Dossier d’œuvre architecture IA09006001 | Réalisé par
  • patrimoine de la villégiature
Présentation de la station thermale de Carcanières-les-Bains
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Inventaire général Région Occitanie

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Pyrénées
  • Hydrographies Aude
  • Commune Carcanières
  • Lieu-dit Bains de Carcanières Carcanières-les-Bains
  • Adresse route départementale 25 , route départementale 118
  • Cadastre 2020 A1

Carcanières-les-Bains est un hameau de Carcanières dans l’arrondissement de Foix, canton de Quérigut. Les sources thermales sont assez distantes du village. La station se situe sur la rive gauche de l’Aude, en face de la station d’Escouloubre. La commune de Carcanières compte 13 sources qui ont souvent changé de nom au cours de l’histoire. Carcanières se trouve à 1 200 mètres de la frontière départementale entre l’Aude, l’Ariège et les Pyrénées-Orientales. Située à 900 mètres d’altitude, la station se développe aux abords de la rivière Aude, au fond d’une vallée abrupte et hostile, où la beauté sauvage va de pair avec la difficulté d’accès. Si la bonne réputation des eaux a permis un développement rapide de la station, sa prospérité s’est trouvée limitée par des conditions d’accès difficiles.

Dans un document d’archive de 1894 relatif au bornage des établissements thermaux de Carcanières, l’auteur tente de remonter l’historique des propriétés des sources (AD09_8M25-2). Après la mort de Charlemagne, le Donnezan (canton de Quérigut) est cédé par Roger Ier à la maison de Cerdagne à la fin du Xème siècle, afin de mettre un terme aux conflits. Il passe ensuite aux mains de la maison d’Aragon et en 1208, Pierre II roi d’Aragon en fait donation à Raymond Roger, cinquième comte de Foix et ses successeurs. Les comtes de Foix ont toujours conservé le Donnezan, ils en avaient propriété de droit en leur qualité de seigneurs hauts justiciers. Avec le courant d’inféodation connu aux XIe, XIIe et XIIIe siècles, ils concèdent en fief certaines redevances féodales : c’est le cas de Carcanières. En 1450, la seigneurie de Carcanières appartient à Hugues et Jayme de Roquelaure. Leurs descendants font face à d’impérieuses nécessités, et la démembrent en l’aliénant par fractions. À la fin du XVIIème siècle, la seigneurie est reconstituée par le Sieur Rocher, marchand à Quérigut. Selon un dénombrement réalisé en 1696, la seigneurie consistait uniquement dans le droit de prélever la dime due par les tenanciers sur les grains, agneaux, chevaux, laines et fromages. Il n’est fait aucune mention de l’exploitation des eaux.

Les prémices de l’aménagement des sources

Les sources ne sont pas exploitées jusqu’au milieu du XVIIIème siècle (ALIBERT, 1853). Les eaux s’écoulent jusqu’alors naturellement, et ont creusé une excavation dans la roche. Les gens prennent des bains, mais aucune installation n’est encore aménagée. L’efficacité des eaux et la rumeur des guérisons attirent les habitants des montagnes voisines. Les habitants de Carcanières établissent à la saison des eaux, des tentes provisoires, afin de rendre les bains plus commodes. Ils prélèvent quelques centimes par bain. En 1791, Jacques Vidal construit les premières cabanes en pierre sèche recouvertes de planches. A l’intérieur, il installe des baignoires et amène l’eau jusqu’à elles par des tuyaux de bois. Il améliore également les sentiers qui mènent à Puch et à Carcanières. Ces premières installations renforcent la fréquentation des bains de Carcanières. Vidal a établi deux établissements sur les sources du bain fort au nord et du bain doux au sud.

L’exploitation des eaux, source de conflits

Face à l’intérêt soudain pour les eaux de Carcanières, la commune s’interroge sur la propriété des sources thermales. Un arrêté du 23 juillet 1797 maintient Vidal comme propriétaire des bains doux. La commune possède alors 7 sources qu’elle n’exploite pas. C’est alors qu’Esparre, de Roquelaure, Uteza et Bousquet s’associent. Le 12 mars 1798, ils obtiennent l’autorisation administrative de réaliser des fouilles. Ils découvrent 4 nouvelles sources et sont autorisés par l’administration centrale, à les utiliser dans l’intérêt des malades (Bonnail, 1905, p.45). Esparre et de Roquelaure, voyant l’engouement croître autour des eaux, souhaitent étendre leurs biens. Ils ont recours à la mine pour dégager un espace dans la montagne, entre les bains doux et les bains forts. Ils installent une maison destinée à servir d’hébergement pour les baigneurs (chalet du tilleul). Face à cette concurrence, Vidal abandonne le bain fort pour concentrer ses ressources sur l’amélioration des bains doux. Mais la commune de Carcanières continue d’en revendiquer la propriété. Les conflits font alors grand bruit, ce qui attire des baigneurs de plus en plus nombreux. La question de la propriété des sources devient un enjeu important, et fait l’objet de nombreuses démarches administratives. En 1807, le maire de Quérigut atteste que 600 malades sont venus prendre les eaux de Carcanières. Le 19 août 1808, le directeur de l’enregistrement et des domaines met un terme à la querelle, en se fondant sur l’article 539 du Code Napoléon : les sources sont propriétés de l’Etat. Afin de ne pas risquer un procès avec l’Etat, Esparre, de Roquelaure et Vidal s’accordent à l’amiable et l’Etat abandonne ses prétentions sur un bâtiment plus efficacement géré par ceux qui l’avaient élevé et fait prospérer (AD09_8M25-2).

L’expansion de la station

Vidal obtient l’autorisation d’exploiter les eaux dans son établissement. Il a amélioré les équipements et établi une construction définitive aux bains doux (Cascade). Le 27 septembre 1830, un acte authentique est passé entre la commune de Carcanières et le Sieur Vidal, ancien propriétaire des eaux thermales de Carcanières. Cet acte stipule que Vidal accorde l’usage des eaux aux habitants gratuitement (AD09-8M25-2). Il laisse à leur disposition une baignoire qu’il doit entretenir, dans laquelle les habitants pourront se baigner. Il leur accorde le droit de laver leur linge dans un bassin prévu à cet effet en dehors de la saison des bains, soit du 1er novembre au 1er avril. Vidal s’engage à payer à la commune une rente annuelle de cent francs. À son décès, ses héritiers vendent le bâtiment à Jacques Esparre. De Roquelaure, alors maire de Carcanières, établit des constructions sur les sources Campoussy et la Barraquette. La maison entre les deux établissements est améliorée et agrandie en hôtel (Soula ou des tilleuls). Elle appartient alors à Roquelaure et Uteza. Dans le cadastre ancien de 1834-1835, les Bains de Carcanières sont mentionnés et composés du chalet de la source, des établissements Esparre et Roquelaure.

Constant Alibert est chargé de l’analyse des sources de Carcanières. Dans son ouvrage de 1853, il nomme les 13 sources, et signale que les sources de Campoussy, la Barraquette, la source Mis et les buvettes nord et midi de l’établissement de Roquelaure appartiennent à M. De Roquelaure. Les autres sources appartiennent à Siméon Esparre. L’arrêté ministériel autorisant les propriétaires à l’exploitation des sources date du 14 décembre 1854 (AD09_8M25-3). Aux archives départementales de l’Ariège, une autorisation de travaux de captage d’une source d’eau thermale est accordée à Roquelaure en 1870 (AD09_7S146), et à Sicre et Bastié en 1873 (AD09_7S1245). Le service des mines rend un rapport de visite le 20 octobre 1861 (BRGM, 1984). Il donne une première description des 13 sources : à l’émergence située en aval, un établissement est alimenté par 3 sources : Marie, Siméon et buvette Esparre. A l’émergence située en amont, 7 sources alimentent deux établissements : sources Régine, Mys, Campoussy, Bain Fort, Roquelaure, Buvette Roquelaure (2 griffons) et Barraquette.

Lorsqu’en 1889 les eaux sont captées pour la construction de l’usine hydroélectrique, la configuration de la station est modifiée. Bonnail en 1905 décrit les établissements de Carcanières. La station comprend alors les deux barraquettes vieille et neuves, contenant chacune une galerie de bains avec douches, alimentées par des sources d’eau très chaudes tempérée avec l’eau froide de la buvette de la Vierge. Cet établissement contient de nombreuses chambres et cuisines. L’hôtel du Soula ou chalet des Tilleuls appartient au même propriétaire de Roquelaure. Bonnail indique que cet établissement vient d’être surélevé. De Roquelaure possède également l’hôtel sur la commune d’Escouloubre, auquel on accède par un petit pont qui franchit la rivière Aude. Près de ce pont, un lavoir recueille l’eau la plus chaude du secteur, la source de la Régine, utilisée par les habitants de la région pour laver le linge et les laines en dehors de la saison des bains. Cette source appartient à Esparre, ainsi que deux corps de bâtiments nommés par Bonnail ancienne maison Esparre, qui correspond au chalet de la source, les anciens bains doux. Le bâtiment du haut, près de la source, contient les bains, bassins et cabines au rez-de-chaussée, ainsi que des chambres et cuisines dans les élévations. L’autre dépendance en contrebas contient les écuries, et le café, ainsi que les chambres en étages.

Lorsque le Dr Courrent livre une description de la station de Carcanières en 1913, il ne mentionne plus que 8 sources exploitées à des fins hydrothérapiques (Courrent, 1913). Les sources Marie, Siméon et la buvette Esparre alimentent l’établissement de la Cascade (Esparre). L’établissement Roquelaure dit Barraquette neuve, est alimenté par les sources Régine, Barraquette neuve, Barraquette vieille et buvette de la Vierge. L’établissement de la Baraquette vieille est alimenté par la source dite du bain fort.

L’exploitation de l’énergie hydroélectrique

En 1916, l’usine hydroélectrique d’Escouloubre est construite par la Société Méridionale du Transport de Force, dirigée par Joaquim Estrade. Par arrêté préfectoral, daté du 18 octobre 1923, le Préfet de l’Ariège et la chambre de commerce sont appelés à donner leur avis sur une demande de la Société Méridionale de Transport de Force d’exploiter la chute d’eau du Galbe, confluent de l’Aude. Cette concession sollicitée vise à l’établissement d’une usine hydroélectrique. Dans les pourparlers entre les différentes administrations sollicitées et le société dirigée par Joaquim Estrade, aucune mention n’est faite de l’établissement thermal de Carcanières.

L’électricité est alors distribuée gratuitement aux habitants. Ce privilège est remis en question dans les années 1940, lorsque la Société Méridionale de Transport de Force est nationalisée en EDF. Dans un document de la Direction de la Santé daté de 1950, la station de Carcanières est décrite comme appartenant alors à EDF (AD09_342W59). Seules deux sources sont désormais exploitées, la source de la cascade est recueillie dans un bassin en ciment d’un volume d’une dizaine de mètres cube. Elle est acheminée par gravité pour alimenter six baignoires en marbre. La source de la Barraquette est très chaude (80° environ) et sulfureuse. Elle surgit directement du rocher et alimente l’établissement du même nom. Il contient une salle de humage, et l’eau est ensuite évacuée dans l’Aude. Ce document relate que les bains de Carcanières ont pu bénéficier de la bonne réputation de ses eaux, mais les difficultés liées à l’acheminement des baigneurs ont freiné son expansion. Avec l’implantation d’usines hydroélectriques et de barrages dans le secteur, EDF se rend acquéreur d’une partie des hôtels et cafés afin d’y loger ses agents. Peu à peu, l’activité thermale est abandonnée.

Aujourd’hui, les différents bâtiments qui composent l’ancienne station de Carcanières sont privés. L’eau thermale est toutefois exploitée en bains privatifs et utilisée en géothermie pour le chauffage des bâtiments.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 18e siècle , daté par source

La station de Carcanières se compose de divers bâtiments. Les Baraquettes vieille et neuve contiennent une galerie de bains avec douches, alimentée par des sources très chaudes tempérée par mélange avec l’eau de la buvette de la vierge. Elles appartenaient à De Roquelaure, ainsi que le chalet des tilleuls ou hôtel du Soula.

La Source de la Régine, recueillie dans un lavoir, se situe à côté des Barraquettes. C’est la source la plus chaude et la plus abondante. Elle n’est pas exploitée, et appartient à Esparre.

Le Chalet de la source, identifié comme le premier établissement Esparre, correspond aux premières constructions des bains doux établies par Vidal.

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • AD09- 3P759 Plans cadastraux parcellaires 1834-1835

    AD Ariège : 3P759
  • AD09-7S431 Scierie

    AD Ariège : 7S431
  • AD09-7S432 Réglementation sur les eaux, 1855.

    AD Ariège : 7S432
  • AD09-7S433 Service hydraulique, 1886.

    AD Ariège : 7S433
  • AD09-7S1230 Police des eaux, usine du Carcanet, 1919.

    AD Ariège : 7S1230
  • AD09- 7S1244 Règlementation des eaux

    AD Ariège : 7S1244
  • AD09-7S1245 Police des cours d'eaux, 1873.

    AD Ariège : 7S1245
  • AD09_7S1246 Autorisation travaux captage source thermale Bataille Roquelaure, 1873

    AD Ariège : 7S1246
  • AD09-8M25-4 Règlement des eaux, 1858.

    AD Ariège : 8M25-4
  • AD09- 77W51 Urbanisme habitat 1969 Paul Abadie

    AD Ariège : 77W51
  • AD09-229EDT/N1-7 Extraits du registre des délibérations du conseil municipal, 1905-1930.

    AD Ariège : 229EDT/N1-7
  • AD09- 482W151 Médus Léon, abbatoir 1952, section A n°5

    AD Ariège : 482W151
  • AD09-8M25-1 Carcanières Vidal-Rocher, 1805

    AD Ariège : 8M25-1
  • AD09-8M25-2 Carcanières Augustin Vidal 1869

    AD Ariège : 8M25-2
  • AD09-8M25-3 Carcanières

    AD Ariège : 8M25-3
  • AD11-5M115 Surveillances des sources Escouloubre, Ginoles, Rennes (205)

    AD Aude : 5M115
  • AD11-5M117 Station hydrominérale 1921-1923

    AD Aude : 5M117

Bibliographie

  • BONNAIL, Haute vallée de l'Aude et ses environs, Escouloubre-les-Bains, 1905

    AD Aude : N°932
  • FERRAND, Notice sur les eaux sulfurées sodiques des bains d'Escouloubre, 1888

    AD Aude : N°1559-105
  • CAZALS, Rémy, Sources de l’Aude, Archives Départementales de l’Aude, Carcassonne, 1991.

    AD Aude
  • VIDAL, Escouloubre, petit village en péril, petit essai d'histoire anecdotique, 1981

  • ALIBERT, Notice sur les eaux minérales de Carcanières, 1853.

    Bibliothèque nationale de France
  • LAGARDE, J-L. Guide pratique du baigneur dans les stations thermales de l'Aude, 1902.

  • CHABAUD Nathalie, Exposition du service culturel de la mairie d'Escouloubre, non publié.

  • BONNANS, Les eaux minérales du département de l'Ariège, 1882.

    Bibliothèque nationale de France

Documents figurés

Date(s) d'enquête : 2019; Date(s) de rédaction : 2020
(c) Université de Perpignan Via Domitia, laboratoire CRESEM
(c) Inventaire général Région Occitanie