Dossier collectif IA12112782 | Réalisé par
  • enquête thématique départementale, urbanisme et architecture de Rodez agglomération au 20e siècle
les maisons et les immeubles de Rodez au 20e siècle
Copyright
  • (c) Inventaire général Région Occitanie
  • (c) Rodez agglomération

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    maison, immeuble
  • Aires d'études
    Rodez agglomération
  • Adresse
    • Commune : Rodez

Introduction

Le repérage des maisons et des immeubles de Rodez a été effectué entre 2017 et 2020. Les limites chronologiques et géographiques sont celles définies pour l’enquête thématique consacrée à l’urbanisme et à l’architecture de Rodez agglomération au XXe siècle. La dernière décennie du XIXe siècle a été retenue comme point de départ car elle correspond au début d’importants travaux d’aménagement qui s’accompagnent d’un certain renouvellement architectural à Rodez. La date 1970 a été retenue comme limite de fin d’étude et toutes les rues déjà construites à cette date ont donc été parcourues.

Dans le cadre du repérage, 121 immeubles et 125 maisons ont été étudiés. Cette sélection a été opérée en fonction de critères scientifiques et opérationnels.

Les 246 dossiers illustrent toutes les périodes du 4e quart du XIXe siècle au 3e quart du XXe siècle. Tous les maîtres d’œuvre identifiés sont aussi illustrés. Deux d’entre eux méritaient une attention particulière car il s’agit des principaux architectes de l’entre-deux-guerres à Rodez : André Boyer et Jean Vigouroux ; c’est pourquoi les édifices qui leur sont attribués ont systématiquement fait l’objet d’un dossier. Un dossier thématique leur est aussi consacré. Les dossiers illustrent par ailleurs tous les édifices représentatifs d’une famille ou ceux présentant des caractères plus originaux (unicum). Enfin, les lotissements du Pré de la Conque (quartier de l’Amphithéâtre) et Sainte-Catherine, qui comportent de nombreux édifices remarquables, sont particulièrement documentés : ces deux secteurs étant protégés dans le site patrimonial remarquable, tous les édifices qu’ils comportent ont ainsi fait l’objet d’un dossier.

Les intérieurs de 20 immeubles (les parties communes essentiellement) et de 12 maisons ont pu être visités et leurs propriétaires ont parfois fourni des renseignements historiques sur la construction. À l’occasion de ces visites, des plans anciens ont été découverts et reproduits. La majorité d’entre eux ont aussi été empruntés afin d’être numérisés par le chercheur. Au total, 57 illustrations ont été intégrées à la base de données.

A. Résultats de l’enquête

Datations

La datation des édifices a été réalisée par analyse stylistique et par travaux historiques. Les dates portées en façade précisent parfois la datation mais elles sont peu nombreuses (16 cas). 151 édifices, soit 62 % du corpus, ont pour datation principale le 2e quart du XXe siècle. Plusieurs raisons expliquent cette surreprésentation. L’entre-deux-guerres correspond d’abord à une période de forte croissance urbaine à Rodez. Ensuite, l’un des enjeux de l’enquête thématique était de pouvoir identifier les architectes et les entreprises du bâtiment qui avaient façonné la ville, et de documenter autant que possible leurs œuvres. La consultation des premiers permis de construire conservés à partir de 1935 y a donc contribué. Enfin, une large sélection des édifices datant des années 1930 a été effectuée en raison de leur caractère remarquable.

Une sélection plus restreinte a été réalisée pour les autres périodes : les œuvres étudiées du tournant du XXe siècle témoignent particulièrement du renouvellement de l’architecture ruthénoise à la Belle Époque, tandis que celles du 3e quart du XXe siècle illustrent toutes les typologies rencontrées.

Fig. 1 : Carte des maisons et des immeubles étudiés.Fig. 1 : Carte des maisons et des immeubles étudiés.

Dates portées :

Seize dates portées ont été observées, dont la moitié relèvent des années 1930. Ceci confirme que cette période correspond à un pic de construction à Rodez.

1899 : immeuble, 34 avenue Tarayre

1900 : villa Pierre Benoit, 7 avenue Louis-Lacombe

1903 : immeuble, 55 rue Béteille

1904 : ensemble de deux maisons et ancienne entreprise de bâtiment, 6 avenue des Fusillés de Sainte-Radegonde

1906 : villa Roquelaure, 28 rue Raynal

1911 : maison, 15 avenue du Maréchal-Joffre

1922 : maison, 44 avenue Durand-de-Gros

1930 : maison, 46 avenue Durand-de-Gros

1930 : maison, 24 rue Raynal

1930 : maison, 35 avenue Durand-de-Gros

1930 : maison, 21 rue de Montcalm

1932 : Villa Versailles, 38 rue du 11-Novembre

1933 : maison dite « Myriam », 1 avenue de Toulouse

1934 : immeuble, 27 rue de Séguret-Saincric

1938 : immeuble dit « Lou Clapas », 39 avenue Amans-Rodat

1959 : maison, 44 boulevard du 122e-Régiment-d'Infanterie

 

Datations par source :

 

1899 : villa Pierre Benoit, 7 avenue Louis-Lacombe (achèvement en 1900)

1900 : immeuble et boutique H. Maurel, 6 rue du Terral

1907, 1909 : villa, 29 avenue Tarayre

1911 : maison de l’architecte André Boyer, 13 avenue Louis-Lacombe

1926 : immeuble, 3 boulevard Gambetta

1928 : groupe d’habitations à bon marché, 31 à 45 rue du Général-Viala, 17 à 29 avenue de Toulouse ; HBM, 21 rue du 11-Novembre

1929 : HBM, 27 rue du 11-Novembre ; HBM, 30 rue du 11-Novembre

1931 : villa, 25 rue de Séguret-Saincric

1932 : HBM, 3 rue de la Gare ; immeuble, 5 place d’Armes

1933 : immeuble, 3 place d’Armes ; villas jumelles 20 et 22 route de Séverac

1934 : villa, 27 rue Maurice-Bompart

1935 : immeuble, 10 rue Maurice-Bompart ; immeuble, 16 rue de Combarel ; villa, 2 rue Maurice-Bompart ; villa, 5 rue Maurice-Bompart ; villa, 27 avenue des Quinze-Arbres

1936 : immeuble, 11 rue Etienne-Cayla ; immeuble, 9 rue Etienne-Cayla ; immeuble, 20 rue Pasteur ; immeuble à boutique, 63 rue Saint-Cyrice

1937 : immeuble et boutique, 20 rue Béteille ; HBM, 5 rue Etienne-Cayla ; HBM, 35 rue de Montcalm ; maison, 40 chemin de Camonil

1938 : immeuble, 34 rue de Camonil ; HBM, 45 rue Saint-Éloi

1939 : immeuble, 5 rue des Martyrs-de-la-Résistance ; immeuble et magasin Balard, 14 place de la Cité ; HBM, 7 rue Etienne-Cayla ; maison, 53 rue Carnus

1940 : immeuble, 43 rue Carnus ; immeuble, 9 rue Pasteur ; immeuble du Comptoir métallurgique du Rouergue (surélévation), 8 rue Pasteur ; villa, 8 rue Maurice-Bompart ; villa, 17 rue Maurice-Bompart ; villa des Roses, 23 rue Grandet ; villa, 23 avenue Durand-de-Gros

1941 : immeuble, 23 rue Maurice-Bompart ; immeuble, 17-19 rue de Séguret-Saincric ; immeuble, 1 rue de Séguret-Saincric ; immeuble, 4 rue de Séguret-Saincric ; immeuble, 13 place de la Madeleine ; immeuble, 21-21 bis avenue Victor-Hugo ; lotissement concerté, 1 avenue de Paris et 1 à 5 rue de la Gare ; villa, 40 rue de Montcalm ; villa, 5 avenue Louis-Lacombe

1942 : immeuble à boutique, 61 rue Saint-Cyrice

1943 : immeuble à boutiques, 18 boulevard Larromiguière

1945 : villa, 38 rue Cité Cardaillac

1946 : immeuble, 14 rue Cité Cardaillac ; villa, 16 rue Cité Cardaillac

1947 : villa, 61 rue Cité Cardaillac

1951 : villa, 1 cité de la Boule-d’Or ; immeuble, 6 cité de la Boule-d’Or ; villa, 7 cité de la Boule-d’Or ; villa Bonséjour, 9 cité de la Boule-d’Or ; maison, 14 cité de la Boule-d’Or ; Maison, 9 rue du Général-Viala

1953 : immeuble, 9 avenue Amans-Rodat ; immeuble, 2 rue Planard ; cité Carbonnel, impasse Henri-Fabre

1954 : groupe d’habitations de Camonil

1957 : immeuble, 14 rue Maurice-Bompart ; lotissement du Toit du cheminot ruthénois, 41 à 59 avenue du Maréchal-Joffre

1960 : maison type F4, 100 cité du Petit-Nice ; maison type F5, 19 cité du Petit-Nice

1961 : immeuble, 24 cité de la Boule-d’or

1965 : ensemble de quatre immeubles et boutiques, 1 à 2 bis rue de Montcalm et 51 rue Béteille

 

Datations par tradition orale :

 

1895 : immeubles jumelés, 4-6 boulevard Gambetta

1915 : villa, 53 rue Grandet

1927 : immeuble, 40 avenue Amans-Rodat

1930 : immeuble, 6 rue Pasteur

1934 : pharmacie, 70 rue Béteille

Attributions et signatures

Attributions :

L’enquête thématique a permis d’attribuer de nombreuses constructions à des architectes qui jusqu’à présents étaient peu connus voire totalement méconnus.

Les édifices ont principalement été attribués par source, à partir des années 1930 lorsque les premiers permis de construire sont délivrés à Rodez. Quelques archives privées ont aussi permis d’identifier les architectes et les entrepreneurs.

L’annuaire de l’Aveyron mentionne seulement cinq architectes exerçant à Rodez en 1905 : Auguste Andrieu rue Denys-Affre, Charles Lacombe avenue Victor-Hugo, Sylvain Landès boulevard Flaugergues, Henri Pons rue de la Barrière et Alphonse Soumet boulevard Sainte-Catherine.

Aucune habitation construite par Charles Lacombe n’a été identifiée durant l’enquête. Il en est de même des architectes E. Bessoles (avenue Amans-Rodat) et de Durand (rue de Paraire) mentionnés dans l’annuaire de 1910.

Henri Pons (1849-1909) était architecte départemental. Une seule maison a été identifiée à Rodez, la villa de Pierre Benoit située avenue Louis-Lacombe, bâtie en 1899-1900.

Installé rue Denys-Affre, Jules Andrieu (1878-1944) suit les pas de son père, l’architecte et inspecteur des édifices diocésains Auguste Andrieu (1842-1911), et travaille pour le diocèse ou pour les congrégations religieuses. Sa première réalisation identifiée est la villa située 29 avenue Tarayre édifiée en 1907-1909. Il construit dans les années 1920 et 1930 plusieurs maisons et immeubles de style Art déco, tels que la villa Roubellat au 25 rue de Séguret-Saincric, l’immeuble du 63 rue Saint-Cyrice et celui du  3 boulevard Gambetta (en association avec l’architecte toulousain Edmond Pilette).

L’architecte Sylvain Landès (1869-1952) fut actif dès la fin du XIXe siècle, période à laquelle il effectue notamment des travaux dans des édifices religieux1. Mais son œuvre est surtout connue à partir de l’entre-deux-guerres, période durant laquelle il s’associe avec l’architecte DPLG Guy Lahoussaye (Boulogne-sur-Seine, 1887- ?). Ils construisent ensemble deux villas, rue Maurice-Bompart et avenue des Quinze-Arbres, ainsi que l’immeuble de l’entreprise Balard place de la Cité.

Alphonse Soumet occupe la fonction d’architecte municipal de 1895 à 1935, durant les mandats de Louis Lacombe et d’Eugène Raynaldy. Il est l’auteur des premières maisons ouvrières construites avant la Première Guerre mondiale avenue des Quinze-Arbres. En parallèle de sa carrière administrative, Soumet mène une carrière libérale, qui semble toutefois assez limitée : seules quelques habitations à bon marché construites entre les deux guerres ont été pour le moment identifiées.

Fils du commis d’architecte André Salvan, qui travailla dans le cabinet d’Henri Pons, André Salvan signe au début des années 1930 les plans de l’immeuble bâti pour le compte de l’entrepreneur de travaux publics Charles Loretz (29, rue Grandet). Il dessine aussi le lotissement Sainte-Catherine pour le même entrepreneur. En 1938, il s’associe officiellement à André Boyer en 1938, pour une dizaine d’années environ. Ensemble, ils construisent notamment des immeubles et des villas dans le quartier de Cardaillac.

Enfin, un architecte non ruthénois doit être signalé : il s’agit d’Henri Rémus, né en Belgique, qui est intervenu au début de la Seconde Guerre mondiale (on perd sa trace après 1942-1943). Il conçoit notamment les immeubles de style Paquebot à l’entrée de la rue de Séguret-Saincric, dont le « Normandie », et la villa des Roses, rue Grandet.

Signatures :

Les signatures portées en façade sont très rares à Rodez. Elles datent toutes de l’entre-deux-guerres.

À cette époque, les principaux architectes de Rodez sont André Boyer et Jean Vigouroux. Le premier, actif dès 1907 et omniprésent à Rodez durant la première moitié du XXe siècle, n’a apposé sa signature que sur un seul immeuble d’habitation, celui édifié en 1933 pour le marchand de tissus Pierre Mignonac place d’Armes. La notoriété qu’il avait acquise à la suite de la construction du musée Denys-Puech en 1907-1910 puis sa fonction d’architecte départemental lui assuraient une visibilité telle qu’il n’avait sans doute pas besoin de signer ses œuvres. En revanche, son élève Jean Vigouroux, qui ouvrit son agence en 1930, a apposé sa signature sur plusieurs édifices au début de sa carrière, afin de se faire connaître et tenter de concurrencer son ancien professeur. Quelques-unes de ces signatures, en fer forgé, sont encore visibles dans le quartier de l’Amphithéâtre, : 6 rue pasteur, 27 rue de Séguret-Saincric, 43 bis rue Béteille.

 Fig. 2 : Signature de l'architecte André Boyer (place d'Armes).Fig. 2 : Signature de l'architecte André Boyer (place d'Armes). Fig. 3 : Signature de l'architecte Jean Vigouroux.Fig. 3 : Signature de l'architecte Jean Vigouroux.

La Villa Versailles, située 38 rue du 11-Novembre, porte en façade la signature de l’architecte parisien Henri Guillaume (1868-1929). Ce dernier n’est cependant pas l’auteur de la maison, seulement construite en 1932, mais d’un modèle qui fut publié en 1909 dans la revue L’habitation pratique.

Une seule signature d’entrepreneur a été observée sur la clôture de la « Villa Aurore » construite vers 1930 au n° 20 rue de la Liberté : celle de J. Panis.

Le second-œuvre et le décor des demeures furent parfois également signés. Le serrurier Ed. Vergnes a conçu la porte de l’immeuble du 29 rue Grandet. Le décorateur Antoine Santuré a réalisé de nombreux sols en mosaïque ou en carreaux de grès, ainsi que des revêtements muraux en faïence, qui sont parfois signés. Exemples : villa de M. Roubellat, 25 rue de Séguret-Saincric et villa de M. Vayssettes, 27 avenue des Quinze-Arbres.

 Fig. 4 : Signature de l’entreprise Santuré (6 rue Pasteur, Rodez).Fig. 4 : Signature de l’entreprise Santuré (6 rue Pasteur, Rodez).

Situation géographique

La situation géographique des édifices repérés recoupe celle de l’extension urbaine de Rodez. On trouve donc de nombreux édifices bâtis le long de la route nationale 88 qui correspond, dans sa traversée de la ville, aux voies suivantes (du sud au nord) : avenue de Toulouse, avenue Amans-Rodat, avenue Victor-Hugo, rue Béteille, avenue Tarayre, avenue Durand-de-Gros et avenue de Paris. Le « tour de ville », c’est-à-dire les boulevards de ceinture, comportent quelques édifices du début du XXsiècle, de même que le secteur intra-muros. Les autres quartiers sont ceux construits principalement à partir de l’entre-deux-guerres : le quartier des Quinze-Arbres au sud, le lotissement Sainte-Catherine à l’est, le quartier de l’Amphithéâtre à l’ouest, le lotissement de Cardaillac au nord-est.

Composition d’ensemble

Implantations :

Jusqu’à la Première Guerre mondiale, les édifices sont majoritairement implantés à l’alignement de la rue. Ils s’inscrivent alors dans la continuité de ceux du XIXe siècle avec lesquels ils forment des fronts bâtis continus. Cependant, on rencontre aussi quelques exemples de maisons individuelles, des villas, élevées en retrait de la rue et qui rompent ainsi certains alignements, comme ceux de la rue Béteille (villa Sainte-Thérèse) ou de l’avenue Tarayre (villa Alauzet).

Durant l’entre-deux-guerres, les immeubles sont toujours le plus souvent implantés à l’aplomb de la voie, ce qui permet de ménager une cour en fond de parcelle. Les maisons individuelles sont quant à elles de plus en fréquemment élevées en retrait, derrière un jardin clôturé sur la rue. Pourtant l’implantation à l’alignement persiste même dans des secteurs très périphériques, en raison de la surface réduite de la parcelle ou du fort dénivelé de celle-ci. Les villas des années 1920 et 1930 sont bâties en cœur de parcelle, quelle que soit la topographie.

Après la Seconde Guerre mondiale, l’implantation en retrait est de plus en plus en retenue, y compris pour les immeubles en raison des règles de gabarit qui s’imposent aux constructions. Dans les lotissements, les maisons individuelles bâties en retrait forment des alignements avec leurs jardins de devant clôturés sur la rue.

 

Les espaces libres :

Si les immeubles disposent le plus souvent d’une cour, les maisons comportent des jardins antérieurs ou postérieurs, parfois les deux. À partir de l’entre-deux-guerres surtout, le retrait d’alignement permet de plus de ménager un jardin de devant ou une petite cour arborée. La clôture devient alors une composante essentielle du paysage urbain et son style varie selon les époques. À la fin du XIXe siècle, les clôtures sont généralement constituées de murs-bahut maçonnés surmontés de grilles métalliques. Celles-ci se composent de simples barreaux puis, dans les années 1930, s’ornent de différents motifs géométriques ou floraux dans le style Art déco. Les ferronneries sont parfois les mêmes que celles des garde-corps de l’édifice. L’une des clôtures les plus remarquables est sans doute celle du 36, avenue Amans-Rodat, dessinée par l’architecte Jules Andrieu au début des années 1930. Elle se compose de piliers en béton ornés de tores et de grilles à motifs géométriques.

À partir des années 1930, on rencontre aussi des clôtures à claire-voie tubulaire en métal, ou à claire-voie en béton armé. Dans les années 1950 et 1960, les cahiers des charges des lotissements imposent des règlements spécifiques. Ainsi, dans les lotissements de la Boule d’Or et Lalande par exemple, les clôtures devaient être constituées par des haies vives de 1,70 m de hauteur maximum, ou par des claires voies de 1,50 m de hauteur maximum, y compris le mur bahut, dont la hauteur était limitée à 0,80 m. Ces clôtures ne devaient pas avoir une superficie de plein supérieur à 50 % (y compris le mur bahut). Les panneaux ajourés dits décoratifs étaient interdits et il était recommandé de planter des haies vertes le long des clôtures à l’intérieur des parcelles. Ces règlements expliquent l’unité d’ensemble que présentent certaines rues.

Fig. 5 : Portail, 36 avenue Amans-Rodat.Fig. 5 : Portail, 36 avenue Amans-Rodat.

Les terrasses en terre-plein :

En raison de la topographie, les parcelles présentent très souvent un fort dénivelé. Certains propriétaires ont donc fait construire, afin de pouvoir profiter d’un jardin relativement plat, un mur de soutènement, le jardin formant ainsi une terrasse au-dessus du niveau de la rue ou de la parcelle voisine. De nombreuses villas ruthénoises de la première moitié du siècle disposent de ce type d’aménagement couteux, caractéristique des villes de pente. Les « fenestras » du tour de ville forment aussi de beaux exemples de squares aménagés sur la pente.

Si l’on observe parfois des escaliers extérieurs qui permettent d’accéder à la terrasse aménagée au-dessus de la rue, dans la plupart des cas, la terrasse se situe en fond de parcelle et permet de jouir d’un jardin privatif offrant un beau panorama. Les murs de soutènement étaient parfois réalisés directement par le lotisseur afin de délimiter les fonds de parcelle, comme au lotissement Sainte-Catherine et à Cardaillac. Dans le cas de la villa située 53, rue Grandet, la forme du mur se rapproche de celle du square Monteil, bâti en 1889.

 Fig. 6 : vue du mur soutenant la terrasse au 53, rue Grandet.Fig. 6 : vue du mur soutenant la terrasse au 53, rue Grandet.Fig. 7 : Villa 5, avenue Amans-Rodat.Fig. 7 : Villa 5, avenue Amans-Rodat.

Les annexes :

Peu de dépendances ont été observées lors du repérage, notamment en raison des difficultés d’accès aux espaces privés. Les garages, rares avant 1920 (exemple 53, rue Grandet), témoignent de la diffusion de l’automobile. Ils se multiplient à partir des années 1930, avant de se généraliser après la Seconde Guerre mondiale, en sous-sol, au rez-de-chaussée ou comme dépendance des immeubles et maisons. La dépendance de l’immeuble du 55 rue Béteille bâti en 1906 est tout à fait remarquable : de style pittoresque, elle servit peut-être de commerce ou d’atelier et de logement.

Fig. 8 : Dépendance, 55 rue Béteille.Fig. 8 : Dépendance, 55 rue Béteille.Fig. 9 : Garage indépendant, 53 rue Grandet.Fig. 9 : Garage indépendant, 53 rue Grandet.

Les commerces en rez-de-chaussée :

36 édifices, soit 15 % du corpus, associent la fonction commerciale du rez-de-chaussée (et éventuellement à l’entresol) aux logements des étages, qu’il s’agisse d’un commerce ou d’un atelier. Ils sont situés dans le centre ancien, aux abords des places, sur le tour de ville et sur le principal axe routier et donc commerçant de la ville, la route nationale 88.

Fig. 9 : Carte de localisation des boutiques situées aux rez-de-chaussée des édifices étudiés.Fig. 9 : Carte de localisation des boutiques situées aux rez-de-chaussée des édifices étudiés.

Élévation des édifices

Rodez étant bâtie sur une colline, le relief de la ville a donc imposé d’adapter les constructions à la pente. Les habitations possèdent ainsi très souvent un niveau de soubassement, voire plusieurs. Les constructions en simple rez-de-chaussée sont rares et les maisons à étage(s) sont très largement majoritaires. Les maisons individuelles ont généralement un seul étage carré, parfois augmenté d’un comble. Les immeubles ont en revanche au minimum deux étages carrés et atteignent fréquemment cinq ou six étages carrés après la Seconde Guerre mondiale. Des surélévations ont été observées : elles sont intervenues à partir des années 1940 en raison de la forte demande en logements et de la pénurie de terrains à bâtir. À partir des années 1960, des immeubles datant du tournant du XIXe siècle ont été surélevés, souvent en rupture totale avec l’élévation d’origine. Des cas de façadisme ont aussi été repérés (exemple : 5-7 boulevard Flaugergues).

La composition des façades :

L’essentiel des constructions possèdent des façades à travées régulières, avec mur gouttereau sur rue. Quelques façades-pignon ont néanmoins été repérées, sur quelques édifices de la fin du XIXe siècle (façades postérieures) et de l’entre-deux-guerres (façades antérieures des maisons de type pavillon).

À partir de 1900 environ et jusqu’au milieu du XXe siècle, certaines maisons cossues sont dotées en façade principale d’un élément qui deviendra l’un des poncifs de la villa ruthénoise : la marquise (ou auvent). Ce petit ouvrage en charpente, qui abrite l’entrée principale, est couvert d’un toit à un pan ou à deux pans.

Un accessoire de façade est par ailleurs récurrent en partie basse des constructions, à côté de l’entrée : le décrottoir en fer. De nombreux exemples sont encore conservés même s’ils ne sont plus utilisés.

La présence de balconnets et de balcons aux étages des immeubles est très fréquente. Ils sont d’abord munis de garde-corps en fer forgé ou en fonte (modèles sur catalogue), plus rarement en pierre. Ils participent à la décoration des façades. Entre les deux guerres apparaissent les garde-corps en béton. Certains superposent un parapet maçonné et un élément métallique, comme des tubes (exemples rue Pasteur).

Durant les années 1920 et 1930, l’usage des bow-windows ou des oriels est récurrent dans les édifices de style Art déco. Le premier exemple de bow-window connu à Rodez est celui de la maison d’Henri Bousquet, de style Art nouveau, construite par l’architecte André Boyer. Les architectes leur donnent prennent le plus souvent une forme trapézoïdale (ou à pans coupés). La forme des balcons, dont certains surmontent un bow-window, se diversifie aussi : pans arrondis, pans coupés, forme triangulaire.

Matériaux et toitures

La pierre est utilisée dans la totalité des constructions jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Après le grès rose, majoritairement employé au XIXe siècle, le calcaire s’impose en façade dans les édifices du début du XXe siècle, probablement à la suite de la construction de l’église du Sacré-Cœur dans le faubourg. On retrouve d’ailleurs dans de nombreuses constructions la mise en œuvre décorative du petit appareil de calcaire rustique. Le grès rose reste cependant utilisé pour les murs pignon et façades secondaires, ou en façade principale dans un but ornemental.

Si le gneiss, reconnaissable à sa couleur ocre, est aussi couramment employé comme matériau de gros-œuvre, il est parfois laissé apparent et mis en œuvre de façon soignée. Exemple : villa « Les Glycines », avenue Louis-Lacombe (1er quart du XXe siècle).

Plus exceptionnel est l’usage du schiste, généralement en appareil polygonal : il est réservé aux habitations cossues du début du XXe siècle. Exemples : maisons 5-7 boulevard Flaugergues.

Dans les années 1930, les moellons de calcaire sont encore laissés apparents, mais généralement pour distinguer le soubassement ou le rez-de-chaussée des autres niveaux. Ils apportent aussi une touche pittoresque aux constructions.

La brique est peu visible dans les édifices du XXe siècle. Elle est parfois employée en plein de façade, dans quelques maisons bourgeoises ou immeubles de la première moitié du siècle (exemple : villa 5, avenue Amans-Rodat), mais est le plus souvent utilisée pour les chambranles, plates-bandes, piédroits, arcs, ou en décor.

Le béton armé est employé à partir des années 1920, pour la réalisation de l’ossature (poteaux et poutres), de linteaux, de planchers, de toits-terrasse et de balcons principalement. Les immeubles à ossature en béton armé sont rares avant 1945. Exemples : immeubles Noyrigat et Mignonac, place d’Armes.

Les parpaings de béton se diffusent après 1945 et remplacent peu à peu la pierre. La brique creuse est aussi employée.

Fig. 10 : Villa de Pierre Benoit avenue Louis-Lacombe, détail de façade.Fig. 10 : Villa de Pierre Benoit avenue Louis-Lacombe, détail de façade.Fig. 11 : Vue Vue de la villa Roquelaure, rue Raynal, au début du 20e siècle.Fig. 11 : Vue Vue de la villa Roquelaure, rue Raynal, au début du 20e siècle.Fig. 12 : Détail de la façade de la villa Les Glycines, 11 avenue Louis-Lacombe.Fig. 12 : Détail de la façade de la villa Les Glycines, 11 avenue Louis-Lacombe.Fig. 13 : Maçonnerie de moellons de calcaire, villa Dhombres, rue Maurice-Bompart.Fig. 13 : Maçonnerie de moellons de calcaire, villa Dhombres, rue Maurice-Bompart.

Toiture et couverture :

Au début du XXe siècle, si les toits à égouts retroussés sont encore observés, les toits à longs pans sont les plus fréquents. On rencontre aussi des toits mansardés et quelques pignons couverts, ces derniers témoignant de l’influence de l’architecture balnéaire.

L’ardoise demeure le matériau de couverture dominant à Rodez. L’attachement à l’architecture vernaculaire du XIXe siècle se manifeste aussi dans l’emploi des ardoises disposées en écailles, qui s’apparentent alors aux lauzes. Cette technique perdure durant la première moitié du siècle suivant. Ceci impose toujours des toits à forte pente, nécessaires aussi en raison des épisodes de neige encore nombreux à Rodez à cette époque.

La tuile est peu courante avant le milieu du XXe siècle. Ce matériau économique était surtout réservé aux constructions bon marché et permet en outre la réalisation de charpentes à faible pente. Exemples : 26 rue du 11-Novembre ; groupe d’habitations de Camonil (années 1950)

Les toitures terrasses, qui témoignent de l’influence de l’architecture moderniste, sont mis en œuvre à partir de la fin des années 1920 à Rodez et se diffusent principalement dans les années 1930. Celui de l’immeuble situé au 3, boulevard Gambetta est la première terrasse connue couvrant un immeuble d’habitation. L’ensemble d’immeubles construit par Jean Vigouroux rue Pasteur, ainsi que ceux édifiés par le même architecte rue de Séguret-Saincric, étaient couverts de terrasses. Peu de maisons individuelles en étaient pourvues : des trois premières villas construites rue Maurice-Bompart au milieu des années 1930, seule celle de la villa Dhombres est préservée. Peu de toitures terrasses antérieurs à 1945 ont en effet été conservés. D’une part, des problèmes d’étanchéité ont été rapidement constatés et des toits traditionnels sont donc venus recouvrir les toitures terrasses d’origine. D’autre part, le manque de logement dès les années 1940 a conduit les propriétaires d’immeubles à les surélever.

Après la Seconde Guerre mondiale, les toitures terrasses couvrent presque exclusivement des immeubles collectifs.

Styles et décors

La sobriété voire une certaine austérité caractérise les constructions de Rodez de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Cependant l’éclectisme de la Belle Époque renouvelle les constructions ruthénoises. L’emploi de matériaux mis en œuvre de façon ornementale contribue au caractère pittoresque de certaines façades. Le grès rose, le calcaire, le schiste et le gneiss sont utilisés en parement dans quelques villas et immeubles bourgeois du début du XXe siècle.

Si Rodez est éloignée de Paris, de nombreux échanges commerciaux lient la capitale et la préfecture de l’Aveyron. L’architecture parisienne sert ainsi d’inspiration aux maîtres d’œuvres ruthénois. L’usage de la brique pour les arcs, par exemple au 9, boulevard de la République ou au 55, rue Béteille, se réfère davantage aux modèles de la région parisienne qu’à ceux de Toulouse ou d’Albi.

L’éclectisme architectural domine, avec le plus souvent des références à l’architecture classique des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, à l’image du style néo-Renaissance de l’immeuble Matou, situé place Saint-Etienne.

Le décor reste peu fréquent en façade et se concentre principalement autour des ouvertures. Il s’agit la plupart du temps d’ornements classiques. Quelques édifices présentent néanmoins des éléments de décor rapportés, en brique ou en grès. Les figures sculptées, telles celles que l’on observe sur l’immeuble Maurel, 6 rue du Terral, sont très rares.

À partir de la fin des années 1920, le style Art déco se diffuse largement à Rodez. Les constructions Art déco se rencontrent le long des principaux axes routiers, donc plutôt commerciaux, en particulier la route nationale 88, mais aussi dans les quartiers neufs bâtis aux abords du centre urbain : le quartier de l’Amphithéâtre à l’ouest et le lotissement Sainte-Catherine à l’est. Le style Art déco est aussi très apprécié des commerçants qui renouvellent les devantures ou l’intérieur de leurs boutiques.

L’Art déco ruthénois reste sobre et très géométrique. Ce style se manifeste dans la volumétrie, avec la présence d’oriels ou  « bow-windows », la composition des façades (pans coupés, balcons ou frontons à gradins…), et dans le décor des ferronneries. Des ornements géométriques en relief, des glyphes, des denticules, des cannelures et tores en table ornent aussi les façades.

Quelques rares décors en mosaïque ont été observés : immeuble, 8 rue de l’Amphithéâtre ; maison, 24 rue Raynal ; maison-immeuble, 33 rue du 11-Novembre ; maison dite « Héliane », 3 avenue de Toulouse.

 Fig. 13 : décor en mosaïque, rue de l'Amphithéâtre.Fig. 13 : décor en mosaïque, rue de l'Amphithéâtre.Fig. 14 : Cartouche indiquant la date 1930, rue Raynal.Fig. 14 : Cartouche indiquant la date 1930, rue Raynal.Fig. 15 : Portail de la ville Héliane.Fig. 15 : Portail de la ville Héliane.

Enfin, les styles régionalistes, néo-basque ou néo-normand, se rencontrent à Rodez dans les années 1930. L’influence du style Arts and Crafts sur quelques édifices, en particulier la « Villa des Roses » rue Grandet (calcaire rustique et motifs médiévaux) est sans doute un phénomène plus original.

B. Synthèse : typologie des demeures de Rodez au XXe siècle

La maison de ville

La maison de ville2 est un édifice à usage mono-familial. À Rodez, ce type d’habitation est peu fréquent au tournant du siècle, en raison de la faible étendue de la ville, en particulier de ses faubourgs, et d’un accroissement de la population encore limité. À partir de l’entre-deux-guerres en revanche, de nombreux habitants choisissent d’édifier des maisons de ville. Certains d’entre eux profitent alors des aides de l’État dans le cadre du régime des habitations à bon marché (ou « HBM »), en particulier la loi Loucheur de 1928, qui favorisent l’accession à la propriété des ménages modestes. On rencontre quelques alignements d’HBM, à l’image du groupe de l’avenue de Toulouse bâti par l’office public d’HBM de Rodez, ou de la cité Saint-Martin-des-Prés dans le faubourg Saint-Cyrice.

Bâtie à l’alignement, la maison de ville possède le plus souvent deux ou trois travées, un étage carré et un étage de comble, avec ou sans cave ou niveau de soubassement, et forme avec les habitations de même type un front bâti continu. La maison à travée unique est un cas exceptionnel, rencontré une seule fois, 15 avenue du Maréchal-Joffre (bâtie en 1911). Si le mur gouttereau sur rue est courant, de nombreuses maisons comportent, surtout entre les deux guerres, des lucarnes pignon ou un pignon en façade. À partir des années 1930 se multiplient aussi les garages dans-œuvre aménagés dans les rez-de-chaussée ou soubassement.

Fig. 16 : Maison (à gauche), 8 avenue des Fusillés-de-Sainte-Radegonde.Fig. 16 : Maison (à gauche), 8 avenue des Fusillés-de-Sainte-Radegonde.Fig. 17 : Maison, n° 22 rue Saint-Martin-des-Prés.Fig. 17 : Maison, n° 22 rue Saint-Martin-des-Prés.

Après la Seconde Guerre mondiale sont construits quelques lotissements constitués de maisons individuelles, implantées en retrait derrière un jardinet et accolées les unes aux autres. On peut observer ces maisons rue Henri-Dunant, du Professeur-Calmette, Jean-XXIII ou encore cité Robinson. Nombre d’entre elles relèvent de la catégorie des logements économiques et familiaux (Logecos) créés en 1953 dans le cadre du plan Courant.

Les maisons individuelles des années 1950 et 1960 sont représentatives de la production courante française de l’époque. Elles sont dessinées par des architectes ou des entrepreneurs le plus souvent locaux. Un soin particulier est apporté à ces maisons qui font parfois l’objet d’une conception d’ensemble, incluant la clôture sur la rue généralement formée d’un mur et d’une claire-voie métallique.

Exemple : maison, 44 boulevard du 122e-Régiment-d’Infanterie.

Le second-œuvre est souvent de qualité. Les maisons présentent ainsi des volets roulants en bois ou des contrevents en métal ou en bois : ils sont généralement peints, en bleu, vert, rouge ou encore jaune, ce qui contribue à animer les façades.

 Fig. 18 : Groupe de maisons, rue du Professeur-Calmette.Fig. 18 : Groupe de maisons, rue du Professeur-Calmette.Fig. 19 : Vue de la cité Robinson.Fig. 19 : Vue de la cité Robinson.

La villa

Telle qu’entendue dans cette étude, la villa est une habitation mono-familiale à un étage carré minimum, et généralement construite en cœur de parcelle. Elle est caractérisée par des décrochements de plan, de façade, voire de toiture et par la présence d’espaces d’articulations entre intérieur et extérieur, tels que porche, balcon, terrasse, oriel. Ce type d’habitation pavillonnaire est réservé à la classe aisée de la population et se rencontre toujours à la périphérie de la ville, dans des secteurs qui permettent aux propriétaires de profiter de beaux points de vue sur la campagne environnante. Les villas de Rodez étaient très majoritairement à usage de résidence principale. À notre connaissance, seule la villa Alauzet avenue Tarayre constituait une résidence secondaire. 42 villas ont fait l’objet d’un dossier.

Fig. 20 : Villa de Pierre Benoit, vue au début du XXe siècle.Fig. 20 : Villa de Pierre Benoit, vue au début du XXe siècle.Fig. 21 : Villa de Pierre Benoit.Fig. 21 : Villa de Pierre Benoit.

Les premières villas sont construites à la fin du XIXe siècle à Rodez. Elles disposent souvent d’une terrasse en terre-plein sur le jardin ou sur la rue, parfois accessible par un escalier percé dans le mur de soutènement. Elles empruntent les principaux traits distinctifs de l’architecture de villégiature et comportent parfois un plan asymétrique en retour d’équerre, une ou plusieurs façades-pignon, un auvent protégeant l’entrée principale côté rue, des balcons ou encore des décrochements de toitures.

Leurs façades cultivent le goût du pittoresque auquel contribuent l’emploi et la mise en œuvre ornementale des matériaux (calcaire, grès rose, schiste, gneiss, brique). Les hautes toitures adaptées au climat ruthénois, couvertes de lauzes ou d’ardoises en écaille, sont les seuls emprunts visibles à la tradition locale.

Exemples : villa Roquelaure rue Raynal, villa de Pierre Benoit et villa des Glycines avenue Louis-Lacombe.

Après la Première Guerre mondiale, le style des villas évolue sous l’influence du régionalisme et de l’Art déco. Certaines villas présentent ainsi des formes plus compactes et géométriques. Toujours isolées dans leur parcelle, elles comportent généralement un plan massé, néanmoins rompu par des décrochements. L’entrée est toujours abritée sous un auvent. Les bow-windows se multiplient sur les façades côté jardin, face à la campagne environnante.

Le pavillon

Le pavillon est une construction généralement entourée d’un jardin (cette définition est attestée à partir de l’entre-deux-guerres). Cependant, à la différence de la villa, il est destiné à une clientèle plus modeste. Il se diffuse à partir de l’entre-deux-guerres, toujours en périphérie, notamment sous l’effet des lois facilitant l’accession à la propriété.

Le modèle de pavillon à rez-de-chaussée, étage de comble et pignon en façade, largement diffusé dans les revues d’habitations des années 1920 et 1930, est peu fréquent à Rodez. Ceci peut s’expliquer par le relief accentué de la ville et à la rareté des terrains à bâtir, peu propices au développement des lotissements pavillonnaires. La pente a parfois nécessité la construction d’un étage de soubassement.

Exemples : 4 rue du Petit-Languedoc (IA12112920), 26 rue du 11-Novembre (IA12113035), 47 rue du 11-Novembre (IA12112854)

 Fig. 22 : Maison de type pavillon, 4 rue du Petit-Languedoc.Fig. 22 : Maison de type pavillon, 4 rue du Petit-Languedoc.Fig. 23 : Maison 64, rue Henri-Fabre.Fig. 23 : Maison 64, rue Henri-Fabre.

On rencontre aussi à la périphérie de la ville, ainsi que le long de quelques grands axes de circulation sur les communes limitrophes de Rodez (Onet-le-Château, Le Monastère, Luc-la-Primaube), des pavillons à étage carré, avec plan en L et façade pignon.

Exemples : 27 rue Gandet (IA12113095), 70 rue Henri-Fabre (IA12113082), 64 rue Henri-Fabre (IA12112919)

La maison à plusieurs unités d’habitation

La maison à plusieurs unités d’habitation possède plusieurs logements juxtaposés ou superposés sous un même toit. À la différence de l’immeuble, la maison ne comprend pas de partie commune et chaque logement possède sa propre entrée individuelle. Les maisons jumelles comportent des façades symétriques.

Après la Seconde Guerre mondiale, elle est toujours une solution intermédiaire entre l’habitation individuelle et l’immeuble et permet de tirer profit de la pente. Ainsi les logements sont superposés, avec une entrée individuelle accessible ou non par un escalier extérieur.

Exemples : 5-7 boulevard Flaugergues, 17-19 rue du Général-Viala

 

Fig. 24 : Maison à deux unités d’habitation, 5-7 boulevard Flaugergues.Fig. 24 : Maison à deux unités d’habitation, 5-7 boulevard Flaugergues.Fig. 25 : Maisons jumelles, 17-19 rue du Général-Viala.Fig. 25 : Maisons jumelles, 17-19 rue du Général-Viala.

L’immeuble

Selon le Thésaurus de la désignation des œuvres architecturales et des espaces aménagés, l'immeuble est un « édifice divisé à la construction, en appartement pour plusieurs particuliers »[3]. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, l’immeuble est majoritairement implanté à l’alignement de la rue. Il comporte une façade ordonnancée et une élévation le plus souvent de deux ou trois étages carrés, avec ou sans niveau de comble.

Fig. 26 : Immeubles 4 et 6, boulevard Gambetta.Fig. 26 : Immeubles 4 et 6, boulevard Gambetta.Fig. 27 : Immeuble, 55 rue Béteille.Fig. 27 : Immeuble, 55 rue Béteille.Fig. 28 : Immeuble, 3 boulevard Gambetta.Fig. 28 : Immeuble, 3 boulevard Gambetta.

Sur l’ensemble du corpus étudié, 58 immeubles ont deux étages carrés (46 %), dont 14 avec niveau de comble, et 32 ont trois étages carrés (26 %), dont 21 avec niveau de comble. Neuf immeubles ont quatre étages carrés (7 %) et cinq ont cinq étages carrés (4 %). Le seul immeuble étudié de six étages carrés a été bâti en 1941 (4 rue de Séguret-Saincric).

 Fig. 29 : Immeuble (copropriété), 9 avenue Amans-Rodat.Fig. 29 : Immeuble (copropriété), 9 avenue Amans-Rodat.

L’accès aux parties communes est latéral ou central, avec un escalier situé en fond de couloir et éclairé en façade postérieure. Les premiers ascenseurs sont construits au début des années 1930 dans les immeubles Noyrigat et Mignonac, place d’Armes.

Dans le centre urbain, les immeubles de style éclectique tranchent avec l’architecture vernaculaire de nombreux immeubles du XIXe siècle. Entre les deux guerres, certains immeubles présentent l’aspect de maisons individuelles cossues : c’est le cas de l’immeuble dit « Lou Clapas » construit en 1938 au n° 39 avenue Amans-Rodat. La villa Roubellat, 25 rue de Séguret-Saincric, abrite quant à elle deux logements superposés, avec une entrée individuelle pour celui du rez-de-chaussée, mais aussi une cage d’escalier commune.

Dans le centre urbain, les immeubles comportent le plus souvent un rez-de-chaussée à usage de commerce. Les premières copropriétés sont bâties au début des années 1940, aux n° 1, 2 et 3 rue de Séguret-Saincric. Elles ont été conçues par l’architecte Henri Rémus. Le développement de ce type d’habitat durant la Seconde moitié du XXe siècle est tout à fait remarquable à Rodez : il s’explique par des motivations économiques, le manque de terrains et le souhait de devenir propriétaire. L’architecture de ces immeubles témoigne dans les années 1950 de l’héritage des années 1930 avant de se banaliser dans la décennie suivante avec des cellules de logement standardisées, l’usage de la dalle de béton armé, la symétrie des façades et la répétition des loggias et balcons. Le second-œuvre d’origine (ferronneries des balcons, menuiseries, contrevents et stores) agrémentait toutefois les façades jusqu’à une époque récente.

Les premières HLM sont construites à partir de 1959. Les formes les plus courantes sont l’immeuble de type « plot », rectangulaire à trois ou quatre étages, que l’on rencontre par exemple dans le quartier de Gourgan, et l’immeuble barre le plus souvent rectiligne, avec une hauteur également limitée à quatre ou cinq étages. La barre courbe construite rue de Vieussens en 1964, est un exemple plus original. L’immeuble de type « tour » est plus rare à Rodez, on en trouvait trois exemples à Saint-Éloi – Les Cèdres (démoli), Les Chênes et Les Pins – bâtis en 1966-1968.

 

Conclusion

Au début des années 1900, les demeures ruthénoises montrent encore un attachement à l’architecture vernaculaire, relativement austère, mais Rodez est toutefois marquée par un renouvellement architectural qui concerne les immeubles commerciaux et toutes les formes d’habitations. La construction de villas, percées de grandes ouvertures et dotées de balcons ou de terrasses, atteste le désir de certains habitants de profiter des panoramas visibles depuis la butte.

Entre les deux guerres, de nombreux immeubles de rapport, avec boutique(s) en rez-de-chaussée, sont bâtis dans le centre urbain et ses abords immédiats, comme dans le nouveau « quartier de l’Amphithéâtre », rues Pasteur et de Séguret-Saincric. Mais l’entre-deux-guerres correspond aussi à une importante période d’extension urbaine et l’éloignement du centre urbain est alors plus favorable à la construction de maisons individuelles, surtout à bon marché. Les maisons sont bâties spontanément, le long de voies nouvelles ou de chemins peu à peu aménagés, tandis que des lotissements sont construits en périphérie. L’architecture pavillonnaire, courante dans les périphéries urbaines des grandes agglomérations, se développe assez peu à Rodez en raison de la topographie mouvementée qui implique souvent de construire sur la pente.

Si dans l’immédiat après-guerre, quelques lotissements de maisons individuelles sont bâtis, le processus de densification urbaine se poursuit : cela se traduit principalement dans certains quartiers par la construction d’HLM qui répondent aux besoins des ménages modestes et par la multiplication des copropriétés, construites dans le centre et ses abords à l’emplacement de bâtiments plus anciens ou en périphérie sur des terrains vierges. Ces immeubles collectifs ont fortement modifié le paysage urbain, et en particulier les différents versants de la ville, jusque-là encore relativement préservés de toute urbanisation.

Bibliographie

GAUTHIEZ Bernard, Espace urbain : vocabulaire et morphologie, Paris, Monum, Ed. du patrimoine, coll. « Principes d’analyse scientifique », 2003, 493 p.

PÉROUSE DE MONTCLOS Jean-Marie, Architecture : méthode et vocabulaire, Paris, Imprimerie nationale / Inventaire général, 2004 (4e éd.), 622 p.

[1] Il a mené le chantier de reconstruction de l’église de Meljac en Aveyron, entre 1897 et 1900 (source : association de Meljac. http://www.meljac.net/wpsmn/?attachment_id=13806).

[2] Selon Bernard Gauthiez, la maison de ville est un « édifice à un ou plusieurs niveaux, comportant un bâtiment à l'alignement destiné à l’habitation d'une famille, et conçu pour former un front continu le long de la rue, en étant accolé à d’autres édifices identiques par le biais de murs mitoyens » (Espace urbain : vocabulaire et morphologie, Paris, Monum, éd. du patrimoine, coll. « Principes d’analyse scientifique », 2003, p. 207.).

[3] Thésaurus de la désignation des œuvres architecturales et des espaces aménagés, Documents et méthode, n° 7, Inventaire général du patrimoine culturel - Ministère de la Culture et de la Communication, 2014 (édition revue et complétée, p. 58. En ligne : https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Publications-revues/Thesaurus-de-la-designation-des-aeuvres-architecturales-et-des-espaces-amenages

1Sylvain Landès a mené le chantier de reconstruction de l’église de Meljac en Aveyron, entre 1897 et 1900 (source : association de Meljac. http://www.meljac.net/wpsmn/?attachment_id=13806).2Selon Bernard Gauthiez, la maison de ville est un « édifice à un ou plusieurs niveaux, comportant un bâtiment à l'alignement destiné à l’habitation d'une famille, et conçu pour former un front continu le long de la rue, en étant accolé à d’autres édifices identiques par le biais de murs mitoyens » (Espace urbain : vocabulaire et morphologie, Paris, Monum, éd. du patrimoine, coll. « Principes d’analyse scientifique », 2003, p. 207.).

Le présent dossier met principalement l’accent sur l’architecture de la première moitié du 20e siècle à Rodez. Dès les années 1890, un renouvellement architectural se fait jour à Rodez avec la construction d’immeubles et de villas. Ces dernières sont élevées aux abords de la ville, sur les coteaux ou au faubourg, et illustrent le désir de certains habitants aisés de profiter des panoramas offerts sur le Cantal, l’Aubrac, le Lévezou et le Ségala. L’accroissement urbain reste faible et il faut attendre l’entre-deux-guerres, période durant laquelle la ville s’étend de manière significative, pour que la typologie de la maison de ville se développe à Rodez. Les lois sur les Habitations à bon marché permettent alors à de nombreux ménages modestes de faire bâtir leur maison. Quelques groupes de maisons sont aussi édifiés, notamment par l’office public municipal d’HBM. Dans le même temps, la construction d’immeubles par des propriétaires souvent commerçants se poursuit et les premières copropriétés sont bâties au début des années 1940. Cette dernière forme d’habitat se développe massivement durant la seconde moitié du 20e siècle et renouvelle considérablement le paysage urbain. Dans le même temps, le parc de logements sociaux s’accroît, d’abord avec les HLM de Gourgan et de Saint-Éloi. La construction de maisons individuelles est encouragée par le plan Courant de 1953 et s’intensifie dans les décennies suivantes avec l’aménagement de nombreux lotissements.

La maison de ville reste assez rare au tournant du 20e siècle, en raison d’un accroissement urbain faible et du manque de terrains à bâtir. En revanche, on élève des immeubles et des villas dont le style éclectique tranche avec l’architecture vernaculaire jusque-là majoritaire. Le décor reste néanmoins peu abondant. Entre les deux guerres, le style Art déco se diffuse largement. Adopté par tous les architectes locaux, en premier lieu André Boyer, Jean Vigouroux et Jules Andrieu, il plait aux commerçants qui renouvellent leurs boutiques et leurs devantures, ou se font construire quelques beaux immeubles et villas. Le décor se limite surtout à quelques ornements géométriques et aux ferronneries. On rencontre aussi des villas de style régionaliste, normand ou basque, et l’influence plutôt étonnante du style Arts and Crafts dans quelques édifices de la fin des années 1930, telle que la villa des Roses. L’attachement à la tradition locale perdure néanmoins et se traduit par quelques réalisations singulières, comme les maisons en grès rose construites par l’entreprise Foissac avenue Durand-de-Gros (1923 et 1930), remarquables par ailleurs à leur décor.

  • Typologies
    maison de ville ; villa ; pavillon ; maison à plusieurs unités d'habitation ; immeuble
  • Toits
    ardoise, tuile creuse mécanique, béton en couverture
  • Murs
    • gneiss
    • calcaire
    • grès
    • brique
    • moellon
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Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2020
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