La forge de Llech est mentionnée vers 1431 en tant que possession de l'abbaye de Saint-Michel-de-Cuxa (IZARD Véronique, 1994, p.119) dont le rayonnement sur le Conflent témoigne de l'importance de sa richesse. De plus, le sacristain de l'abbaye, Blasc Amalrich, évoque dans un document de 1465 la mise en demeure du fermier de la forge, afin quil paye « sept quintaux de fer » dus à l'abbaye.
Au XVIe siècle, la forge de Llech semble affermée par Michel Brenuch à un marchand génois du nom de Baptiste Gentil , qui possédait plusieurs forges dans les Pyrénées-Orientales. Elle est également mentionnée en 1633, avec l'achat par le forgeron de deux ânes qui appartenaient à des paysans de Joch et de Sahorle.Cette forge est mentionnée sous les termes « molina del Lech » (XVe), « moline de Lec » (1514) et « fargue de Lech » (1633)
Selon la cartographie des moulines et forges dans le Conflent réalisée par Véronique Izard, il semblerait que l'activité de la forge ait été suspendue au XVIIIe siècle, période de crise pour les forges, dont la production de fer est fragilisée par l'augmentation du prix des matières premières et par le manque d'ouvriers. Elle reprend toutefois son activité au XIXe siècle, mentionnées dans les textes sous plusieurs noms ; forge de Los Masos, forge de Mitja-Ribera ou forge d'Estoher. Il semblerait que cette forge ait fermé pendant un certain temps, puisqu'il est question en 1820 d'implanter une forge à la catalane au lieu-dit Mitja-Ribera (donc de reconstruire ?) ; sa localisation est précisée au niveau de la jonction entre les ravins del Salze et de Prat Cabrera, telle qu'elle se présente actuellement et sur le cadastre napoléonien. L'autorisation d'implantation fut accordée à Jean Pons, le maître de forges .
Alors que de nombreuses forges ferment à la fin du XIXe siècle à cause de la hausse du prix du transport par chemin de fer et de l'apparition de nouveaux dispositifs de transformation du minerai de fer (hauts-fourneaux de Ria par exemple), la forge de Llech est l'une des seules encore en fonctionnement en 1865 dans le Conflent, au côté de celle de Nyer.
La forge de Llech était comprise dans la concession du site minier de la Pinosa (1500 m d'altitude) à Valmanya. Le témoignage d'un ancien habitant de Valmanya en 1995 indique la lourde charge que portaient les femmes à l'époque, notamment des mines jusqu'aux forges. Les conditions de marches étaient rudes ; Josephine Andrieu appelée « Fina Vella » était l'une de ses femmes, qui devait partir de Valmanya pour les mines de la Pinouse. Une fois aux mines, elle repartait en direction de la forge du Llech chargée d'une carga, un sac de minerai pesant plus de quarante kilos pour qu'il y soit traité. Pour sept heures de marche, elle était seulement payée un franc. Ce témoignage donne un aperçu de la rudesse de vie à l'époque, où l'exploitation du minerai s'effectuait de manière artisanale. Elle ferma vers 1890, en même temps que celle de Baillestavy à l'Est du territoire d'Estoher (Le fil du Fer, 2015).