • 1993
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  • 1962
  • 1962
  • 1993
  • 1981
  • 1981
  • 1974
  • 1998
  • 1980
  • Février 1983
  • 1989
  • Septembre-Octobre 1987

Documents figurés

  • 1920

Documents multimédia

  • Lien URL : https://www.persee.fr/doc/amime_0758-7708_1994_num_12_1_1258

    1994
  • URL : https://books.google.fr/books?id=YPVAAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

    1821
  • 1996
  • Décembre 2019
  • Mise à jour le 13/02/2018
  • 2019
Date(s) d'enquête : 2020; Date(s) de rédaction : 2020
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(c) Inventaire général Région Occitanie