En 1921, Antoine Oustric, distillateur et négociant en vins, président de la Chambre de Commerce de Béziers, s'adresse à l'architecte Alexandre Garros pour faire construire une chapelle funéraire dans le Cimetière de Béziers. Il souhaite faire de cette chapelle un monument destiné à commémorer la mort de son fils Antonin Oustric (1893-1918), mort pour la France. Maréchal des Logis au 56e Régiment d'artillerie, Antonin est tombé "au champ d'honneur" à la tête de sa section devant Juvigny (Aisne) le 29 août 1918 à l'âge de 25 ans.
C'est le dessinateur-géomètre Adrien Marty, travaillant comme conducteur de travaux pour les Garros depuis 20 ans, qui supervise les travaux de construction et de sculpture de la chapelle funéraire. Alexandre Garros, dans une lettre à Marty datée du 14 avril 1921 (AM Bordeaux, 208S562, folio 327) lui demande de faire exécuter par le serrurier Maurel les petites grilles des façades latérales dont il envoie les dessins et lui indique que pour la sculpture, après réflexion, il tient à procéder comme il l'a toujours fait, c'est-à-dire "en confiant ce travail un sculpteur de Bordeaux qui le préparera sous mes yeux et ira l’exécuter à Béziers. Lagrange est tout indiqué puisqu’il a déjà bien ébauché l’affaire en exécutant la maquette sur laquelle nous avons travaillé ensemble".
Pour l'intérieur de la chapelle, il était prévu de placer un autel en marbre sous un vitrail représentant saint Antonin qui aurait été dessiné par l’architecte et réalisé par le verrier Dagrant de Bordeaux. Alexandre Garros envoie les plans et dessins de l'intérieur de la chapelle à Marty mais Antoine Oustric, qui vient de perdre son épouse au début de l’été 1921, fait la proposition de remplacer l’autel par un sarcophage en marbre et bronze doré.
Alexandre Garros répond immédiatement favorablement au souhait de son client, comme le montre sa lettre à Marty datée du 5 août 1921 : "Je trouve l’idée de Mr Oustric très bonne. Nous sortirions ainsi d’un autel qui après tout ne sert à rien. Si donc l’autorisation n’est pas refusée on pourrait faire un sarcophage dont je vous adresse une première idée. Le sarcophage serait en marbre et bronze doré, patinés. Bien entendu dans ce cas-là on supprimerait le saint au tracé du vitrail. Il ne serait peut-être pas indispensable d’avoir l’autorisation en question et le corps du fils de Mr Oustric pourrait rester dans le caveau bien qu’on fasse le sarcophage. Je me reporte pour cela à ce qui s’est passé au Bazar de la Charité. Ma cliente la Baronne de Carayon La Tour bien qu’inhumée à Bordeaux a un sarcophage dans le caveau de la galerie de la chapelle de la rue Jean Goujon." (AM Bordeaux, 208S562, folio 488)
C’est le marbrier Gouze qui fournira le marbre dont la couleur fut proposée par l’architecte : la partie de marbre veiné est en marbre escalette et le reste en marbre blanc piastraccia. Les bronzes sont fondus, ciselés et dorés à Bordeaux par Lagrange. La plaque commémorative placée devant le sarcophage sera en marbre noir avec une inscription en lettres d’or encadrée par un cadre en bronze. Les plaques de côté seront en marbre blanc avec des frises sculptées et la partie horizontale formant dessus en marbre blanc.
Une des préoccupations d'Alexandre Garros lorsqu'il construit des chapelles funéraires, c'est la question de l'étanchéité et de l'écoulement des eaux. Ainsi le rappelle-t-il à Marty dans une lettre datée du 1er décembre 1921 (AM Bordeaux, 208S563 folios 142-143) : "Des gaudrons dans la base et les 2 frises à droite et gauche de la façade pour l’écoulement de l’eau – on en prévoit jamais sur de tels monuments et dans tous les cimetières, socles monumentaux, etc cet inconvénient se produit".
L'intérieur de la chapelle funéraire est terminé en 1922. En 1923, Alexandre Garros dessine une porte en fer forgé pour la chapelle et propose à Antoine Oustric de la faire exécuter par un serrurier d'art qu'il connait bien, la Maison Schwartz et Meurer à Paris, successeurs des anciennes maisons LEFEBVRE-DORMOIS-BERGEROT, pour la somme forfaitaire de 3900 frs.
Le coût total de la chapelle funéraire s'éleva à 52 864 frs.
Né 2 juin 1860 à Béziers, Louis Antoine OUSTRIC est "employé de commerce" au moment de son mariage le 14 février 1890 à Béziers avec Joséphine Alexandrine BOISSEZON (née le 23 mars 1863 à Béziers - et morte accidentellement à Vichy en 1921). Antoine Oustric est distillateur et négociant en alcool, il sera président de la Chambre de Commerce de Béziers et doyen de la Faculté des Lettres de Montpellier. Il était propriétaire du domaine de La Pasquière à Béziers. Il est décédé le 23 juillet 1937.