Cette chapelle est l’unique vestige d’un ancien hameau de Catllar, connu dans un document de 968 sous la dénomination « Casalone ». Celle-ci est issue du terme latin Casale, qui renvoi lui-même au terme catalan Casa (maison, hutte). Les limites géographiques de Catllar et plus particulièrement du hameau, sont également indiquées dans le document, avec la mention « in ipsa Petrafita et alia parte in ipsa archa de Casalono ». L’existence de monuments mégalithiques est ainsi attestée ; le terme « Petrafita » renvoi à une pierre dressée, tandis que l’« archa » (du latin « Arca ») fait référence à un ancien tombeau sous forme de dalles entassées [BASSEDA, 1990, p.380].
La première mention de la chapelle est faite en 1225, lors de la donation faite par l’abbé de Saint-Michel-de-Cuxa d’un terrain en friche situé en bordure de l’édifice, au prieur Jaume de Calahons ainsi qu’aux frères et sœurs du lieu [D’après Fossa, inventaire des archives de Cuxa (s.d)]. S’il est actuellement difficile de connaître l’emplacement exact d’un cimetière rattaché à la chapelle-ermitage, l’existence de celui-ci est attestée dans un document daté de 1545.
Entre les 14e et 17e siècles, la chapelle est considérée comme étant le siège d’un prieuré dépendant de Cuxa. Cette mainmise du monastère est également confirmée à travers les mentions de plusieurs moines, ayant bénéficiés de la prévôté de l’édifice, dont frère Antich Amat Torres, prévôt de Saint-Jacques de Calahons de 1605 à 1633 [JUST, 1860, p.77]. Au 17e siècle, la chapelle est identifiée sous le terme « Hermita de Sant-Jaume de Calahons », notamment en 1688 [TOSTI, MARQUIÉ, 1996, p.39]. Probablement vendue comme bien national à la révolution française, elle devient par la suite la propriété de la famille Vernet de Catllar, dont Thérèse Vernet qui l’hérita de son père. La famille reste le principal bénéficiaire du site jusqu’en 1898. Cette date est en effet inscrite sur une plaque, intégrée dans le mur de la chapelle latérale droite. Par ailleurs, l’édifice est déjà en 1858 « une chapelle privée jouissant de tous les privilèges attachés aux chapelles privées du diocèse », comme l’indique l’ouvrage Ermitages du diocèse de Perpignan, écrit en 1860 par Louis Just.
A la fin du siècle, la chapelle-ermitage apparaît peu fréquentée, certainement en raison de son important état de détérioration. Par manque de moyens financiers, la famille Vernet cède l’édifice au chanoine Guillaume Vernis, qui lui-même le concéda à l’abbé Raymond Vidal (prêtre-vicaire de Prades). Des travaux de restaurations sont donc entrepris en 1899, par l’entreprise de maçonnerie Bourreil de Catllar. La réfection s’accompagne de la construction de la sacristie, des deux chapelles latérales ainsi que de la transformation du toit tel qu’il se présente actuellement. Lors de la réalisation de ces travaux, deux squelettes en bon état de conservation son mis au jour dans le sol de la chapelle-ermitage. Cette découverte qui permet d’attester l’existence d’un ancien cimetière en ce lieu, a fait l’objet d’un article paru dans l’Indépendant, le 13 novembre 1898 [TOSTI, MARQUIÉ, 1996, p.41].
La chapelle et les terrains alentours sont vendus le 27 décembre 1926 par l’abbé Raymond Vidal à Jules Carsalade du Pont, évêque de Perpignan. Sous la présidence de ce dernier, l’édifice est à nouveau restauré en 1936 par l’entreprise catllanaise, conduite par Michel Bourreil (fils du précèdent), qui entreprend le recouvrement des murs intérieurs par du crépis et du sol en ciment [TOSTI, MARQUIÉ, 1996, p.41]. A la fin du 20e siècle, la chapelle-ermitage est en mauvais état. Dans le but de réaliser une restauration de qualité, l’édifice est cédé le 29 avril 1986 à la commune de Catllar. Celle-ci s’est alors engagée à mener à bien les travaux, en relation étroite avec l’Association des amis de Saint-Jacques, créée en 1985 dans le but d’assurer la sauvegarde et la mise en valeur du site . Les travaux récemment effectués sur le bâti ont concerné la toiture, refaite en 2003. Par ailleurs, le site est également réinvesti par la présence d’un ermite, depuis 1992.
L’édifice est un important lieu de culte dédié à Saint-Jacques le Majeur , où les habitants de Catllar et des paroisses de Marquixanes, Eus et Molitg s’y rendent en pèlerinage (Aplec en catalan). Au 19e siècle, les cérémonies sont évoquées par Louis Just, qui expliquent que les paroissiens de Catllar se rendent processionnellement à la chapelle les lundis de Pâques, à la Pentecôte, et le jour de la fête de Saint-Jacques. Une grande messe y est célébrée, où les goigs (cantiques catalans) sont alors chantés à la gloire du Saint-Patron. De plus, les trois autres paroisses viennent généralement sur le site au cours du mois de Mai [JUST, 1860, p.77]. Au 20e siècle, les cérémonies sont toujours actives, malgré une restriction souhaitée par la commune de Catllar, comme l’évoque une lettre du maire de Catllar adressée au sous-préfet de Prades le 4 mai 1903, au sujet de l’autorisation d’exercer le culte au sein de la chapelle. La lettre indique en effet l’accès limité à l’édifice (lié au contexte de séparation de l’Église et de l’État ?), en dehors des habitants pour le pèlerinage annuel et des curés des environs qui se « livrent à l’exercice du culte (…) à de très rares intervalles » [A.D.P.O. 2V50]. Lors de la restauration de l’édifice effectuée en 1936, une grande fête ainsi qu’une messe dans la chapelle sont organisées le lundi de Pâques par le Maire de Catllar, M. Carboneil. Cette tradition consistant à réunir les familles autour de tables placées à différents endroits du site, est actuellement conservée.
Entrepreneur en maçonnerie originaire de Catllar (Pyrénées-Orientales)