Si la documentation médiévale fait défaut pour l’ensemble meunier de Neffiès, plusieurs faisceaux d’indices (toponymiques, archéologiques, historiques) plaident en faveur d’une fondation ancienne. D’abord, le nom de la source alimentant ces moulins, la Resclauze, évoque des aménagements bâtis liés à des sources importantes de fondation antique ou médiévale, à l’instar des moulins de la Resclauze à Gabian ou de la source homonyme située à proximité du site archéologique de Vareilles à Paulhan. Ensuite, le site de Neffiès se trouve dans l’emprise du site antique et médiéval du monastère Saint-Étienne-de-Trignan, mentionné dès 990. Les fouilles conduites depuis 2010 par Olivier Ginouvez et Jérôme Hernandez à l’intérieur et aux abords des vestiges de l’église carolingienne indiquent une occupation longue de dix siècles pour le monastère (8e -18e siècles). Elles ont également révélé l'existence de deux établissements antiques.
La première mention connue des moulins hauts de Neffiès date de 1615. Il s’agit d’une autorisation à prendre de l’eau venant des moulins « qui sont entre la Resclause et le besal [bief]» accordée à Jean de Latenay, co-seigneur de Neffiès. Le document précise qu’une source dite de « la tétine du loup » a servi jusqu’il y a 60 ans pour l’alimentation d’un petit moulin à présent ruiné. Au milieu du 17e siècle, le compoix de la communauté de Neffiès mentionne trois moulins appartenant de haut en bas à Arnaud d’Arnaud, seigneur de Neffiès (considéré comme bien noble, il n’est pas soumis à l’impôt), à Antoine Clergue fils de Guy et à Guillaume et Jean Couderc. Chaque moulin, assis sur le ruisseau de la Resclause, actionne une paire de meules et est équipé d’un réservoir. Le moulin inférieur, contrairement aux deux autres, ne possède pas de canal d’amenée d’eau (le cadastre napoléonien donne une image assez précise de l’organisation spatiale des moulins avec leurs aménagements hydrauliques, qui permet effectivement de constater que les eaux de fuite du moulin 2 se déversent directement dans le réservoir du moulin 3, sans l’intermédiaire d’un bief). Le moulin 3 entre dans les années 1670 dans les possessions de la seigneurie de Neffiès, suivi du moulin 2 à la fin du 17e siècle.
Le compoix de 1748 indique que le premier moulin n’est plus qu’un « cazal sans meulles a moudre ». Les moulins restent entre les mains des seigneurs de Neffiès jusqu’à la Révolution. Ils passent ensuite aux mains de Marie Anne Marsal, veuve du meunier Jean Jacques Cazes, habitant au moulin de Faïtis (Roujan), puis de son fils Jean Jacques. Achetés aux enchères par Auguste Bouys, conseiller municipal, en 1836, les moulins de Trignan sont abandonnés vers 1857-1858 par manque d’eau. En effet, en 1842, le creusement d’un puits de mine de charbon au tènement de Caylus, dévie les eaux de la source, privant les moulins de leur source d'énergie.
Si seuls trois moulins sont mentionnés par les sources textuelles, les vestiges en place pourraient indiquer l'existence de deux moulins supplémentaires au sud du site [informations transmises oralement par Serge Sotos]. En effet, quelques mètres après le moulin 3, un bief est conservé. Il est connecté à ce qui paraît être le réservoir d'un quatrième moulin, transformé a posteriori en bâtiment agricole. Le système hydraulique s'étend ensuite vers le sud, en direction du monastère Saint-Etienne de Trignan. Il traverse un petit plateau de tuf jusqu'au reliquat d'une structure de forme circulaire en pierre de taille, dont trois assises sont encore visibles. Il pourrait s'agir de la partie supérieure de l'ancienne cuve de mise en pression d'un moulin médiéval. Néanmoins, ces observations mériteraient d'être confortées par une étude archéologique des structures conservées.
Propriétaires des trois moulins de la Resclauze [liste dressée par Guilhem Beugnon, Centre de Ressources et d'Education au Développement Durable de Vailhan] :
Moulin 1 : Arnaud d’Arnaud (ca 1650), Catherine de Pascal de Saint-Juéry (1672), Antoine-Aphrodise de Sartre (ca 1710, bien noble), Marie Anne Marsal, veuve de Jean Jacques Cazes (1789) puis Jean Jacques Cazes son fils, Auguste Bouys (1836), Ernest Guiraudou (1862).
Moulin 2 : Antoine Clergue fils de Guy (ca 1650), Antoine-Aphrodise de Sartre (achat du 8 mars 1710), Jean-François de Bonnet de Maureilhan de Poilhes (1782), Marie Anne Marsal, veuve de Jean Jacques Cazes (1789) puis Jean Jacques Cazes son fils, Auguste Bouys (1836), Ernest Guiraudou (1862).
Moulin 3 : Guillaume et Jean Couderc (ca 1650), Guillaume Couderc fils de Guillaume (1708), Antoine-Aphrodise de Sartre (ca 1710), Jean-François de Bonnet de Maureilhan de Poilhes (1782), Marie Anne Marsal, veuve de Jean Jacques Cazes (1789) puis Jean Jacques Cazes son fils, Auguste Bouys (1836), Ernest Guiraudou (1862).
Photographe prestation Fish Eye dans le cadre de l'étude du patrimoine industriel du département de l'Hérault de 2011 à 2013