L'usine constitue l'une des plus anciennes implantations industrielles encore visibles à ce jour à Lavelanet. Localisée à l'emplacement d'un ancien moulin foulon seigneurial en place avant la Révolution, elle est fondée au début du XIXe siècle par Etienne Dumas, originaire de Lavelanet mais formé à Chalabre, pionnier local de l'industrie dès 1801 et fils du boulanger seigneurial qui avait loué puis racheté le foulon dès 1803. Dumas est associé au Lavelanétien Jean-Baptiste Dastis. En 1819, les deux intéressés cessent leur association mais continuent de partager leurs moyens de production. Ils louent, avec Ambroise Authié et le beau-frère de ce dernier, Médar Laprotte, les bâtiments industriels et achètent certaines machines ensemble. Il s'agit du premier véritable ensemble intégré de Lavelanet. Filature et tissage, puis foulerie et parerie (destinée à l'ennoblissement) sont construits avant 1816 et sont complétés par une teinturerie notamment. Sur le cadastre napoléonien, elle apparaît sous le nom de « fabrique Saint-Sernin », prenant son nom du saint patron de l'église de Bensa toute proche, elle-même fondée par les moines de Saint-Sernin de Toulouse. Cette raison sociale existe probablement dès 1816. L'usine est officiellement autorisée par ordonnance royale en date du 27 juillet 1832, récolée en 1846. Ces bâtiments initiaux (partie A), pour partie subsistants, se trouvent à l'emplacement des actuelles parcelles C 6386 et 6387. Le plan de Lavelanet daté de 1847-1849 présente également le site comme « fabrique ». Dans les années 1850-1860, l'usine s'étend dans une nouvelle partie qui fait face au site historique (partie B : retorderie, ourdissage, tissage) ; cette extension répond à la demande de Dastis, formulée en 1866 alors que le chantier de construction a déjà démarré. Le 18 juillet 1866 est présentée une pétition du sieur Dastis pour demander l'établissement d'un 2e site pour filage, préparation et apprêts ; sur le plan de projection, le bâtiment semble correspondre à ce que l'association AMTPC ont présenté construit vers 1855 (partie sud de la partie B). Dans le rapport de l'ingénieur 1866, on apprend que cette « parerie » a vu sa construction déjà entamée avant même la visite de l'ingénieur. On apprend aussi que le canal appartient tout entier aux Dastis, et que ceux-ci possèdent déjà l'usine St-Sernin active à proximité immédiate. Cette dernière a été autorisée par ordonnance royale du 27 juillet 1832 (récolée le 2 juin 1846). L'administration se déclare incompétente à juger du bien-fondé de l'aménagement, étant donné que le canal est propriété privée, alimentant par ailleurs deux autres usines en aval (Fouet et Marchand). En 1881, l'usine Dastis est reprise par Henri Courrent, négociant et propriétaire, maire de Bélesta, bien que le rachat par les Dumons paraisse dater de 1866 selon d'autres sources. En 1885, la partie A est remaniée par la réalisation d'un nouveau magasin de matières premières. Vers 1887, les Dumons, soucieux de remédier à la dispersion préjudiciable de leurs sites de production dans Lavelanet, choisissent de faire de ce site le lieu d'implantation d'une usine intégrée qui dès lors regroupe l'ensemble des étapes de fabrication. En 1892, la première cheminée est probablement édifiée ; à la même période, les parties A (foulon et apprêts) et B (magasins et mélanges) sont encore modifiées. Jusqu'à la fin du siècle, les Dumons continuent d'exploiter quelques sites annexes, dans le centre-bourg et au bord du Touyre (IA09010007), et décident de renommer l'usine à leur patronyme, « Dumons Frères ». Le plan du Touyre de 1895 décrit de façon plus explicite une « fabrique de draps dite de Saint-Sernin des sieurs Dumons frères ». Dans les années 1920, les Dumons édifient de nouveaux bâtiments de filature à proximité du Touyre (partie C). Dumons est l'une des deux grandes usines intégrées de Lavelanet à l'aube de la crise des années 1930, avec l'usine Escolier-Diant (Minovez, p. 105). En 1937, Victor Dumons cède l'usine à ses fils René et Henri. Plus tard, dans les années 1940, quelques maisons ouvrières sont construites aux abords de l'usine, à l'initiative de la direction, qui transforme l'entreprise en société en nom collectif (1943) puis SARL (1947). Après-guerre, Dumons bâtit son succès sur la production du manteau breton « kabig », en laine et fibrane (tissus double face réversibles), tout en fabriquant veste et pantalon homme, et surtout de l'habillement femme, sans s'engager véritablement dans le filon des tissus techniques et en demeurant sur le créneau traditionnel du cardé. Ses marques de fabrique se nomment Pyralp, Pyrolmes. Les bâtiments sont encore étendus, notamment à travers l'édification d'une nouvelle unité de tissage (partie D), puis l'extension des ateliers de filature (partie C). Le dépôt de matières en C 7162 (ex C 1687) date de 1957. La même année, la société est divisée en deux SARL : société Dumons frères pour les affaires industrielles, et société immobilière Saint-Sernin. Georges Dumons reprend les rênes de l'entreprise en 1962 : il est président du directoire, tandis que son oncle René demeure président du conseil de surveillance avec voix prépondérante. L'entreprise travaille un temps à la fabrication de tissus pour automobile (Ford, Simca : Aronde, Bagheera, P60), avant de céder le marché à Michel Thierry, établi à Laroque-d'Olmes (IA09010043). Georges Dumons développe une méthode de sous-traitance originale, en installant des métiers à tisser lui appartenant dans les ateliers des artisans (ailleurs, les métiers sont généralement propriété des sous-traitants). Entre 1965 et 1969, les ateliers de tissage sont modernisés. Dans les années 1970, l'entreprise commence à externaliser une partie des travaux de finition au Maroc. A cette époque, des tensions familiales nuisent à l'équilibre de l'entreprise, qui parallèlement, fait face à une concurrence croissante. Georges Dumons exerce la fonction de PDG, et exploite parallèlement une filature d'angora dans l'ancienne usine Bonnail de Sainte-Colombe-sur-l'Hers (« La Boule de Neige », rapatriée de Paris). Jean-Pierre Dumons, frère de Georges, occupe le poste de directeur commercial. En 1972, la partie D est fortement étendue pour accueillir un nouveau magasin de fils et ourdissage-tissage moderne. Le 10 février 1973, un important incendie ravage un grand nombre de métiers à tisser, qui une fois reconditionnés à Lyon, sont revendus aux artisans sous-traitants. En 1975, l'usine fait l'objet d'un reportage évoquant la condition féminine dans le travail industriel. En 1976, contraint de se retirer, Georges Dumons laisse place à Daniel Esplandieu qui assure la gérance jusqu'à la cessation d'activité, qui intervient en septembre 1981 après trois vagues de licenciements (1979, 1980 et 1981). Rachetée à la société immobilière Saint-Sernin par le Conseil général, à l'initiative du maire de Lavelanet Jean-Michel Caux, la partie A accueille depuis 1986 le Musée du Textile et du Peigne en Corne de Lavelanet. Cet établissement est fondé par une association de passionnés et anciens du secteur née en 1983, autour de Raoul Pigeon. Les parties B (profondément remaniée vers 1988), C (idem) et D accueillent d'autres activités économiques. La partie D a connu une activité textile ultérieure (tissage Lima dans les années 1980-1990). Le musée, détenteur du label Musée de France, est directement géré par la Communauté de communes du pays d'Olmes depuis les années 2000. Il fait l'objet d'un projet de renouvellement de la muséographie-scénographie, porté par la CCPO, l'association des Amis du Musée (AMTPC) et le Pays d'art et d'histoire des Pyrénées Cathares. La place entourant les bâtiments a été baptisée du nom de Jean Canal, ancien tisserand, le 25 septembre 2009 (délibération du conseil municipal du 13 juillet 2009).
A la fin des années 1950, l'entreprise Dumons emploie 316 personnes. Ils sont 350 en 1980. Après-guerre, la direction organise la création d'un syndicat interne d'entreprise. On relate un important mouvement social en 1952-1953.